Et c’est encore reparti pour un nouveau tour de vis contre les libertés démocratiques au Sénégal ! Sorti groggy des élections législatives du 31 juillet 2022 dont les résultats vont considérablement amoindrir sa capacité de nuisance contre l’assemblée nationale, le président Macky Sall semble plus que jamais déterminé à poursuivre la mise en œuvre de vieilles recettes autoritaires qui, clairement, ne lui réussissent pas. Ni politiquement, ni du point de vue d’une image personnelle hautement dégradée. Sa décision d’empêcher – au prix de la mobilisation de plusieurs dizaines de gendarmes – l’opposant Ousmane Sonko et son parti de dérouler leurs activités politiques dénommées « Nemmeku Tour » sur le territoire national est une attitude burlesque, belliqueuse et superflue pour notre pays. Elle est donc indéfendable.
Que cherche en vrai Macky Sall ? Semer les graines de nouvelles tensions artificielles pour piéger des opposants politiques et se donner l’opportunité de les trainer (encore) devant la justice ? Etre seul sur le terrain politique et y dérouler – seul – son agenda à travers des tournées dites économiques, des conseils de ministres décentralisés et autres gadgets politiciens en perspective d’une élection présidentielle à laquelle il ne participera pas, selon ses propres termes et ses mille et un jurons ?
Pour ses « tournées économiques » et « conseils des ministres décentralisés » à venir, le président de la république s’interdirait-t-il d’être accompagné par les mouvements de foules dont l’essentiel a l’habitude d’être téléguidé par les responsables politiques locaux de son parti et de ses alliés ? Se limiterait-il à rester entre les quatre murs des préfectures, gouvernances et hôtels réquisitionnés à cet effet ?
En vrai, Macky Sall doit se convaincre de plusieurs certitudes car les événements ont tourné et de manière fondamentale. L’assemblée nationale de la 14e législature devrait lui servir de repère à cet effet. Il ne pourra occuper – seul – le terrain politique qu’avec des « opposants » qui acceptent sa régence en tant que deus ex machina d’une démiurgie qui s’appellerait « Mackysie » ou « Mackylogie ». Ce n’est qu’avec ce type de politicien véreux et cyniques – il en existe tellement – dont l’ambition est cantonnée à vivre aux basques des deniers de l’Etat qu’il pourra dicter – seul – le tempo politique sénégalais sans risque d’être troublé dans sa quiétude somnolente. En attendant, ce n’est pas encore le cas – et ça ne risque pas de l’être de sitôt – d’où l’urgence pour le président sénégalais de se construire une vraie réconciliation avec la réalité des choses et mettre fin à la transgression permanente des libertés constitutionnelles des Sénégalais.
Aujourd’hui, la plupart de nos compatriotes sont pris au piège de contraintes vitales liées au renchérissement insupportable du coût de la vie. Les denrées et autres aliments qui assurent leur survie au jour le jour s’arrachent avec les yeux de la tête. Boutiquiers de quartier et marchands en tous genres sont devenus des créditeurs de «bons alimentaires» à leur corps défendant. Les repas en commun décampent à la vitesse V pour laisser place aux stratégies de survie individuelle à l’intérieur même des familles. Pendant ce temps, Macky Sall et sa « junte » post élections législatives préfèrent s’engager dans un « combat » politicien fagoté d’un slogan social dont chacun mesure les limites et les soubassements politiciens.
Pour ce qu’il lui reste de légitimité – étant entendu que les mesures illégales s’obtiennent grâce aux fidélités corrompues arrachées à divers niveaux de l’administration centrale et déconcentrée – Macky Sall a le devoir de faire annuler les interdictions grotesques opposées par la gendarmerie aux responsables et militants de Pastef dans leur volonté de tenir leurs activités politiques. Dans le type démocratie que lui-même revendique pour notre pays ici et dans le monde, la caporalisation de la vie politique par un président de la république partisan reste inacceptable de fait et de droit. Le Sénégal n’a pas encore voté pour être ce laboratoire à partir duquel on transformerait sa démocratie en une junte monarcho-patricienne au service de clans affairistes. Une démocratie, elle respire ; elle ne s’étouffe jamais d’elle-même ! Et quand on est si autant réfractaire au B.a.-ba qui en est le fondement vivant, rien n’interdit de se recycler ailleurs…