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La MaturitÉ Est Dans Le Cynisme

Où s’élabore l’humeur du pays ? La notoriété de l’intellectuel ne rime plus avec l’exercice de l’influence. L’expertise ne sert plus de bouée de sauvetage. Le temps n’est pas à la sérénité. La maturité fait dans le cynisme. L’excitation et l’emballement assurent le spectacle. Des acteurs pris dans une ombre de cette lueur qui rayonne et abîme. Leurs insuffisances n’engloutissent pas leurs obstinations. Qui pense juste ? Qui rêve faux ? Des parangons de vertus dérapent tout en tenant une rampe de la morale. Le réel leur glisse-t-il entre les mains ? Dans cette tourmente, ne se dégage que l’angoisse des populations. Ce tumulte bouleverse sauf des émotions et des égos de politiciens qu’il est difficile de rapiécer un tissu démocratique dont des griefs viennent supplanter de beaux motifs. Chacun est convaincu d’exprimer une volonté consciente ou inconsciente d’un peuple qui, le moment venu, s’exprimera à travers des urnes.

Il faut fabriquer le vertige, fournir le fantasme, donner l’ivresse, livrer des extases excitant à participer à une étape du plan de carrière des politiciens. L’air du temps oblige. Ils sont disposés à faire alliance, recourent à une méthode triviale. Une tactique pas nouvelle. Pourvu que la stratégie paie. Mais… Que de magasins pillés, de biens vandalisés, de personnes meurtries, de morts à passer par pertes et profits… Parce qu’on aura réussi à détourner une certaine aspiration en une colère. Pensant que « l’homme n’a jamais rien produit qui témoignât en sa faveur que des actes de colère : son rêve le plus singulier est sa principale grandeur, renverser l’irréversible » (Paul Nizan, La Conspiration). Quelle irréversibilité, qu’elle irrémédiabilité ? Le Sénégal est un pays où des électeurs votent régulièrement depuis 1792 comme aimait à le répéter feu Mbaye Jacques Diop. La victoire du Bds (Bloc démocratique sénégalais) aux élections de 1951 était saluée par la presse et les acteurs politiques de l’époque comme une alternance. Deux autres changements sortiront des urnes en 2000 et en 2012.

Le mensonge apaise l’existence

Qui aime le malheur des événements qui substituent l’hideur et l’abject à l’identité de la paix ? Cette marque devenue une vanité sénégalaise. Des politiciens qui ne souffrent pas de la mauvaise image qu’ils donnent d’eux-mêmes peuvent-ils se soucier des interpellations des honnêtes gens ? Ils se sont moulés dans une désinvolture qui ne finit jamais de froisser. Ils en sont fiers. En bateleurs qui vivent à débiter des boniments, ils jouissent d’une amnésie qui favorise leurs incohérences et autres inconséquences. Aussi : « Les allers-retours entre la vérité et le mensonge jouent un rôle essentiel. Ces oscillations réalisent un mouvement subtil qui apaise notre existence. (…) Lorsqu’on s’intéresse aux comportements d’un groupe, on observe un décalage étonnant entre le désir de vérité et les comportements mis en œuvre pour la refuser. Pourquoi des personnes préfèrent-elles croire et répéter un mensonge ? Pourquoi, face à des énormités, alors que les évidences sont sous leurs yeux, restent-elles si complaisantes vis-à-vis des menteurs ? », écrit le médecin psychiatre Pr Patrick Clervoy dans l’introduction de son livre Vérité ou mensonge.

Des nombreuses observations du spécialiste Clervoy, il ressort qu’on « fait davantage confiance à un menteur démasqué et relevé de ses fautes plutôt qu’à une personne a priori intègre sur le plan moral. Un menteur est paré de vertus qui séduisent. On croit mieux le connaître. (…) On place plus facilement sa confiance en celui qui a été reconnu comme un menteur ». Ainsi en va-t-il même dans des pays dits de démocratie avancée. Donald Trump n’arrête pas de faire école. La perversité de sa méthode est dénoncée pour mieux s’en servir. Lisons encore Pr Patrick Clervoy : « En 2017, défiant les pronostics, Donald Trump fut élu quarante-cinquième président des États-Unis. En 2015, PolitiFact, un site Internet rigoureux qui surveille la véracité des déclarations des hommes politiques américains, avait honoré Donald Trump du titre de « menteur de l’année ». Cela ne lui porta pas préjudice. Durant la campagne présidentielle, il renforça la caricature du personnage médiatique qu’il était déjà. Il ne modéra ni ses outrances ni les assertions mensongères concernant ses opposants, la malignité de la presse, l’état de son pays et les relations avec les puissances étrangères. Il prouva chaque jour qu’il mentait mieux et plus fort que n’importe quel autre candidat. Pourtant, il plut suffisamment à une majorité relative pour conquérir ce poste… »

Hier comme aujourd’hui, une quête de légitimité. Des gens qui ne valent rien, des renégats, des incapables, des corrompus selon leur nomadisme politique, leur station du moment dans ce système que vitupèrent ses meilleurs prébendiers. Pour sortir de la crise de 1968, l’armée, refusant de prendre le pouvoir, avaient proposé, entre autres, au président Senghor, une suppression des salaires et autres avantages et leur remplacement par une indemnité de session pour les députés. Quel politicien dit mieux ?







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