Une grande première au Sénégal :102 universitaires, non préoccupés par les prébendes, font la radioscopie du régime en place, et expriment leur indignation face au recul démocratique. J’aime bien cette conception prométhéenne de l’universitaire, qui se déchaîne contre les abus d’un pouvoir, dont le projet satanique est de faire perdurer l’arbitraire. Universitaires de tout le pays , restez debout et jouez une part de votre fonction tribunitienne ! Ne laissez point des assoiffés de pouvoir plonger le pays dans une situation chaotique .Armez-vous de votre savoir , de vos écrits et de vos pensées .Avec vos pensées , cherchez à panser les plaies béantes et purulentes provoquées par le règne de l’impunité, de la prévarication et de l’insolence .Étant partie intégrante de la société qui risque de se fissurer à cause du refus d’organiser l’Etat de droit , vous avez la responsabilité historique de dire non, loin des lambris dorés du pouvoir . L’intellectuel , pour faire montre de son engagement , n’a point besoin de pactiser avec le pouvoir .Comme le font certains qui prostituent l’inestimable savoir, et désacralisent la mission salvatrice de l’universitaire , en donnant raison à celui qui parlait de « la trahison des clercs » pour dénoncer l’attitude de spectateurs adoptés par les intellectuels véreux.
Ce manifeste conçu dans un contexte marqué par de réelles menaces sur l’Etat de droit, et des violations aux droits de l’homme , fera date dans l’histoire politique du Sénégal .En effet , il consacre la volonté de s’affranchir des biens matériels , mais aussi l’indépendance de la raison chez nos universitaires .Le moment est venu de choisir entre le camp de la liberté et celui de l’esclavage. Ce que les professeurs ont compris . Entre autres entraves à la démocratie et à la liberté , les universitaires ont relevé « la domestication de la justice « , malgré le professionnalisme et la pertinence de nos juges, mais aussi ils ont déploré « une gouvernance politique oublieuse de l’Etat de droit » , et évoqué la nécessité d’intégrer nos valeurs ancestrales dans l’élaboration de nos modèles de gouvernance. Abordant cet aspect important de la problématique de la conduite politique , nos universitaires ont cité l’article 23 de la Charte du Mandé.
Leur action serait plus conséquente, s’ils faisaient des séries de conférences dans toutes les villes du pays , afin d’informer sur l’état de déliquescence de nos institutions . De ces conférences naîtra un vaste mouvement de réhabilitation de la démocratie , un mouvement populaire qui cristallisera tous les mécontentements , et ira pacifiquement à l’assaut du pouvoir liberticide et cruel. Nos universitaires, dans une implacable croisade contre l’Etat de non droit et l’arbitraire , viennent de jouer la partition qui est la leur. Car, lorsque la patrie est sur le point de brûler , seuls les lâches prennent la fuite , et se taisent .En montrant le chemin qui mène à une société stable et vivable , nos universitaires ont compris comme François Ier que « la première des vertus est le dévouement à la patrie ». Puisse alors la patrie, qui a toujours su brandir le flambeau de la lutte , chaque fois que les libertés sont menacées , vous entende et vous suive !
Félix MBOUP Professeur au lycée Talibou Dabo