Un petit garçon dans une pièce où l’obscurité se dilue dans la lumière Diurne, contemple le monde extérieur. Une perle d’image qui entre dans une parfaite résonance avec le choix de titre Room 221, le premier album du collectif Galsen Jazzpera. À travers son regard pur, tout est plus beau. Cette beauté est amplifiée à l’infinie par la magie combinée des rayons solaires et de la puissance de son imagination. Il ne regarde pas, il observe. Il ne prend pas, il recueille. Il n’obéit pas, il imite.
Cette image est d’autant plus puissante qu’elle est une parfaite illustration de l’insouciance qui frappe bon nombre d’entre nous. L’enfant qui figure sur le cover art de room 221, semble plus observateur, plus alerte, plus imprégné de son environnement que ses aînés que nous sommes. Révoltés nous faisons le parallèle ; tous les maux qui affligent le monde sont une forme d’obscurité, nous dira-t-on. Par contre avant de penser ou d’avancer qu’un lieu est obscur, encore faut-il ouvrir les yeux, ne serait-ce que pour constater la plausible absence de la lumière.
Pour bon nombre d’entre nous, nous sommes tout sauf observateurs. Nos problèmes sont décortiqués par d’autres que nous. Les solutions proposées proviennent très rarement de nous. Trop d’actions sont pensées, agencées et exécutées par d’autres que nous. De grâce, marquons un temps d’arrêt. Trouvons la force de nous extirper du tumulte du quotidien et acceptons qu’il y a un peu plus de soixante ans en arrière, nous avons très mal réagi. Nous avons mal répondu face à de chimériques vents d’indépendance. Sourds aux injonctions de l’histoire, grande férue de la répétition, nous nous étions lancés à corps perdu dans la célébration. Hélas, nous ne venions pas d’être libérés. Non, loin de là. Dans les prisons à ciel ouvert de lors, nous changions juste de geôles. Nous sombrions ensuite dans les profondeurs d’abîmes connues aujourd’hui sous les vocables de néocolonialisme et de néo-impérialisme.
Vous nous voyez venir. Le décor est bien campé pour évoquer la quasi-totalité de Room 221. Avez-vous la tracklist sous les yeux ? Le dernier opus de Galsen Jazzpera administre la nécessaire piqûre de rappel à ceux qui oublient, naturellement ou par amnésie sélective, que ces cancers qui se terminent en “isme” sont toujours d’actualité. Ces fléaux, à combattre à tout prix, ont coûté la vie à Thomas Sankara, à Sylvanius Olympio, à Amilcar Cabral, à Titina Silà (résistante), à M’Balia Camara (résistante) et à tant d’autres. En recueillement face à la mémoire de nos martyrs, nous avons le devoir de nous prémunir, voire d’arracher notre place dans un monde qui semble se perdre dans l’infinie abîme du chaos.
Qu’en est-il des chansons d’amour sur le projet ? Là où l’énergie va, la chose grandit. En plein cœur du tumulte, permettez-nous de voir la sublime lumière lacérer sans répit les ombres scélérates. Dans un contexte international où les pâles copies se suivent “comme du pain chaud”, Room 221 se veut une œuvre authentique magnifiée par les résonances harmonieuses d’une mosaïque habilement pensée et savamment travaillée. Du moment que nous pouvons établir une interconnexion entre tous les sons qui composent le projet et qu’on est alignés avec les idées qui sous-tendent “Room 221” comme choix de titre d’album, nous sommes forcément sur de bons rails.
Sinon, en dehors du premier album du collectif Galsen Jazzpera, l’amour est partout présent en Afrique. Et gardez à l’esprit que dans notre approche, nous nous adressons au Sénégalais, à l’africain, à tout citoyen du monde. Ceci étant dit, nous nous réjouissons que l’obscurité de la misère crasse soit régulièrement mise à mal par les poignants éclats de rires d’enfants dénués de tout, au summum de la pureté, ignorants de leur enfer, se contentant de peu et surtout, point le plus important, nous pouvons les aider, voire les sauver, avec presque rien. Nous le leur devons absolument: le monde leur appartient.