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Liaisons Dangereuses, Walk On The Wild Side

Liaisons Dangereuses, Walk On The Wild Side

La puissance de l’Etat, les pouvoirs de la politique, ceux de l’argent et de la Force peuvent être tentés à s’opposer à celui de la presse avec des fortunes diverses selon les époques et les contextes. Pour autant, le seul pouvoir qui s’impose toujours à celui de la presse est celui de l’actualité. Celui-ci devient une dictature impitoyable dès que l’opinion publique s’en empare et opère ses choix.

La presse, à l’instar des arts populaires comme la musique, le cinéma, la danse ou la mode vestimentaire, est l’esclave des goûts du public. Qui plus est au moment où la démocratie n’est plus sous la férule des valeurs idéologiques et des principes doctrinaires pour n’être que sous la coupe de l’émotion et des sentiments. Forcément subjectifs.

Ainsi, l’actualité récente dans notre pays ne semble faire place qu’aux dénonciations et aux procès d’intention avec évocation de problèmes de mœurs, de santé et de la vie privée des célébrités. Des terrains glissants où le dérapage est plus fréquent que la retenue et le bon sens.

Ici ou là, l’on porte des imputations ou des allégations pouvant éclabousser l’honneur et la vertu d’une personnalité connue sans pour autant en rapporter la preuve la plus évidente ou le moindre élément ou un faisceau d’éclairage pouvant corroborer les horreurs déversés sur sa personne.

La séparation des faits peut être ténue entre une dénonciation, une invective, une affirmation gratuite et une information exacte, bien vérifiée, évitant l’approximation et la manipulation. Sur ce registre, l’invasion des réseaux sociaux, leur fulgurance et la pénétration sociale en ont fait un champ de bataille où l’excès, l’exagération et l’approximation peuvent détruire des vies entières.

Le travail du professionnel de l’information réside, donc, dans sa capacité à faire le tri entre la bonne graine et l’ivraie. Un fait incriminé ne devient une info à diffuser qu’après qu’on eut procédé à des vérifications sur leur accomplissement, procédé à l’interrogation des parties en cause sans omettre des sources neutres.

L’on dit souvent que l’on ne peut nier une évidence. Certes, cela est exact. Tout de même un fait s’étant déroulé sur la place publique ou une rixe dans une enceinte privée, n’ôte pas l’obligation de se soumettre à la recherche de témoins oculaires, de s’assurer que la police, la gendarmerie ainsi que les pompiers, le corps médical ont été informés ou ont été saisis par une des parties en présence ou en cause.

Il est, donc, normal que quelqu’un, femme ou homme, s’estimant victime de viol ou d’agression, adresse une plainte à la Justice ou à ses auxiliaires. Tout comme n’importe quel travailleur dans une auberge ou motel, un hôtel ou concierge d’appartement meublé peut invoquer devant son entourage une scène de ménage houleuse s’étant déroulée sous ses yeux entre conjoints, où l’un deux a surpris l’autre dans une relation adultérine. Tant que l’instruction est ouverte et en cours, si la presse bénéficie d’une piste et tient un scoop et qu’elle relate les faits, elle est tenue de se conformer au respect de la vie privée des acteurs en question, en leur garantissant l’anonymat jusqu’à ce que la Justice tranche le différend.

Il nous faut donc en convenir, il y a, présentement, dans notre pays, une marche collective sur un terrain glissant. Celui du mauvais côté. L’alternance de l’an 2000 en faveur du Sopi a hissé tout le pays sur une nouvelle rampe et avec le temps, les postures se sont crispées et maintenant les positions paraissent inconciliables. Si d’aucuns prônent un changement radical avec «tabula rasa», d’autres, eux, préconisent une évolution par des réformes bien menées, garantie d’une stabilité et d’une cohésion sociale.

L’alternance de 2012, ayant conduit à une passation du pouvoir entre les anciennes générations et la génération nouvelle post-indépendance, avait laissé entrevoir un changement dans la stabilité. Le pays laisse, à nouveau, apparaître des clignotants pour une nouvelle étape avec la montée en première ligne des tenants des discours les plus radicaux, quelquefois même à la limite de l’extrémisme insurrectionnel. Notre responsabilité individuelle et collective ne peut être, donc, que de savoir bien décoder les indicateurs qui nous sont envoyés. «Si l’Etat est fort, il nous écrase, s’il est faible, nous périssons», a déjà dit le penseur Paul Valéry.

Néanmoins, tout espace social organisé et structuré a besoin d’un Etat lui garantissant la liberté, la sécurité sous toutes ses formes. Un pays régenté par des bandes armées ou des extrémistes devient un espace où la loi du plus fort est la meilleure.

L’heure des choix est-elle arrivée, car nous sommes à un tournant avec une jeunesse qui piaffe et qui réclame une rupture des amarres… !

Nous n’avons pas attendu le Président Barack Obama pour comprendre que des Institutions fortes sont le socle et la pertinence d’un système démocratique. En moins de quinze ans (2000-2012), les populations sénégalaises ont congédié par les urnes deux Présidents en exercice (Diouf et Wade). Durant cette même unité de temps (2009-2014), la mairie de la capitale a échappé au candidat désigné par la majorité présidentielle (Karim Wade en 2009 et Aminata Touré en 2014). Lors de la dernière élection présidentielle, celle de février 2019, si le vainqueur, Macky Sall, a obtenu un peu plus de 58% des voix au premier tour, 42% des votants lui ont refusé leur adhésion. Il faut y ajouter que sur plus de six millions d’inscrits sur les listes électorales, plus de quatre millions ont régulièrement participé à ce scrutin. Ajoutons à cela le parrainage, qui n’a qualifié que six candidatures au final sur près de vingt prétendants. Nul ne saurait nier l’influence du parrainage sur le déroulement de la campagne, ainsi que son impact sur le vote. Tout ceci ne montre qu’une constance : si nous avons bel et bien des Institutions et un système électoral fiable, c’est peut-être au niveau de notre intelligentsia et du personnel politique que le bât blesse.

Si l’ancien Président des Etats-Unis, Donald Trump, pour ne pas le nommer, dans sa fuite éperdue et sa folie des grandeurs n’a pu entraîner ni la technostructure de l’Administration américaine ni la nomenclature de son parti républicain, c’est bien parce que la raison a prévalu sur la passion, et l’intérêt du pays a motivé les prises de position post-électorales.

Il est désolant de constater que chez nous, la législature présente à l’Assemblée nationale et la chambre du Hcct ne se distinguent par leur apport à la vitalité démocratique et ne participent presque pas activement au dialogue des Institutions.

Les députés regimbent à exercer leur pouvoir de contrôle sur l’Exécutif dans des dossiers comme celui du Covid-19, malgré les interpellations de l’opinion publique sur l’exécution du programme «Force Covid-19», défini par le chef de l’Etat. Aucune commission parlementaire n’est constituée pour le contrôle des opérations de sécurisation militaire dans le Sud du pays, le déboisement des forêts, l’incendie du puits de gaz à Gadiaga, le contrôle de la campagne agricole, etc. Les députés ne trouvent le temps de se réunir que pour des dossiers à fort connotation politique.

La chambre la mieux outillée en termes d’apports concrets et utiles, avec des propositions pertinentes, aurait pu être le Cese du fait de sa composition. Les perspectives que son ex-dirigeante Aminata Touré y a ouvertes laissent entrevoir de belles promesses en ce sens.

Le gouvernement que le président de la République a rajeuni et diversifié à doses homéopathiques depuis avril 2019 s’offre comme le cadre le plus déterminant et peut-être le seul, d’ailleurs, dans l’animation de la vie publique. Ce qui est, certes, une bonne chose mais n’est pas pour autant suffisant car représentant une trop grande concentration de pouvoir.

Un gouvernement qui affiche, néanmoins, de beaux résultats et de brillants succès à son actif. Le lancement de la campagne de vaccination contre le Covid-19 vient d’être donné, avec un premier lot de vaccins en provenance de la Chine en attendant la réception de ceux en provenance de l’Oms grâce à l’initiative Covax. Sur la cinquantaine de pays, membres de l’Union africaine, le Sénégal fait partie du lot des six premiers pays où la vaccination a débuté. Ce qui, en plus d’être une prouesse, atteste surtout du réalisme et de la pertinence des autorités de l’Etat.

De même, l’Armée nationale vient de parachever le rétablissement de l’autorité de l’Etat dans une partie du Sud du pays considérée comme un territoire perdu de la République depuis le début des années 1980. Après près de 40 ans de désertion et d’exil intérieur, les populations de ces zones, qui les avaient désertées depuis lors, ont pu reprendre leur terre.

Le Fonds Covid-19 que le Président Macky Sall a doté d’un budget de 1000 milliards de francs Cfa, a apporté assistance et secours aux populations et aux entreprises pour faire face aux ravages de la pandémie du coronavirus.

Le ministère de la Santé publique a vu ses moyens renfloués et renforcés pour faire face aux nombreux périls sanitaires qui menacent à nos frontières. Le ministère de l’Education nationale, malgré l’épidémie, a sauvé deux années scolaires, évitant ainsi, une double peine à la jeunesse du pays.

Au-delà du bruit et de la fureur, force est de reconnaître que l’Exécutif se montre à la hauteur de la situation et des enjeux. Tout comme une démocratie a besoin d’une opposition forte mais crédible, les Institutions, elles aussi, ne peuvent se résumer à un seul Exécutif fort face à des Assemblées évanescentes.

Il nous faut remettre le pays au centre de nos préoccupations. Mettre au premier plan ses urgences, les préoccupations des masses laborieuses, les interpellations du contexte planétaire actuel avec les périls sanitaires et la crise économique. Des consensus doivent s’opérer entre tous les enfants du pays comme cela vient d’être réussi au Burkina Faso après la Présidentielle, pour faire face à un présent lourd de menaces et de dangers afin de construire un futur pour les générations à venir. Notre responsabilité, aujourd’hui, est celle d’avoir de l’orgueil pour notre pays afin d’être à la hauteur des enjeux ainsi qu’une ambition pour triompher des situations. Pas celle de faire prévaloir nos intérêts personnels sur le destin du pays. Le récit national ouvre de nouvelles pages à remplir sur lesquelles les postures devraient prévaloir sur les impostures car le marbre de l’histoire rend indélébiles les faits et gestes de tout acteur actif ou passif.

Il nous faut oser nous émanciper des idées reçues, des prismes et des clichés de l’ancien monde. Un nouvel ordre mondial sort des limbes. Un monde nouveau qui pourrait être impitoyable pour les Nations sans ambition et sans audace. Ainsi, tout pays frileux ou timoré pourrait se retrouver dans une position de pays de seconde zone et tomber dans les catacombes pour les siècles à venir. Sous le magistère de Abdou Diouf, il avait été évoqué une mystique du sursaut national. Ne devrait-on pas adapter cela aux exigences de notre contexte actuel afin de fédérer toutes les forces vives de la Nation.

Sur toute la planète, la priorité est étalonnée sur la compétence et la technostructure. Pour exemple, l’Italie vient de remettre les commandes de son exécutif à Mario Draghi, ancien président de la Bce. En Allemagne, l’alliance gouvernementale est formée par une coalition de la Droite et du Centre gauche. Le Covid-19, la montée en puissance de la Chine, le déclin de l’hégémonie occidentale et le réveil d’un monde multipolaire, obligent à davantage de pragmatisme et de réalisme.

Il n’est, donc, pas loin de minuit pour nous.

C’est le moment qui exige que le bateau soit drivé par un capitaine aguerri et expérimenté. Quelqu’un qui sache indiquer le cap et nous mener à bon port. En ce sens, ce n’est pas seulement que le Président Macky Sall me rassure, il est l’homme de la situation. Et le retour des investissements opéré en lui depuis l’an 2000 arrive au bon moment. Avec le temps et l’expérience, l’homme s’est bonifié en une décennie au point d’être devenu un dirigeant incontournable sur la scène continentale et mondiale.

Un leadership reconnu sur plan international par son implication dans tous les grands dossiers de l’Union Africaine, de l’Oci, de l’Espace francophone et des Nations unies et qui a fini de faire de lui une des figures emblématiques dans le cercle des jeunes nouveaux dirigeants de l’Afrique.

Le péril sanitaire cache un désastre économique en plus d’une destruction sociale. Ce n’est pas la force qui fait l’union mais plutôt la Force, c’est l’union. Le cinéaste français, Jean Renoir, dit que chacun a ses vérités. Pour autant, le penseur et homme politique chilien, Pablo Neruda, enseigne que si l’amour est court, l’oubli, lui est long.

Le pays n’a pas besoin de pyromane et la rivalité politicienne ne devrait revêtir que des oripeaux d’une compétition où les idées et les propositions tiennent le haut du pavé.

Abdoulaye Bamba DIALLO

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