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Chad Stand Up, Chad Rise Up

Chad Stand Up, Chad Rise Up

Ce soir, prends ma voix, ton nom est le mien. Ta prison est la mienne. Je prononcerai ton nom pour dire ta liberté.

Palmira Telésforo Cruz

« Qui se soucie de mon frère ? Qui élève la voix pour lui ? Peut-être nous ? Dois-je prendre soin et être le gardien de mon frère ? » Pasteur Niemöller

Et si nous disions « Prisonniers politiques, Liberté » et à haute voix ! Parce que Max Loalngar, Gounoung Vaima Gan-Fare, Youssouf Korom Ahmat, Massar Hissene Massar, Koudé Mbainassem, Allamine Adoudou Khatir sont les premiers prisonniers politiques et de conscience de bébé Deby au Tchad. Et si nous devions nous demander lequel d’entre nous sera le suivant, combien d’entre nous seront les suivants, si nous ne nous levons pas pour l’empêcher. Qui d’entre nous sera le prochain dans un monde troublé et brisé où demander justice contre les excès du capitalisme et son pouvoir politique est un crime partout ?

Pour défendre la liberté des voix politiques tchadiennes, il n’est pas nécessaire d’être d’accord avec eux et leur programme, d’être de leurs familles ou de leur ethnie, ni même d’avoir de l’estime pour eux. Il suffit, de reconnaître qu’un autocrate dévoué comme papa Deby et comme l’est aussi bébé Deby, va toujours détruire quiconque ose le remettre en cause ou questionner ses commanditaires de l’Elysée.

Aucun doute, les titres des journaux sont précis : « des opposants ont été emprisonnés pour avoir appelé à des protestations contre la France. » « Protestations violentes », clarifie et avertit le gouvernement du Tchad. « Pas aussi violentes que la spoliation néocoloniale française » qui, par exemple, fait couler jusqu’à la dernière goutte d’essence au Tchad dans le contexte de la récente crise énergétique, déclarent les gens du peuple. S’il faut se dire les choses les yeux dans les yeux, quoi qu’il arrive, et en tout cas, s’il y a de la violence de notre côté contre les intérêts français au Tchad ou n’importe où en Afrique, nous devrions la considérer comme de la légitime défense.

La persécution que subit Wakit Tama est un avertissement pour tous. Pour les opposants qui osent se présenter en adversaire, en période de reconfiguration de la géopolitique impériale. Pour le gouvernement tchadien illégitime, cela signifie que même après trente ans de diktat, il y aura toujours quelqu’un qui osera se dresser face à l’armée coloniale du « regretté » Maréchal d’Opérette. Pour nous-mêmes, c’est un appel à nous soucier de ce que deviennent nos frères emprisonnés. Le silence ne puis se permettre ; et devient l’abandon des nôtres. Parce la situation de dénuement et de chaos social que nous vivons depuis des décennies ne distingue ni appartenance ethnique ou régionale, ni filiation avec le pouvoir.

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La mémoire est encore bien vive, qui nous rappelle que papa Deby a inscrit par le sang une histoire de 30 ans de vassalité brutale. L’évidence est la réalité elle-même, têtue, puissante, brutale dans l’exposition qu’elle fait de la misère. Le pouvoir en aucune manière ne pourra brandir des preuves pour nier que ce pays pétrolier ait dépensé tous ses revenus pour équiper une puissante armée servant uniquement les intérêts mercenaires de la France. Il suffisait que la France, pour ses interventions néocoloniales claque du doigt et dise « grenouille, on a besoin de héros » pour que Deby saute tel un batracien, excité et fiévreux, pour servir d’armée proxy, de guérilla proxy, de force paramilitaire proxy, de groupe terroriste proxy, à la fille rapace de l’Europe qui, comme tout le continent, continue de vivre de vols et rapines. Et papa Deby de s’agenouiller pour que son maître colon lui permette d’acheter et de s’enfiler un costume de maréchal brodé d’or ! On l’imagine, beau comme un dieu se promenant dans des rues sans asphalte, sans égout, sans écoles et sans hôpitaux, parmi les acclamations d’un peuple vigoureux mais affamé qui a une espérance de vie de 54 ans et un taux d’alphabétisation de 22 % (14 % pour les femmes). C’est ainsi qu’il faut l’imaginer : le roi maréchal en promenade, cependant complètement nu. Les fervents rétrogrades nous exigeront de laisser les morts aux morts et que le Maréchal dorme en paix ! Voici que c’est une partie du peuple lui-même qui clos la palabre et le cercueil ! Tandis que l’autre partie essaie de se délester de cette toile d’araignée que continue de dérouler bébé Deby et son entourage de généraux affamés tenant la poêle coloniale à la main. Macron bénit bébé Deby.

Personne n’a été surpris de voir des officiels français se promener en Afrique au milieu de la pandémie de Covid-19, pour enchaîner signatures d’accords sur signatures d’accords pour contrer les avancées chinoises, russes, indiennes : marquer son territoire comme le fait le chien en urinant au pied de l’arbre. Quand on pense qu’il y en a qui font l’amalgame entre l’irrationnel religieux et l’irrationnel politique et qui exigeaient de faire table rase sur les crimes de papa Deby au profit de la spiritualité ! Un homme drapé dans les intérêts du diable peut-il faire l’objet d’une rédemption spirituelle ? Est-il vrai que pour la survie de l’âme du Maréchal, pour son immortalité, nous ne pouvions pas enquêter sur le sort de l’argent du peuple, de la richesse d’une nation répartie et déposée sur les comptes bancaires et les propriétés de sa cohorte de parents-généraux et de la multitude de femmes et d’enfants qui, sans aucun mérite autre que celui de la filiation ou de l’apparentement, peuvent prétendre continuer à disposer de liasses de billets ? Ces liasses de billet à jeter pendant leurs fêtes dégénérées et bruyantes sur les misérables mendiants, si vulnérables par la pauvreté qu’ils en oublient la justice et leur droit en échange de miettes de pâte de mil ?

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Bébé Deby s’est imposé comme président par intérim à la tête d’une junte militaire. Les premières velléités d’une guerre civile et des dissensions nationales ont été diluées par la promesse d’élections libres qui auraient lieu 18 mois plus tard, clôturant un dialogue national entre acteurs politiques divers. Le dialogue national inclusif « béni » par la France a fait fantasmer sur l’idée d’une démocratisation de la vie politique pendant la transition. Hélas, cette parenthèse a plutôt permis de diagnostiquer et dessiner la cartographie de l’opposition selon les méthodes d’intelligence et contre-insurrection propre à la DGSE. La réunion est non seulement reportée à maintes reprises mais, les péripéties de son organisation truffées de menaces, coercitions, pots-de-vin et persécutions des opposants. Normal que les dissensions soient montées en flèche et qu’elles se soient focalisés, vers un crescendo magistral, sur le ton du chef d’orchestre Macron Barkhane. Et alors que la date décidée pour un dialogue des plus tristes et impossible est reportée mille fois, cela vers un processus électoral qui n’aura certainement rien de démocratique, il n’y a rien de mieux pour l’apprenti dictateur que de faire une démonstration d’autoritarisme tropical, sous la protection et au service de l’impérialisme néocolonial français « aimant » (comme dirait Achille Mbembe). Des gages du vassal parfait. En attendant, six de nos frères ont été condamnés à la prison.

Et ces six prisonniers politiques et de conscience sont parmi les premiers de nos frères du nord ou du sud, de l’est ou de l’ouest à offrir en sacrifice à l’idole sauvage qu’est le capitalisme français et son besoin de s’assurer la stabilité et la continuité de son bastion militarisé (institutionnel ou paramilitaire) au Sahel et au Maghreb. Qui gagne quoi ? Pour la France, ce sera les mercenaires militarisés nécessaires pour intimider le Mali et le Burkina Faso, la République Centrafricaine et d’autres pays qui, plus tard, oseront contester le franc CFA et la spoliation des ressources du continent. Le Tchad, lui, se voit imposer un enfant, le fils, à qui la France a certainement promis un nouveau costume de maréchal brodé d’or pour qu’il puisse continuer à se promener dans des rues misérables au milieu des sujets misérables dont la plus grande partie n’a rien appris à lire et à écrire.

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La prison, c’est pour les justes. Pour nous, l’engagement ce sera de continuer à demander la liberté pour nos prisonniers politiques et de conscience.

Palmira Telésforo Cruz est communicologue, politologue et chercheure universitaire, issue de la diáspora noire mexicaine. Pendant une dizaine d’années elle a travaillé au développement de la Casa R. Hankili Àfrica, Centro Historico, Ciudad de México.







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