Arrivé à l’Élysée à moins de 40 ans, le chef de l’État français a bluffé tout son monde, notamment les Africains qui ont cru qu’un « jeune » président ne se comporterait pas comme un vieux gaulliste, vieux colonial décati, incapable de voir l’Afrique autrement que sous l’œil des maîtres à esclaves. Il devait donc aller dans le sens de la nouvelle histoire africaine qui s’écrivait depuis quelques décennies : plus de tutelle militaire, plus de chaine monétaire qu’est le CFA, plus de lobbies politiques ni de monopoles économiques, plus de petits copains de présidents africains qu’on convoque annuellement à l’Élysée pour une dictée des désirs, mandataires des oligarques hexagonaux dont il est en réalité le garçon de course. Mais…
Macron s’est avéré être le résidu de la matrice coloniale dans un corps pourtant jeune voulant coûte que coûte (son fameux “quoi qu’il en coûte”) maintenir l’Afrique dans les “liens” du mariage colonial. Il a houspillé des chefs d’État devant leurs étudiants, chez eux ; il a convoqué leur jeunesse et une certaine société civile à Montpellier pour discuter de “France-Afrique et des problèmes africains” à l’insu des chefs d’États africains qui, en réalité, ont été contraints de faire, comme on dit, “contre mauvaise fortune bon cœur”. Et cela, avec le “coaching” d’une vieille intelligentsia africaine mixée (nés en France ou étudiants devenus “start-uppeurs”) ayant leurs entrées dans certains cercles de la nouvelle galerie macronienne. Tout cela a mis le couvert et l’aura d’un des meilleurs intellectuels africains dans les années 80 : un certain Achille qui a trouvé un nouveau terrain de jeu aujourd’hui pour pourfendre les nouveaux ennemis de la France coloniale : les pan-africanistes, les souverainistes, les anti-CFA, les anti-bases militaires françaises (véritables protections privées) des dictateurs africains et autres truqueurs d’élections, charcuteurs de Constitutions pour se tailler des costumes et boubous d’éternité…
Voilà la France que de plus en plus de jeunes Africains ne veulent plus voir, vivre, et le disent de multiples manières : en acclamant et en accueillant dans la liesse des militaires considérés comme des « libérateurs”, des “sauveurs”. En réalité, ce que Macron et ses réseaux France-africains quasi mafieux ignorent, c’est que ces coups d’État en Afrique, d’abord en Afrique de l’Ouest, et maintenant en Afrique centrale, témoignent de la compréhension par la jeunesse de la démocratie “avariée” qui leur est vendue, des politiques aux variables très intéressées.
Avec leurs lunettes et loupes unidirectionnelles, Macron et ceux dont il sert les intérêts (les “riches” comme le dit une bonne frange de Français, dont les gilets jaunes et autres Insoumis) n’ont pas vu le symbole représenté par « les nouveaux barbares » et autres russophones (cette Russie qui leur fout la trouille depuis des… siècles). La jeunesse africaine veut respirer en prenant son destin en main, en disposant, contrôlant ses ressources naturelles. Ils souhaitent de nouvelles conventions équitables, ils veulent battre et disposer de leur monnaie, pouvoir choisir leurs dirigeants sans que vous leur indiquiez lesquels sont de vos choix, sans que votre “communauté internationale” soit la seule juge de ce qui est bon ou mauvais pour nous autres, éternels Nègres dociles, le dos et l’échine courbés.”
Oui, vous Macron et vos nouveaux gourous et conseillers « afrimanqués » (le chef du mouvement indépendantiste casamançais MFDC, l’abbé Augustin Diamacoune, qualifiait les cadres casamançais opposés à l’indépendance de la Casamance, de “casamanqués”), n’avez pas compris que désormais, la majorité de l’opinion publique africaine ne considère pas les militaires comme de la simple chair à canon cantonnée à récurer leurs armes dans les casernes et à la frontière. Ils sont aussi citoyens et membres à part entière du grand corps hybride appelé peuple. Vous avez vécu le mépris propre aux Lumiéristes, vous postulez que seul votre système démocratique est bon, universel voire l’unique modèle unique d’exportation.
Macron le “démocrate” s’arroge le droit de distribuer des brevets de “légitimité” en Afrique. Il distingue des régimes légitimes de ceux qui ne sont le pas ; il désigne untel de putschiste parce qu’anti-français et pro-russe ou plutôt pro-Wagner, ces méprisables “soldats de fortune” avec une bave méprisante dans leurs bouches. Tel autre est qualifié de “nouveau régime” (pas putschiste) ; telle élection a été démocratique, telle autre une calamité qui est tout de même validée sur le dos du peuple conscient de son choix à travers les urnes. Le peuple sait comment se sont déroulées les élections, avec la bénédiction et l’onction « d’observateurs indépendants” mandatés par des institutions fort peu démocratiques.
Ce système “d’observateurs” des élections en Afrique (seulement) est une insulte à notre intelligence. Il témoigne du peu d’estime que ces supposées institutions indépendantes nous portent, de leur perception de nous : les débiles primaires qui ne savent pas élire, organiser des élections, choisir leurs dirigeants.
L’amont du processus comprend les Ceni et autres Cena truquées, les Cours constitutionnelles et Cours suprêmes aux membres choisis par les pouvoirs en place, avec des couches de corruption active (salaires surévalués, avantages avec villas, etc). Ces gens-là se sont toujours accommodés avec les infidélités de la loi. Mais Macron (qui se rêve en Napoléon) avalisent tout et nous disent “soyez gentils, acceptez les résultats ou allez déposer vos contestations devant les cours et tribunaux”, “respectez la loi”. Nous savons ce que sont (devenus) nos cours et tribunaux… Et après, en vierges effarouchées, la bouche en chœur, ils nous assènent leurs certitudes évangélisées.
Macron a poussé le mépris jusqu’à marteler devant toutes les tribunes : « notre ambassadeur, nos forces armées ne quitteront pas le Niger parce qu’ils ont été appelés par le régime légitime. Je ne reconnais pas ces putschistes de Niamey. Et la “communauté internationale” a regardé et laissé faire. La France refuse de quitter un pays contre lequel les dirigeants et la majorité de la population manifestent par milliers chaque vendredi devant sa base militaire et dans toutes les grandes villes.
Elle va pourtant le faire ; ils vont partir la queue entre les jambes. “En bon ordre”, (sans rire) a postillonné dimanche soir le patron de l’Élysée sur les plateaux de TF1. Il dit aux Français qu’il pense le cœur meurtri aux “soldats français morts au Sahel en luttant contre les terroristes-jihadistes”. Paix à leurs âmes. Mais combien de Maliens sont morts pendant les dix ans que vous étiez là-bas supposément pour les défendre, lutter et chasser les terroristes ? Il semble (C’est même certain) pourtant que les terroristes ont étendu leur surface d’occupation au Mali pendant que vous y étiez ; ils ont envahi certaines régions du Burkina, fait des incursions meurtrières en Côte d’Ivoire et des raids mortels dans un parc béninois. Où étiez-vous donc ? Où étaient vos milliers de soldats ? Les Maliens ironisent du reste : “avec leurs moyens d’observation qui peuvent lire la plaque d’immatriculation d’une voiture, ils n’ont pas pu voir des colonnes de pickups et de moutons de terroristes se déplacer, entrer dans des villages, tuer et piller ». Oui président Macron, où était votre armée et ses gadgets high-tech ?
La France impériale de Macron a réussi le tour de force de vassaliser nos institutions régionales (la Cedeao, l’UA, l’Uemoa). Et même l’ONU tellement gangrenée par l’interventionnisme français, que ce dernier lui dicte qui y représente l’État du Niger. C’est-à-dire les “has-been” corrompus mis en retraite anticipée avant qu’ils ne précipitent le pays dans les bras des terroristes comme vous l’avez laissé faire au Mali et au Burkina. Cette situation (nos institutions régionales et sous-régionales comme cheval de Troie et bras armés des derniers vestiges de l’empire France-Afrique), fera l’objet d’autres articles.
En attendant, malgré les mensonges de Macron, on ne boude pas notre plaisir de voir enfin la France retrouver ses esprits et peut-être aussi l’Esprit de 1789. En rapatriant son ambassadeur barbouze baroudeur dans le Sahel, et son armée, qui ne “perdra” plus ses enfants dans les déserts de ces « ingrats d’affreux sahéliens-africains ».