Le Sénégal est un pays de paix, de justice et de foi, dit-on très souvent. Cela a valu à ce beau pays des considérations positives qui tutoient l’admiration. Mais hélas, notre grandeur si magnifiée ailleurs n’est pas toujours la juste traduction de nos réalités internes. Le vécu social du Sénégalais est miné par la politique non dans le sens noble de ce vocable, mais dans ce qu’il a de terni, de laid et de pourri : le positionnement politique au mépris de la norme et de la bonne conscience pour s’assurer une ascension sociale. Tout le mal du pays se trouve dans ça. Cet ilot des manœuvres bassement orchestrées par ceux-là mêmes qui doivent donner l’exemple. Je ne suis pas en colère et je ne prends personne en pitié, y compris moi-même, mais j’ai honte et je suis indigné jusqu’à l’extrême. Si c’est cela faire de la politique, ce pays continuera à être dirigé par des faussaires qui ont déjà vendu leur âme au diable.
Nos hommes politiques ont une tendance toute naturelle pour le blocage
Senghor avec Mamadou Dia ; Abdou Diouf avec Abdoulaye Wade ; Abdoulaye Wade avec Macky Sall et ce dernier avec Ousmane Sonko. Voici le schéma de projet politique offert aux Sénégalais depuis les indépendances. La survivance de l’esprit trapu qui voit en la politique l’usage d’armes non conventionnelles, en ce XIXème siècle, est une réelle menace pour la démocratie. On n’anéantit pas un adversaire politique, en régime démocratique, mais on le combat sur le terrain des visions et des projets. Et le peuple, seul juge, délivre son verdict à l’issue d’élections transparentes et régulières. Pour aujourd’hui et peut-être pour demain, le Sénégal semble vivre dans cette tension permanente qui accable les consciences. Deux hommes divisant le pays en deux : ceux de celui-ci et ceux de celui-là. La ligne de démarcation n’est pas établie par principe. Et la convoitise, la jalousie, la rancune mortelle servent de pièces aux manœuvres de liquidation. Celui qui tient le pouvoir oublie que l’histoire est en marche, mais aussi que la roue tourne. La sagesse antique et sacrée enseigne que celui qui fait l’usage de l’épée pour trancher la gorge d’innocents hommes sera victime de cette même épée qu’il aiguise avec faste. Le principe du Karma est à l’œuvre. Pour le cas en l’espèce de Macky-Sonko, le mal est plus profond. Le premier fut victime de coups bas de la part de son mentor de toujours, celui qui l’a fabriqué de toute pièce. Et pour toute réplique, au lieu de pardonner et de se mettre au service du pays, Macky Sall avait nourri une haine farouche en l’endroit de Wade jusqu’à emprisonner le fils de celui-ci. Méchanceté ne peut être plus grande ! Karim comme beaucoup de ses camarades de parti avait des comptes à rendre. Mais, je peine à croire que la justice fut équitable, en ce cas précis, en poursuivant le fils de l’ancien président jusqu’à le mettre en prison en laissant l’autre élément du duo, Abdoulaye Baldé, en liberté. Les convocations sporadiques de Baldé à la CREI (Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite) étaient une pure mascarade pour légitimer la persécution de Karim. Pauvre république ! Cela traduit, nous l’assumons, de la méchanceté. Quand l’Etat s’incline devant des liens de parenté et de logiques familiales, il y a de quoi s’inquiéter pour la démocratie. Non, le Sénégal n’est pas une démocratie, au moins, depuis 2012. Baldé n’a dû son salut qu’à la faveur de son mariage avec la fille de celui dont le nom fut gracieusement donné à notre actuel président de la république. Quel pays !
J’ai mal de mon pays
J’ai mal de mon pays en voyant un président faire des coups bas alors que c’est à cause de ces mêmes faits que les Sénégalais ont manifesté leur indignation pour le porter au pouvoir. Sans le sentiment d’injustice que les Sénégalaises et Sénégalais ont vu dans le traitement de Macky Sall après la convocation qu’il avait servie à Karim Wade pour venir répondre à l’Assemblée Nationale, il ne serait pas président en 2012. J’ai le mal du Sénégal en moi en voyant avec quelle mesquinerie le régime en place tente de liquider un homme politique qui, disons-le, est le symbole vivant du nationalisme assumé sans tricherie ni connivence avec l’ancienne puissance coloniale. Garder le silence au moment où l’on doit parler est lâcheté. Ne pas prendre position dans la confusion est hypocrisie. Celui qui pense trouver la paix dans une abjecte neutralité pendant que le mal ronge la société est en deçà de son manteau d’humain. La citoyenneté a son lot de devoirs. Je parle, je dénonce, je me révolte, je milite pour la liberté et la démocratie. Je suis du côté de la dignité humaine et de la sauvegarde de l’honneur, du mérite et de l’honnêteté. Je parle avec toute la sincérité du cœur : je n’ai pas voté pour Sonko en 2019 et je n’envisageais pas, jusqu’il y a peu, de le faire en 2024, si Dieu me prête longue vie. Mais ce qui se passe me révolte. Je ne compte pas me taire. J’ai peiné et je peine encore. Et la plume me sert d’arme de révolte pour, au moins, régler trois choses : assumer mon rôle de citoyen sénégalais ; répondre de mon statut d’intellectuel et servir le camp de la Vérité. Hélas, la vérité est orpheline dans ce pays ou du moins minoritaire. De quel délit Ousmane Sonko est le nom ? Ce chef de parti est un empêcheur de tourner en rond pour le régime. Son délit est d’avoir l’amour et des ambitions pour son pays comme Khalifa Sall. Si j’ai un conseil à lui donner, en tant que membre du parti politique Forces Démocratiques du Sénégal dont le leader est Dr Babacar Diop, c’est : mon cher Ousmane Sonko, le Sénégal mérite tous les sacrifices. Bats-toi avec toutes les armes légales que garantissent la Constitution de notre pays et la paix civile. Car, celui qui veut te ruiner aujourd’hui était prêt à mettre ce pays à feu et à sang, en 2012. Il n’a jamais été un modèle de paix et de cohésion. Je vois que les Sénégalais oublient trop vite. Macky Sall avait menacé Wade de créer un gouvernement parallèle si l’élection présidentielle venait à être repoussée. J’ai de bonnes raisons de croire qu’en 2019, Sonko était arrivé en deuxième position et que le second tour était acté. Mais des combines l’ont placé troisième avec la majorité pour le président sortant. J’avais voté pour Idrissa Seck, avec conviction. Mais je le regrette, aujourd’hui. Au nom de la discipline que j’enseigne, je ne peux pas être du rang de ceux qui gardent le silence quand les grandes heures de l’histoire exigent la prise de parole pour dénoncer le mensonge et défendre la Vérité. « Ne pas voir le danger quand il vous menace est une preuve de bêtise et non de courage », dit Arthur Conan Doyle. Pour cette histoire de mœurs qui recèle tellement de failles, j’interpelle toutes les femmes du Sénégal et d’ailleurs. La muraille protectrice de la dignité de la Femme vient de recevoir un sacré coup de déshonneur. Oui, pour la première fois, je n’ai pas vu, moi, une seule personne prendre objectivement la défense de cette dame. Elle s’est laissée entrer dans un deal de mauvais goût. C’est un cas sans précédent qui fragilise les causes des femmes que tout homme sensible doit défendre. Madame A. S. semble vivre pour autre chose que pour la dignité et l’honneur du genre humain. Je suis de ceux qui prônent farouchement l’idée qu’il ne faut jamais désespérer de l’homme, au sens générique du terme. Mais, ce mardi 9 février, en me réveillant, j’ai eu mal en regardons jusqu’où l’humain est prêt à aller pour nuire son prochain. Les animaux auront plus d’humanité que nous autres hommes ?
Mon cher Sonko
Mon cher Sonko, ils veulent te tuer symboliquement. Ce qui est plus vil et ignoble que la prédation de l’animal. Les tenants du pouvoir veulent amener les Sénégalaises et Sénégalais a nourri de la répugnance à ton endroit. Oui, c’est le lot tragique des grands hommes que de souffrir, de subir l’injustice et d’être la cible de méchantes entreprises. Je comprendrai que tu puisses t’en vouloir de passer souvent dans ce lieu de massage. Mais doit-on se méfier de cette bonne femme auprès de qui on prend quotidiennement son repas ? Doit-on la soupçonner de nous empoisonner s’il arrive qu’elle soit payée pour ça ? Non, je ne pense pas ! Elle veut vivre honnêtement de son travail. Souvent, si l’on vient à chuter dans le mal, la faute est à ceux qui nous appauvrissent pour ensuite venir exploiter avec un cœur plein d’ordures notre misère. Mon cher Sonko, j’ai du respect pour toi. La lecture hégélienne de l’histoire me donne à penser que tu es un élément essentiel dans la marche du pays. La Raison universelle a toujours des adjuvants dans sa réalisation. Aujourd’hui, je vois des gens s’engager en politique alors qu’il y a dix ans de cela ils ont celle-ci en horreur. C’est ton mérite ! Tu as élevé le niveau du débat politique en l’inscrivant sur des idées et des projets de société et non sur des personnes. Certains Sénégalaises et Sénégalais avaient fini par croire qu’être président de la république n’est pas un rêve que tout citoyen pouvait nourrir. Dans Le coup de pistolet, Alexandre Pouchkine note cette terrible vérité : « Le manque de hardiesse est ce que la jeunesse pardonne le moins. Et pour elle, le courage est le premier de tous les mérites, l’excuse de tous les défauts ». Tu as cette qualité. Macky Sall et ses sbires doivent savoir que le Sénégal leur survivra. Mon cher Sonko, repense à toutes ces figures nobles qui sont restées zen, le prophète Jacob en tête. Plus proche de nous, dans nos murs, pour être précis, Kocc Barma Fall a failli passer au poteau à cause de manœuvres peu recommandables. Les basses âmes excellent dans l’art de faire le mal. Elles sont pires que le démon et l’animal. Ce dont je suis sûr, c’est que la Vérité éclatera au grand jour. Et cette dame -que de véreux ‘’pouvoiristes’’ ont exploitéeemportera à jamais cette amputation qu’elle a faite à la Femme. Le 14 décembre 2005, le juge Kéba Mbaye avait laissé entendre ces mots dans la grande salle de conférence de l’Université Cheikh Anta Diop : « Je ne serai peutêtre plus de ce monde quand surviendront les conséquences de ce choix, pour lequel les Sénégalais auront opté en faisant soit ce qui est éthique soit ce qui ne l’est pas. Ce jour-là, je suis sûr qu’ils diront en eux-mêmes : « et pourtant le père Kéba, avant de partir, nous avait avertis ». Et d’outre-tombe, je leur répondrai, selon le choix qu’ils auront eu à faire, suivant le cas, heureux : «c’est bien», ou, triste, mais tout de même rancunier : «après tout, vous l’avez voulu» ». Cette invite doit nous habiter afin de miser sur la positivité qui seule sauvera le Sénégal. C’est avec une profonde tristesse que je regarde ce beau pays être mené par une classe dirigeante malveillante et en panne d’inspiration. Si j’ai décidé de prendre ma plume aujourd’hui c’est pour dénoncer la démarche très maladroite du régime qui, pour ternir l’image d’un homme juste que je regarderai comme l’un des plus farouches défenseurs de l’intérêt national, a eu recours à la Femme, mère, tante, sœur, cousine, amie, confidente. J’ai dit mon mal du pays en espérant qu’il sera extirpé un jour prochain qui arrivera avec le soleil de l’espoir. Cette entreprise d’épuration demande et nécessite la mobilisation des forces positives à l’échelle d’une ou de deux générations. Et je peux dire : dixi et salvavi animam meam.
Dr Ibou Dramé SYLLA
Philosophe, responsable des FDS à Sédhiou
E-mail : xadkor@gmail.com