#SilenceDuTemps – Eh oui, la rentrée c’est toujours un grand jour. Certaines personnes détestent parce que n’ayant pas profité comme il faut du temps de break, ou tout simplement parce qu’elles n’aiment pas ce qu’elles font (travail/école …), et pour lesquels la reprise est douloureuse.
Et ceux qui se réjouissent de retrouver copains-copines, partager les diapos des vacances et tutti quanti… Moi si j’ai détesté presque toutes les rentrées d’école de mon enfance/adolescence, je suis heureuse de rentrer aujourd’hui !
Rentrée certes bien particulière parce que je vais continuer ce que j’ai fait, contrainte pendant ce mois de congés et que j’aime bien. Je n’arrive pas à m’ennuyer en temps normal, alors en ce moment encore non plus, et cela surprend certaines personnes avec qui j’échange sur le temps qui passe et comment faire passer le temps. J’ai commencé à prendre les photos qui pourraient illustrer les chroniques et donc je vais chercher au fond de ma mémoire ce que je devrais photographier : le savon-brique qui fait peur à Viou, la vue de la douche sur la terrasse chère à Mamina, le fauteuil éthiopien, celui-là, je dois toujours lui trouver une meilleure place … Faut-il que je fasse l’effort de relire ces quelque 15 000 mots déjà rédigés ? J’appréhende j’avoue, par peur d’être déçue malgré les encouragements des amis/famille.
Hier soir je reçois un appel de numéro inconnu me demandant si je m’appelle Anne-Marie-Thérèse (je ne permets à personne de se moquer) et si j’ai perdu ma carte d’identité ? Et de lui prouver que c’est bien moi ! Je lui demande si je peux venir la chercher. Il est policier au ministère de l’Intérieur, me donne son nom, et me dit qu’il m’appellera la semaine prochaine parce qu’il n’est pas à Dakar ? Je relève tout de même son numéro de téléphone et m’inquiète du fait qu’il ait mon numéro de téléphone. Est-ce un vrai « flic » ? un escroc ? Bref, je transmets le dossier à un « vrai flic » de mes connaissances, qui se chargera d’élucider. Quand je pense que j’attendais la période de dé-C pour aller faire une déclaration de perte. Cela dit, « wait’n see » !
J’ai fait mon petit tour dans ma rue pour aller acheter mes pains et vraiment un grand changement, presque tout le monde porte le masque. Quelques gardiens ou vendeurs avec le masque sous le menton et vraiment très peu sans masque. Le principe du masque à porter étant acquis il me semble, reste la façon de bien le porter qu’il est impératif d’intégrer, sinon…
Mon ami Charles de Dakar m’a envoyé via WhatsApp une très belle vidéo d’une jeune chanteuse capverdienne je pense, qui chante si bien et surtout semble faire un hommage à Cabral. Certes je ne parle pas portugais que je rêve de parler. Il y a 3 ans, lorsque je décidais de prendre ma retraite, je m’étais fixée pour l’année 2017 deux objectifs : danser la Salsa comme les jeunes différemment de la classique Pachanga de notre jeunesse – ça y est j’y suis arrivée et j’adore – ; et l’autre était de parler non pas chinois ou arabe comme il est conseillé pour la mémoire, mais portugais. Alors, sur les conseils de « Mallé le portugais », un ami, j’ai trouvé le prof’, reçu les conditions … Je n’ai jamais commencé un cours, honte à moi … Rien n’est perdu ! Mais revenons à Sara Tavares. J’ai envoyé et dédicacé sa vidéo à ma bande de « vadrouilleurs confinés ». Je savais que je ferai des heureux. Mamita s’est précipitée de télécharger tout son répertoire et je l’imagine, dansant, chantant sur ces airs-là je suppose, et papi Viou s’est précipité vers le Charles de Praia pour lui demander d’autres morceaux. Elle aura fait tilt dans nos têtes et comme le dit Viou, elle évoque une « tristesse resplendissante » !
Jour 32
« Mais de quelle rentrée parles-tu ainsi depuis deux jours ? », me demande Viou ! C’est vrai que je ne l’ai pas invité dans ma croisière … en solitaire, je ne l’ai même pas prévenu … J’ai pourtant tout fait pour que lui aussi soit dépaysé. Apparemment ça n’a pas marché, l’ingrat ! Tous les petits plats mijotés tous les soirs, ces histoires que je raconte, qui font sourire des fois …, ça ne ressemble pas à des vacances ? Devrais-je changer ?
Ce matin à la radio, un monsieur nous apprend que s’il n’y a pas de cas de C. à Kaolack ou ailleurs je ne sais plus, c’est grâce à Dieu et après seulement grâce aux hommes, les professionnels, les politiques qui ont pu barrer la route à C. ! Looool … Je n’ai pas entendu la réponse du journaliste mais je me suis entendu lui demander à cet illuminé-là : « quid des autres villes/pays concernés où le virus sévit, Dieu aurait-il des comptes à rendre ? « Économisons-Dieu », comme le dit un esprit bien éclairé et surtout en ces moments de crise.
J’ai eu un appel d’un ami ce matin me disant qu’il ne se sentait pas très bien ; migraines, courbatures et j’avoue avoir un peu paniquée en pensant au pire. Heureusement rassurée après un échange avec le pharmacien, sur le traitement donné à l’hôpital mais surtout sur le fait qu’aujourd’hui s’il y avait quoique ce soit d’anormal on ne l’aurait pas laissé rentrer chez lui.
Depuis une semaine Pièce unique qui vient déjeuner tous les jours à la maison, réclame un « tiep’u yapp ou djeun », bien entendu personne ne lui prête attention !
Ce matin, en faisant le tour du frigo, j’ai trouvé une moitié de poulet, tentée de faire un plat pour le dîner en tête-à-tête, puis je me suis souvenue des exigences du fiston. Et de me lancer dans une opération «tiep ‘U gannar». Très honnêtement, je n’ai pas cuisiné de riz depuis au moins 20 ans. Je pense néanmoins avoir quelques acquis.
Pièce unique arrive, je suis fière de lui dire ce que j’ai préparé. En commençant à manger : « hum ça ressemble à un riz de toubab, et pas vraiment à un plat d’Odile … » Ça commence mal ! C’est vrai que j’ai fait comme Mamina m’a appris : pas de concentré de tomates, que des tomates fraîches, beaucoup de légumes y compris patates douces à chair orangée comme conseillé par la mère Tiatiaka (j’y ai mis tout ce que j’ai trouvé comme légumes dans le frigo !) et surtout très peu d’huile. Mais j’ai fait mijoter tout cela avec beaucoup d’amour, sûre de mon fait. Et finalement, au fur et à mesure de ses bouchées avalées goulûment, je l’entends dire : « ah mais il est bon ton tiep » qu’il m’a répété deux fois et je pense sans complaisance.
Annie Jouga est architecte, élue à l’île de Gorée et à la ville de Dakar, administrateur et enseignante au collège universitaire d’architecture de Dakar. Annie Jouga a créé en 2008 avec deux collègues architectes, le collège universitaire d’Architecture de Dakar dont elle est administratrice.
collège universitaire d’Architecture de Dakar dont elle est administratrice.
Épisode 1 : AINSI COMMENÇAIENT LES PREMIERS JOURS CORONÉS
Épisode 2 : AVEC LA BÉNÉDICTION DE FRANÇOIS, LE PAPE LE PLUS AVANT-GARDISTE
Épisode 3 : SOCIALISER EN TEMPS DE COVID
Épisode 4 : PREMIÈRE SORTIE EN PLEIN COVID
Épisode 5 : SOUVENIRS DES INDÉPENDANCES
Épisode 6 : LES CONSÉQUENCES INATTENDUES DU COVID
Épisode 8 : POUR UN VRAI PROJET D’ÉCOLE
Épisode 10 : DEVOIR DE TRANSPARENCE