Les candidats à la présidentielle ne sont pas les seuls à battre campagne, chacun pour s’assurer la victoire au soir du 24 Mars. La presse aussi. Pas qu’elle soit alignée pour la course à la magistrature suprême, bien évidemment. Mais plusieurs organes sont dans le soutien sans réserve de certains candidats.
Les Unes quotidiennes donnent clairement à voir le parti-pris. L’on est pour tel candidat : l’on encense et l’on hypertrophie. L’on est contre tel autre : l’on voue aux gémonies et l’on s’investit dans l’atrophie. En l’occurrence la presse – en général – fonctionne au manichéisme.
Le meeting du candidat de la coalition encore au pouvoir (Benno Bokk Yakaar) à Mbacké est assez illustratif de ce point de vue. D’un côté, on nous dit qu’Amadou Bâ a provoqué un «ras de marée humaine» avec une «mobilisation exceptionnelle». De l’autre, l’on soutient qu’il a eu droit à un public clairsemé et quasi confidentiel.
En réalité, tout se passe comme si nous avions des journalistes-reporters qui ont assisté à deux meetings différents, tenus dans deux endroits distincts par le même candidat au don d’ubiquité certain. Un vrai bazar médiatique qui fait dire à plus d’un que la presse est devenue un théâtre où se joue quotidiennement une comédie de mauvais goût. Il n’est alors pas étonnant que beaucoup s’en détournent au profit du colportage et des rumeurs sur les réseaux sociaux. Parce qu’ici au moins c’est plus drôle.
Les médias ont vocation à assurer la vigilance sur les choix fondamentaux masqués derrière les luttes des politiques. Par conséquent à structurer leur espace de manière à rendre possible le débat sur des questions essentielles. Puisqu’au bout du compte, c’est notre démocratie qui est en jeu. Or, cette dernière ne peut exister sans citoyens bien informés et responsables.
Au lieu donc d’être des pantins et des vassaux des politiciens, de mentir sans retenue et de pervertir sans répit les faits, nous gagnerions à nous réincorporer nos propres critères de légitimité. Pour être légitimes aux yeux des autres.