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Crise Au Mali, L’orientation Controversee De La Cedeao Soutenue Par La Communaute Internationale Sert-elle L’afrique ?

Crise Au Mali, L’orientation Controversee De La Cedeao Soutenue Par La Communaute Internationale Sert-elle L’afrique ?

La crise au Mali a pris une nouvelle tournure. En rappel, le changement de régime opéré est parti d’un constat de chaos et d’inaction dans les domaines sécuritaire, économique, sanitaire, de bonne gouvernance, entre autres, qui a entraîné un chapelet de mobilisations du peuple malien derrière une personne au charisme incontestable et à l’intégrité prouvée – l’Imam Mahmoud Dicko. Il est qualifié « d’islamiste modéré,  moderne et éclairé» par beaucoup d’analystes qui ont loué ses qualités intellectuelles. Polyglotte arabe, anglais et français, il avait clairement affirmé son désintéressement au pouvoir, contrairement à ce laissait présager  son engagement au côté du peuple malien pour faire entendre son cri de cœur, dénonçant habilement la légitimé et l’incapacité d’IBK.

La CEDEAO, dans le cadre de sa mission sous régionale, a tenté de désamorcer la crise à travers ses médiations hélas infructueuses des 23 et 27 juillet 2020 conduites par Goodluck Jonathan ex président nigérian.

C’est dans ce contexte que la crise a évolué vers un putsch pacifique perpétré le 18 août 2020 par des militaires qui ont contraint IBK à la démission, faisant un bilan record de 0 mort et 0 blessé.

Pourtant, tout le monde voyait cette situation rampante. Malheureusement IBK n’a pas eu le génie d’écouter le cri du peuple qui l’a désavoué après l’avoir « réélu » à presque 70% en octobre 2018 !

Bizarre non ?

Le putsch au Mali traduisait-elle une victoire du peuple malien ou un désengagement de la puissance protectrice ?

D’aucuns ont voulu le caractériser comme une alternative facilitée pour éteindre la popularité d’Imam Dicko le temps de placer un autre délégué favorable à la puissance protectrice dont il faut continuer de couvrir l’inefficacité avérée.

D’autres ont pensé que c’était naturellement que l’armée a joué son rôle.

Habituellement, les organismes sous régionaux et internationaux condamnent toute accession au pouvoir par voie inconstitutionnelle.  En revanche, ils n’ont mis en place aucun moyen en cas de séries d’échecs dans la gouvernance ou les subterfuges de conversation indue du pouvoir. Analysées sous cet angle, la déclaration signée le surlendemain du Putsch – 20 Août 2020 – par Mahamadou Issoufou, Président de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO ajoutait de la perplexité à l’inquiétude pour un mali meurtri et une sous région menacée.

Globalement considéré, le plan 2020 de la CEDEAO servait-il les intérêts de l’Afrique ?

Réduire le contexte qui a prévalu au Mali, à des « troubles d’organisations religieuses  et de la société civile au malienne » était manifestement une erreur d’appréciation relevée dans la déclaration, cautionnée par un aval obtenu la veille (19/08) du CPS de l’UA et du CS des NU !

Ensuite, les 12 mesures qui ont été prises varient entre condamnation du putsch, dénégation d’une quelconque légitimité des putschistes, exigence de libération et de protection d’IBK et officiels arrêtés (compréhensible), rétablissement d’IBK dans sa fonction (irréaliste), suspension du Mali des organes décisionnels de la CEDEAO (préventif), fermetures des frontières (avec quelques exceptions sur des produits, obtenues par le Président Sall), sanctions envers les putschistes, leurs partenaires et leurs collaborateurs (habituel).

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En tout état de cause, il convient de noter la double dimension africaine et stratégique du traitement de la crise malienne dans un contexte de tous les dangers.

Quelle lecture pour l’Afrique ?

La plupart des dirigeants africains se forgent une légitimité en trompant le peuple. Très souvent, cela se passe devant l’impuissance ou avec la complicité de la communauté internationale qui, lors des élections supervisées, se satisfait de porter des réserves sur uniquement les faits majeurs et flagrants, tout en fermer les yeux sur la fraude juridiquement encadrée par une légalité illégitime. Cela passe souvent par la manipulation, la corruption camouflée des peuples affamés et illettrés, le brandissement de menaces pour baisser la participation dans certaines zones incertaines, l’annulation de bureaux de vote défavorables, les ordonnances, etc. C’est ainsi qu’on peut s’appuyer sur des instruments légaux pour s’asseoir illégitimement sur un fauteuil en paille dans une découverte pluvieuse. Et pourtant pendant ce temps, on percevait encore en Afrique des signes distinctifs comparables à ceux annonciateurs de la pathologie malienne. Les derniers en date sont les cas du Tchad et de la Guinée. Sans y revenir en détail, nous sommes en effet interpellés par les ruptures abusives de contrats sociaux avec les peuples. Qu’elles soient effectives, en cours ou en perspectives, elles sont de nature à écarter l’Afrique de sa voie vers la stabilité nécessaire à son union, unique gage de son développement.

C’est manquer d’humilité que de penser que personne parmi ses collaborateurs n’est en mesure de porter un flambeau pour poursuivre un travail bien entamé. Or Dieu a mis a nos cotés tellement d’hommes et de femmes qui auraient même fait mieux mais qui ont préféré l’humilité et la discipline pour contribuer au travail collectif. Savoir passer le bâton du relai au bon moment est l’un des signes distinctifs des bons leaders.

Marrons au feu comme cadeau de nouvel an ?

A peine sortis des souhaits du nouvel an, voilà que nous posons des actes allant dans le sens contraire des vœux pieux formulés pour une Afrique meilleure. C’est cela la responsabilité de l’homme dans tout ce qui lui arrive : prier pour arriver au point A et poser des pas vers un autre point B opposé.

En effet, à l’issue de la rencontre d’ACCRA du 9 janvier 2022, les chefs d’états de la CEDEAO ont décidés de sanctions supplémentaires qui comprennent, entre autres :

a) Fermeture des frontières terrestres et aériennes entre les pays de la CEDEAO et le Mali ;

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 b) Suspension de toutes les transactions commerciales entre les pays de la CEDEAO et  Mali, à l’exception des produits suivants : biens de consommation essentiels ;  produits pharmaceutiques;  les fournitures et équipements médicaux, y compris le matériel pour le contrôle du COVID-19 ;  produits pétroliers et électricité;

 c) Gel des avoirs de la République du Mali dans les Banques Centrales et Commerciales de la CEDEAO ;

 d) Suspension du Mali de toute aide financière des institutions financières de la CEDEAO (BIDC et BOAD).

 Ces sanctions seront appliquées immédiatement et resteront en vigueur.  Les sanctions ne seront progressivement levées qu’après la finalisation d’un chronogramme acceptable et convenu et le suivi de progrès satisfaisants réalisés dans la mise en œuvre du chronogramme des élections.

 9. Par ailleurs, compte tenu de l’impact potentiellement déstabilisateur sur le Mali et sur la région, créé par cette transition au Mali, l’Autorité décide d’activer immédiatement la Force en Attente de la CEDEAO, qui devra être prête à toute éventualité.

 10. La Conférence appelle l’Union africaine, les Nations Unies et les autres partenaires à soutenir le processus d’application de ces sanctions et à continuer d’apporter leur soutien à une transition politique acceptable.

 11. Malgré le démenti du gouvernement de transition malien, l’Autorité reste profondément préoccupée par le rapport cohérent sur le déploiement d’agents de sécurité privée au Mali avec son impact potentiellement déstabilisateur sur la région de l’Afrique de l’Ouest.  L’Autorité note que cette situation est étroitement liée à la transition politique au point mort dans le pays.

 12. Les chefs d’État et de gouvernement expriment leur profonde gratitude à S. Exc.  Nana Addo Dankwa Akufo-Addo, Président de la République du Ghana et Président de l’Autorité des chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO, pour son leadership dans la réussite du Sommet.

 Fait à Accra, ce 9 janvier 2022”

Que nous inspire ces nouvelles dispositions ?

Elles appellent de notre part deux observations ci-après. Les alinéas a, b et c du point 8 ont une forte corrélation. En effet, les exceptions relevées au point “b” portant sur des produits vitaux exclus des interdictions de transaction, ont besoin pour la mise en œuvre de leur fourniture,  de la levée aussi bien des contraintes relevant du point “a” – donc la réouverture des frontières afin que les acteurs puissent se déplacer dans les deux sens, que celle du point “c” portant gel des avoirs de la République du mali,  pour qu’Elle puisse opérer ses transactions pour rendre disponibles les produits vitaux cités.

Quant au point 9, il ressemble plutôt à une pseudo déclaration de guerre. Ces muscles bandés contre un peuple souverain auraient pu être mieux utilisés pour freiner les ambitions rebelles des fauteurs de troubles au Nord Mali et de leurs complices tapis dans l’ombre d’une coopération léonienne. Qui plus est, les insinuations relevées au point 11 sonnent comme une bouée de secours envers la politique française dans sa guerre de positionnement stratégique visant clairement à empêcher un choix stratégique d’un pays souverain.

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Quels enjeux stratégiques pour le Sénégal ?

Au regard des menaces qui guettent le Mali et ses voisins dont nous faisons partie, il est important pour le Sénégal, d’éviter au Mali l’isolement et l’étouffement que provoqueraient ces embargos internationaux et la fermeture des canaux entre le Port Autonome de Dakar (PAD) et le Mali.
Première observation : la mitoyenneté fait du Sénégal un magasin tampon ou de transit  pour le Mali en raison de l’importance des flux commerciaux livrés au PAD et acheminés par voie terrestre vers notre voisin. La conséquence d’ordre sécuritaire est le stockage de longue durée de marchandises qualifiées dangereuses par la réglementation sur les Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) et destinées aux pays voisins. L’explosion au port de Beyrouth au Liban est encore fraîche dans nos mémoires. Au-delà de la nécessaire circulation des intrants générateurs de flux financiers, nous avons tout intérêt à évacuer nos stocks.

Deuxième observation : Nécessité de vigilance sur les voies terrestres. Il faut particulièrement que le Sénégal, à travers son Programme d’Urgence de Modernisation des Axes routiers (PUMA), multiplie le renforcement des moyens aux frontières terrestres en les équipant de portiques rayon X à grande ouverture pour assurer une fouille électronique de masse au flux important de véhicules passant nos frontières une fois qu’elles sont ouvertes.

Troisième observation : L’asphyxie du Mali pourrait également profiter aux réseaux de trafic terrestres clandestins des pays voisins au détriment du PAD. Ces nouvelles voies de substitution risquent d’être un premier choix compétitif au retour du fonctionnement normal.

Quatrième observation : L’asphyxie du Mali pourrait fortement aggraver les flux migratoires des personnes démunies vers le Sénégal dans un contexte pandémique de tous les dangers. Les premiers points d’accès seraient, le cas échéant, les contrées du pays où la prise de conscience par rapport à la pandémie est plus faible et où le plateau technique médical est moins relevé.

Ces enjeux économiques, sécuritaires et sanitaires doivent être au centre de nos choix géopolitiques pour un  retour de la paix au Mali. 

Le Mali est devenu une marmite bouillante au chevet de laquelle le Sénégal se trouve. Elle n’a pas besoin de couvercle. Des manoeuvres inopportunes et égoïstes s’appuyant sur des instruments internationaux avec la complicité de certains dirigeants sous régionaux pour des intérêts inavoués sont en train d’appuyer ce couvercle dont l’éclatement n’épargnera ni le Mali, ni aucun de ses voisins et des ressortissants qu’ils abritent, ni le monde d’ailleurs face à la guerre asymétrique de plus en plus incontrôlable.







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