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Le Sahel Sans Deby: Quels Lendemains Pour L’hexagone ? (mamour Ba)

Folie des grandeurs, monstruosité, la plupart des grands tyrans de l’histoire africaine furent des personnages extravagants, dont l’évocation suscite la peur. Certains ont eu à leur tableau de chasse 40.000 morts avant d’aller croupir en prison. D’autres se sont accroché le grade d’Empereur ou de Maréchal. Il y a vraiment sur cette terre des hommes qui pensaient être devenus immortels. Le pouvoir parfois les rend fous. 

 Assassiné pour certains, tué au front pour d’autres ou exilé sous une nouvelle identité dans une autre planète, le Maréchal Déby qui est pourtant au centre de toutes les commentaires, cesse définitivement de compter parmi nous. Sa mort me fait de la peine et ne cesse de me faire croire à la thèse de l’assassinat, même si elle n’a choqué personne sur ce continent ou ailleurs dans le monde. Un coup de trop qui n’est rien, comparé aux milliers de morts, civils et militaires, emportant dans leur tombe cette question sans réponse : 

Pour quelles causes sont-ils véritablement morts sur cette bande sahélo-saharienne ? 

Devenu un pôle d’attraction pour les Chinois et les Russes, la France adopte une nouvelle posture de fermeté pour éviter toute influence extérieure sur les chefs d’Etats du G5 Sahel en général et sur le Tchad en particulier. Qui paie commande.. 

Est-il besoin de rappeler que le G5S est un cadre institutionnel de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité, regroupant la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad répartis sur plus de 5 0000.000 km2

Sur ce vaste territoire qui compte près de 100 millions d’habitants, la France se montre incapable d’arrêter la progression de la menace terroriste et du crime organisé ; le changement climatique  et l’expansion démographique.

Autant de facteurs qui continuent de fragiliser notre région.

Pourtant, l’hexagone a maintenu au Tchad ses coopérations militaires de façon quasiment ininterrompue depuis la période des indépendances. Ce qui lui a permis de bâtir de solides relations avec la junte militaire au pouvoir, de s’y implanter et d’y imposer au fil des années, malgré certaines réticences locales,  ses bases et ses règles. 

On note la présence de plus en plus accentuée de la DGSE et du renseignement militaire qui s’est structuré et optimisé, pour développer de nouvelles conditions favorables aux intérêts de France. Même si les services secrets français sont peu étudiés au Sénégal, ils sont d’une importance capitane pourtant quand on veut comprendre les nombreux enjeux sécuritaires actuels dans la sous-région. Certains témoignages de mes « cibles » de la DGSE rencontrés au Soudan dans les années 2006, officient encore dans le Sahel et se font passer la plupart du temps pour des journalistes, membres des organisations humanitaires, médecins sans frontières ou touristes. Ils peuvent s’avérer utiles et dangereux à la fois pour leur cause légal et illégal à la fois. 

L’homme fort de Djaména se trouvait au cœur de ce carrefour stratégique. Il connaissait les secrets les plus gardés de la France dans ses activités cachées dans la zone des trois frontières (Mali-Niger-Burkina Faso) devenue la priorité de l’opération «Barkhane». L’homme était conscient de son rôle clef dans le sahel. Le Maréchal savait aussi que l’opération Barkhane est une opération militaire qui sert plusieurs objectifs à court, moyen et long termeQue l’objectif initial de cette opération, est l’élimination des groupes djihadistes, mais qu’au de-là de ses visées purement sécuritaires, l’objectif à moyen terme, c’est de recréer de l’Etat dans la zone, capable de préserver ses intérêts et permettre que les liens économiques fonctionneront mieux. Des Etats en situation de paix pourront alors prospérer, servir de champ économique ouvert au profit de la France.

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Il savait qu’on savait qu’il en savait trop.  

Conforté dans sa réélection pour un nouveau mandat, Idriss avait toutes les raisons de penser qu’il devait prendre plus de hauteur pour mieux s’imposer, en s’élevant au grade de Maréchal, la plus haute dignité dans la hiérarchie militaire. Ce qui à mon avis, n’est pas vide de sens quand on sait que ses relations avec Emma pouvaient être heurtées de temps à autres, malgré les apparences. 

Autant d’éléments qui en en disent long sur la mort d’Idriss BEBY dans ses choix guerriers, visant à son redimensionner son leadership et rayonnement dans la sous-région en volant rompre le dictat français dans le dossier sahélien où il doit se tenir en véritable chef de guerre. Avec seulement 4 500 soldats sur un terrain aussi vaste que l’Europe, ce n’est pas possible de commencer à protéger des implantations industrielles, des hôtels ou des plantations dans lesquels se trouveraient des Français. Car, en réalité, il s’agit, d’un point de vue plus profond, d’une affaire de gros sous.  

Mais ce duel secret au sommet vient de tourner court, à l’avantage de la France, cette puissance au 5 ème rang mondial, sait se débarrasser ses adversaires trop gênants, sans laisser de traces. 

A ceux qui soutiendraient le contraire, je dirai que l’Afrique est devenue ce nouveau continent sur lequel les grandes puissances se bousculent pour avoir une influence politique et économique. Qu’est-ce qui se cache derrière ce regain d’intérêt pour notre continent ? Dans les rues de Dakar et autres capitales on chante « France Dégage » Au Japon, en Russie et en Chine  nos présidents sont accueillis avec beaucoup d’égards, au rythme des accords de partenariats se multipliant sans cesse. 

Un coup dur pour la France qui tente de maintenir à tout prix son influence dans ses anciennes colonies.

Aux Morts ! Le dernier clairon a retentit pour enterrer le Maréchal. Les pistes suffisamment brouillées pour semer le doute, exactement comme dans les crimes organisés, où tout s’entremêle avec plusieurs versions des faits thèses dans lesquelles on se perd. Puis l’oubli.  

Pourquoi l’hexagone est vite monté au créneau pour clamer haut son innocence devant l’opinion internationale ? Sa mort, bien que revendiquée, ne sera jamais élucidée. La France n’a pas d’ami, elle n’a que des intérêts disait le Général De Gaulle, qui a omis de prendre le grade de Maréchal.

Déclarant que la France a pris acte de  l’annonce faite par les autorités de la mise en place d’un conseil militaire de transition  et qu’elle s’attache fermement à la stabilité et à l’intégrité territoriale du Tchad, Emma réaffirme son attachement, mais surtout son autorité sur ce territoire qu’il contrôle parfaitement, seul, en maître. 

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Si l’insécurité  persiste encore au Sahel, c’est lié à l’instabilité qui règne en Libye, provoquée par l’intervention de cette même France dans ce pays en 2011. Ce qui, à mon avis,  contribue à décrédibiliser la présence française au Sahel. 

Neuf ans après cette intervention catastrophique, ce beau pays est dans un chaos total. Emma renforce sa présence militaire au Sahel pour être encore une fois proche de cette Libye de Kadhafi, possédant les plus belles réserves de pétrole en Afrique et dans le monde avec 41,5 milliards de barils. 

Ce qui dévoile tout l’intérêt de la France dans ce grenier du désert  sensible, attractive, qui miroite autant d’actifs:

La présence française au Mali se maintiendra avec ou sans Déby. L’approvisionnement des centrales françaises en uranium en dépend. Je vous le jure: cette chose radioactive (52.000 CFA) le kilo est extraite des mines du nord du Niger (l’un des pays les plus pauvres d’Afrique, assis sur une manne financière), zone de non droit, désertique, séparée du Mali par une ligne.

En aidant les troupes d’Idriss DEBY dans la région, Emma vise à protéger les INTERETS économiques de nombreuses entreprises françaises implantées au Sahel tel que le groupe Orano (anciennement Areva) qui est une multinationale française spécialisée dans les métiers du combustible nucléaire, de l’amont à l’aval du cycle)  présent au Niger depuis un demi-siècle pour exploiter l’uranium et les sites miniers du pays ou  BNP Paribas présent au Mali depuis longtemps.

C’est une question de vie ou de mort. Le Maréchal le savait. Il serait peut-être utopique de penser qu’il en est mort.

Mais la France aura-t-elle le courage d’avouer ses véritables intentions au Sahel avant de condamner l’action d’autres puissances dans le monde ? Car on sait qu’Aréva c’est un géant français au cœur de corruptions internationales, de scandales financiers et a connu des fiascos quelques parts dans le monde. Des catastrophes nucléaires 

Le groupe Orano (ex-Cogema puis Areva), est présent depuis un demi-siècle au Niger, tout en étant le quatrième producteur mondial d’uranium. Le groupe y exploite deux mines dans le Nord-Ouest du pays, près d’Arlit : la première à ciel ouvert, la seconde souterraine. Le géant français possède également des mines au Canada et au Kazakhstan, mais le minerai nigérien représente un tiers de sa production totale.

 Cette autre raison, pas celle des moindres, qui explique la présence française au Sahel est d’ordre sécuritaire. Dans sa recherche de moyens de défendre ses intérêts face à de nouveaux concurrents tels que la Chine, le Canada ou les pays du Golfe qui investissent gros pour exploiter les ressources sahéliennes, la France sait qu’elle doit changer de stratégie. 

Bien évidemment, le Tchad reste le fer de lance dans cette guerre secrète que mène officiellement la France contre les groupes armés terroristes dans le cadre de l’opération Barkhane. Cette force qui dispose d’une base pour ses avions de chasses et ses drones, servantt de point d’appui permanent à Niamey, la capitale du Niger, à 1 200 km environ au sud-ouest d’Arlit ;  ne pourrait jamais se passer de l’Armée Tchadienne. Cà aussi le Maréchal le savait. 

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N’oublions pas que le Tchad sert lui aussi de laboratoire pour le renseignement militaire français qui a son quartier général de Djaména. En lui fournissant tous les renseignements qu’il faut, du carburant, de matériel militaire et médical pour contrer la rébellion, au nord, comment se fait-il qu’aucune réaction militaire de la base française n’eut été observée, aucune arme intelligente telle que les drones ne soit déployée pour sauver Déby de cette énième attaque rebelle qui lui a été fatale ? 

Et pourtant, la DGSE savait tout des rebelles du FACT depuis leur départ de Lybie, pendant leur progression vers le Tchad, leur capacité de feu, leur nombre et tout. Mais rien n’a filtré…..

Le marché des « grandes oreilles » est en pleine expansion. Chefs d’État, opposants, hommes d’affaires, personne ne peut s’en prémunir.

Devenu trop sûr de lui, rendu plus puissant par son grade de Maréchal, conforté par sa nouvelle réélection à la tête de son pays, Déby se croyait incontournable pour son rôle  clef  au Mali. Dans un passé récent, les rapports de forces auraient été trop tendus les deux amis. Idriss aurait menacé de se retirer du Sahel.

Comment allait-on faire sur le terrain si Idriss mettait à exécution ses menaces de retirer ses troupes du G5 Sahel ? 

Pour éviter tout risque, la France aurait laissé faire les rebelles du FACT, qu’elle aurait pût neutraliser dès leur départ de Lybie, ou au cours de leur offensive, comme ce fut le cas, plusieurs fois dans le passé, pour sauver Déby des assauts rebelles. 

La France veut une transition dans un esprit de dialogue avec tous les acteurs politiques et de la société civile. Ce qui prendra le temps qu’il faudra, mais en attendant, les militaires restent au pouvoir.

Pour l’instant, aucun dialogue n’est possible. L’opposition maintien la pression sur le nouveau pouvoir qui durcit le ton en réprimant sévèrement les manifestations qui leur sont hostiles. 

Voilà pourquoi cette guerre au Mali va encore durer. Car, l’implantation des bases militaires françaises qui, sous le couvert d’accords de défense bidons, ne servent qu’à permettre d’entraîner des terroristes, de piller nos ressources, d’entretenir des rébellions, de maintenir des dictateurs civils ou militaires soumis; à la tête de nos États si fragiles.

Le risque d’extension est certes bien réel, mais il est plutôt porté vers le Togo, le Bénin et le Sénégal pour des raisons évidentes, que je me réserve le droit de développer ultérieurement.

Du Déby sans Déby, peu importe, le Sahel connaitra des lendemains meilleurs. Car la France ne lâchera jamais le morceau. Le blanc a un sacré caractère de gagneur. Il n’abandonnera jamais, jamais. 

Et gare à ceux qui tenteront de lui barrer la route du désert.

Le débat sur l’entrée du Sénégal dans le G5 Sahel s’impose de plus en plus, désormais.

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