La question est désormais ouvertement posée dans les milieux gouvernementaux français : celle du retrait des troupes françaises du Mali.
L’expulsion de l’ambassadeur de France au Mali à la suite des propos injurieux de Le Drian, suivie du refus du gouvernement malien d’accueillir le contingent danois de la force européenne Takuba ont été les déclencheurs. Ces décisions ont été largement saluées en Afrique de l’Ouest comme autant d’actes de souveraineté du pays. Le gouvernement français et ses « partenaires » se donnent deux semaines pour décider.
Mais c’est bien le rejet de l’intervention militaire française par le peuple malien qui est déterminant. 2,5 millions de Maliens ont manifesté le 14 janvier contre le blocus du pays décidé par la CEDEAO, mais aussi pour le retrait des troupes françaises. Rien à voir avec un effet de la propagande russe, comme le laisse entendre Le Drian !
9 ans d’intervention militaire étrangère se sont juste traduits par plus d’insécurité, d’exactions et de déplacés. La force Barkhane n’a donc plus aucune légitimité, pas plus que la mission européenne Takuba, péniblement mise en place par Macron. Son sort semble scellé : après le Danemark, la Suède et la Norvège ont décidé de se retirer…
De plus en plus de commentateurs appellent à se retirer avant « d’y être contraint par la rue, sous la pression populaire des Gilets jaunes de Bamako et d’ailleurs » (1) et que cela ne provoque un effet domino dans toute la région.
Et personne de raisonnable ne peut penser que l’hostilité du gouvernement français à l’égard du gouvernement malien est mue par son aversion pour les coups d’État. C’est en fait tout le système mis en place par De Gaulle depuis 60 ans, la Françafrique, qui vacille. Il a permis de garder les anciennes colonies sous contrôle, à travers des accords de coopération et des accords militaires, à travers des dirigeants cooptés, par des élections souvent frauduleuses ou des coups d’État militaires ou constitutionnels. On l’a encore vu il y a quelques mois au Tchad après la mort d’I. Deby, au pouvoir depuis plus de 30 ans. Les indépendances sont restées formelles, simples façades d’un système de prédation.
L’impérialisme français cherche une porte de sortie au Mali, tout en renforçant sa présence militaire dans d’autres pays de la région, afin de sauver ses positions : le Niger, la Côte d’Ivoire, le Togo, le Bénin, le Sénégal sont sur la liste… autant de pays dont les régimes “françafricains” sont usés. C’est le chaos qui risque d’y être importé., au nom encore une fois de la lutte antiterroriste.
Mais rien n’est joué : un vent nouveau souffle sur le continent, un vent porté par la jeunesse qui aspire à une deuxième, mais véritable indépendance.