Le président Macky Sall a ainsi choisi Benoît Sambou, au détriment du maire sortant Abdoulaye Baldé, pour diriger la liste de la coalition Benno Book Yaakar à Ziguinchor. Un choix perçu par le maire sortant et désormais ex-membre de la coalition Benno Book Yaakar comme une trahison. Un « traitre » qui crie à la trahison…
La décision du président Sall de faire de M. Benoît Sambou la tête de liste de Benno Book Yaakar à Ziguinchor a mis dans tous ses états le maire sortant de la capitale de la région éponyme. « Je me sens trahi par le président de Benno qui, lorsque nous nous verrons, c’est lui qui baissera la tête parce qu’il n’a pas respecté sa parole », s’est lamenté le maire de Ziguinchor, mardi dernier, face à la presse. Mais, comme dit l’adage, chacun récolte ce qu’il a semé. Un adage qui s’applique parfaitement au maire de Ziguinchor au vu des actes qu’il a posés dans le passé. Avant d’être le maire de Ziguinchor, Abdoulaye Baldé s’était fait connaître aux Sénégalais comme un fidèle et fervent partisan de Karim Wade durant la toute-puissance du fils de l’ancien président Abdoulaye Wade. C’est à ce titre qu’il avait été nommé directeur exécutif de l’Agence nationale de l’Organisation de la Conférence Islamique (Anoci), conférence qui a coûté des milliards de francs au contribuable sénégalais dépensés dans des conditions de gestion opaques. A la chute du président Abdoulaye Wade, père de Karim, sans tarder, Abdoulaye Baldé a rompu les amarres avec Wade-fils tout en se démarquant du Parti démocratique sénégalais (PDS). Il va ainsi fonder le parti « Union centriste du Sénégal » en juillet 2012. Offusqué par l’acte de son ancien binôme, Karim Wade classa Abdoulaye Baldé, son poulain et homme de confiance d’antan, dans la catégorie des « traîtres » politiques.
Traqué par le procureur Alioune Ndao, Macky Sall le place sous son parapluie
Au plus fort de la traque des biens supposés mal acquis des hommes de l’ancien régime, Abdoulaye Baldé fut inscrit sur la liste des 25 personnalités poursuivies par la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI) pour s’en être mis plein les poches sous le régime libéral. Pendant que le procureur de cette Cour, le redoutable Alioune Ndao, lançait les limiers à ses trousses en vue de son arrestation, Abdoulaye Baldé avait disparu de la circulation. Il aurait d’ailleurs été caché par Macky Sall alors qu’il était recherché de partout par les gendarmes. L’actuel maire de Ziguinchor n’avait réapparut qu’après le limogeage-express de Alioune Ndao en pleine audience. L’on se rappelle que c’est alors que le procureur Ndao était en train de requérir dans une affaire, qu’on était lui chuchoter à l’oreille qu’il… n’était plus le procureur de la CREI. Pour comprendre l’affaire, il faut aussi savoir qu’Abdoulaye Baldé est l’époux de la fille de Macky Gassama, ancien maire de Fatick et homonyme du Gardien de la Constitution, Macky Sall. De fortes pressions familiales avaient été exercées pour sauver Abdoulaye Baldé d’un séjour à la citadelle du silence de Rebeuss. S’en suivirent de longues négociations politiques entre Macky Sall et son “beau-frère” Abdoulaye Baldé. Ce dernier s’était gardé d’informer ses partisans, notamment “ses” maires qui, de guerre lasse, avaient fini par rejoindre Macky Sall. Et le jour de l’investiture de Macky Sall par la Coalition Benno Bokk Yaakaar, Abdoulaye Baldé s’était présenté dans la salle du CICAD où se tenait l’événement, à la surprise générale. A la dernière minute, Baldé avait cédé aux desiderata — et pressions ! — de Macky. Il aurait ainsi négocié sans succès l’extinction de son dossier à la CREI. C’est ainsi qu’il avait pris la décision, la mort l’âme, de rejoindre le Macky. Là également, ses partisans avaient crié à la « trahison », tout comme l’opposition dont il se réclamait. Deuxième acte de « trahison » après celui dénoncé par Karim Wade.
Abdoulaye Baldé a tué par l’épée et aujourd’hui périt par l’épée…
Selon de nombreux observateurs, M. Baldé est à l’origine de l’ascension vertigineuse de Ousmane Sonko en Casamance car les populations auraient aussi sanctionné la tortuosité politique de M. Baldé. Le voilà aujourd’hui qui crie à la trahison de Macky Sall, lequel aussi soupçonne de son côté le maire sortant de Ziguinchor de vouloir lui faire un enfant dans le dos en engageant des négociations souterraines avec Ousmane Sonko. Comme dans un film western, Macky Sall aurait juste tiré le premier coup en Lucky Luck de la politique. Abdoulaye Baldé a tué par l’épée et, aujourd’hui, il périt par l’épée. Reste maintenant à savoir qui de lui ou Sonko sera dans le fauteuil de maire de Ziguinchor. Comme le dit l’adage wolof, le lézard veut exactement ce que le varan veut. On voit mal Ousmane Sonko renoncer si facilement à la mairie de Ziguinchor qui est à portée de main. Un Abdoulaye Baldé sans la machine Benno est plus affaibli que jamais surtout qu’il n’avait pas levé le petit doigt lorsque Sonko était aux portes de la prison dans l’affaire Adji Sarr. Et c’est connu que les Pastéfiens ne sont pas des enfants de chœur. Une troisième trahison en perspective ? L’avenir très proche nous édifiera.