Depuis l’annonce du report de la présidentielle du 25 février dernier par le président de la République, Macky Sall, et à quelques heures du démarrage de la campagne électorale, le Sénégal était sur une corde raide. Dans une situation des plus périlleuses qui demandait beaucoup d’habileté pour s’en sortir. Des scénarii particulièrement alarmants étaient ainsi évoqués par des observateurs et autres « experts » en tout, faisant craindre de voir le Sénégal plonger dans une zone de turbulences. Surtout avec la volonté prêtée au Président sortant de s’opposer au Conseil constitutionnel en imposant aux sept sages un bras de fer qui allait se terminer par la dissolution de cette juridiction créée en 1992 par le deuxième président de la République du Sénégal. Abdou Diouf justement qui invitait récemment les autorités à se conformer aux décisions du juge constitutionnel. Beaucoup d’hypothèses avaient été ainsi émises avec une probable crise institutionnelle et des risques de voir le Sénégal se retrouver sans président ou le chef de l’Etat démissionner pour être suppléé par le président de l’Assemblée nationale. Des horizons pour le moins sombres qui allaient installer le pays dans un brouillard. Et plutôt que de suivre les recommandations du Conseil constitutionnel qui l’invitait à organiser l’élection présidentielle « dans les meilleurs délais », Macky Sall avait préféré organiser un dialogue « national » qui s’est révélé être une véritable scène de théâtre avec la bouderie de 17 sur les 19 figurant dans la liste arrêtée par le Conseil constitutionnel.
Transformant ainsi un dialogue en monologue malgré l’éclaircie représentée par les positions du clergé catholique et de quelques acteurs du monde des affaires qui avaient expliqué les risques encourus par le pays de voir la présidentielle repoussée ou ne pas être tenue avant la fin du mandat du Président Sall. Les débats avaient aussi porté sur le projet de loi d’amnistie qui a divisé une bonne partie de l’opinion, la classe politique et de la société civile. Et qui a été finalement voté hier par les députés. Les détracteurs de cette loi la considéraient comme un moyen de promouvoir l’impunité des crimes commis durant la période noire allant de mars 2021 à février 2024. Des crimes dont les auteurs ne sont toujours pas identifiés faute d’enquête sérieuse malgré les assurances du chef de l’Etat après son discours de sortie de crise lors des évènements de mars 2021. Des auteurs qui courent toujours et qui risquent de ne jamais payer leurs crimes avec le vote hier de la loi d’amnistie par une forte majorité des députés du pouvoir soutenus par ceux du Parti démocratique sénégalais malgré l’opposition de leurs collègues du groupe Yewwi Askan wi et notamment du parti Pastef. Une loi qui constitue une grande insulte pour la mémoire des victimes. La journée d’hier a été également marquée par le rejet par le Conseil constitutionnel de toutes les propositions du dialogue dit national et acté la participation à l’élection présidentielle des 19 candidats retenus par les 7 sages. Pour le juge constitutionnel, fixer le scrutin au 2 juin reviendrait à « créer un vide institutionnel non prévu par la Constitution», contredisant le «principe à valeur constitutionnelle de sécurité juridique et de stabilité des institutions ».
Ce faisant, c’est-à-dire en rejetant les conclusions du dialogue « national », il brise le rêve des militants du Parti démocratique sénégalais de voir leur leader, Karim Wade, participer à cette élection qui est partie pour être des plus palpitantes de l’histoire du Sénégal indépendant. Reste maintenant à savoir quelle sera la position du parti du père Wade qui va, peut-être, se sentir floué après avoir voté la loi sur l’amnistie tout en rêvant de voir le processus électoral repris. En effet, c’est alors que le sort de la loi d’amnistie se jouait à l’Assemblée nationale que le chef de l’Etat a dissous le gouvernement et nommé l’ancien ministre de l’Intérieur, M. Sidiki Kaba , Premier ministre en remplacement de Amadou Ba, candidat de la coalition au pouvoir BBY. Il s’agit, explique-t-on, de lui donner plus de temps pour se consacrer à sa campagne électorale. Il lui faudra aussi beaucoup s’investir pour rallier à sa bannière beaucoup de cadres de la formation au pouvoir qui ont manifesté leur opposition à sa candidature.
C’est également au cours du même Conseil des ministres d’hier que le Président Sall a décidé de se conformer à la volonté du Conseil constitutionnel de voir l’élection présidentielle tenue « dans les meilleurs délais ». S’inclinant, il a annoncé que l’élection présidentielle se tiendra ce 24 mars. Après la folle journée d’hier, on peut dire que le Président Sall, dont l’image se trouve très écornée, commence à retrouver ses esprits. C’est tout le mal qu’on lui souhaite. Vivement que le Sénégal tourne cette page, la plus douloureuse de son histoire politique. Et espérons aussi que la réconciliation promise se traduira dans les faits durant la campagne électorale qui va s’ouvrir. Malgré tout, les plus grands perdants restent les victimes des manifestations politiques et leurs familles. L’histoire retiendra tout de même que tout est parti d’une histoire de fesses montée de toutes pièces et qui a été à l’origine de dizaines de morts en plus d’importants dégâts matériels. On n’avait assurément pas tort d’écrire dans ces colonnes, au plus fort de cette crise, que le vagin de Adji Sarr ne valait pas que ce pays brûle ! Et voilà, il faut maintenant éteindre l’incendie et réparer les dégâts provoqués par cette chatte…