Quel est le dénominateur commun entre la Grande Bretagne (la mère des démocraties modernes) et le Japon (le pays des Shoguns et des Samouraïs, devenu la plus vieille démocratie d’Asie ? Naturellement, vous allez me dire instinctivement qu’à la tête de ces pays règnent deux monarchies qui font partie des plus anciennes du monde, sinon les plus anciennes à côté de celle du Maroc. La Grande Bretagne et le Japon ont en commun d’être de grandes monarchies, mais aussi de vieilles démocraties, mais il y a mieux. Ces deux pays ont en commun d’avoir toujours su allier des institutions archaïques et une grande efficacité économique.
La France a fait une grande révolution en 1789, que Hegel qualifia de «superbe lever de soleil», pour révolutionner son art de gouverner, mais c’est de l’autre côté de la manche, en Grande Bretagne, avec ses vieilles institutions, qu’eut lieu la révolution industrielle qui changea le monde et l’économie mondiale. Lors de la dernière Présidentielle aux Etats-Unis (le pays de Google, de Facebook et Twitter), Us Postal (la poste américaine) a été au centre des débats parce que cette poste a eu à jouer un rôle crucial à la naissance de la démocratie américaine. Elle continue à jouer un rôle parce les Etats-Unis, comme le Japon et l’Angleterre, fonctionnent avec des très vieilles institutions, qui n’ont pas beaucoup changé depuis le 18ème siècle.
Ces vieilles institutions, créées par les pères fondateurs, ont fait émerger les Etats Unis et en ont fait une puissance mondiale et une hyperpuissance. Comme on le voit avec ces exemples, l’efficacité économique n’a rien à voir avec des institutions parfaites comme on le pense au Sénégal, qui est en quête d’institutions parfaites. D’où la propension de notre classe politique à créer de nouvelles institutions et à discuter du sexe des anges des réformes institutionnelles à la veille ou après chaque élection. Ce débat permanent et infini sur les réformes institutionnelles nous fait perdre depuis des décennies notre avantage absolu, à savoir notre stabilité politique.
Le Fmi annonce que pour 2022, 3 pays auront une croissance à deux chiffres : le Mozambique, le Niger et le Sénégal. Contrairement au Sénégal, le Mozambique (guerre civile puis guerre contre le jihadisme) et le Niger (jihadisme et coup d’Etat) sont confrontés à l’instabilité politique. Les Sénégalais qui se sont rendus massivement à l’exposition universelle de Dubaï, qu’ils ont transformée en «grand bal de Bercy économique» pour parler comme le doyen et confrère Mamadou Oumar Ndiaye, ne se rendent pas compte que si leur pays n’est pas comme Dubaï (ancien port de pêche de perles), c’est à cause des pertes de croissance. Et la plus grande perte de croissance dans notre cher pays, est due au fait que la presque totalité du cerveau de notre brillante classe politique est piratée par la question électorale.
Dans notre pays, tout le débat politique se limite à la question électorale. Nous sommes à moins de 100 jours des Locales, qui connait par exemple les propositions des candidats pour la capitale, qui aurait dû être l’une des plus belles villes du monde si on respectait les règles les plus élémentaires en termes d’urbanité ? Le débat se résume aux investitures de Yewwi et de Bby, en attendant les attaques personnelles pendant la campagne.
A mon avis, on devrait juger nos hommes politiques sur leur capacité à faire des propositions sur la manière de transformer l’exception démocratique en exception économique, c’est-à-dire comment avoir cette croissance à deux chiffres sur une longue période, ou comment transformer Dakar en Dubaï avec l’avantage climatique pour Dakar, qui perd au change avec son chaos organisé. Pour avoir mon vote, je demande au futur maire de Dakar, non pas la lune mais simplement des trottoirs. Dakar est la seule capitale au monde à ne pas avoir de trottoirs.