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Note Succincte Sur La Problematique Des Semences Au Senegal

L ’atteinte de l’autosuffisance alimentaire est une préoccupation majeure du Chef de l’Etat et de son Gouvernement. Mais, malgré les performances réalisées ces dernières années, les objectifs fixés n’ont, jusque là, pas été atteints du fait en partie de la faiblesse de l’utilisation de semences certifiées.

Avec les semences qui doivent permettre d’augmenter la productivité agricole, les acteurs s’accordent à reconnaître que beaucoup d’initiatives ont été prises par l’Etat pour reconstituer le capital, mais il faut dire que le système connaît de sérieux dysfonctionnements.

Plusieurs contraintes entravent le développement du secteur semencier au Sénégal. Elles sont aussi bien d’ordre institutionnel, légal, opérationnel que technique. Elles touchent tous les maillons de la chaine à savoir : (i) le développement des variétés ; (ii) le contrôle et la certification ; (iii) la production des semences de pré-base ; (iv) la production de semences de base et certifiées ; (v) la distribution et la commercialisation des semences certifiées.

Pour y apporter des éléments de réponse, le panel a fait le diagnostic et dégagé quelques pistes de réflexion et de recommandations pour juguler le problème en vue d’atteindre les objectifs d’autosuffisance alimentaire. Le présent document est une synthèse des recommandations du panel.

I – DIAGNOSTIC DE LA FILIÈRE DES SEMENCES

Les principales contraintes identifiées peuvent se résumer comme indiqué, ci-après.

1 – 1 – Conseil National Consultatif des Semences et Plants (CNCSP)

 Le Comité national concerté des semences et plants (CNCSP), institué par le Décret 97-603, ne joue pas convenablement son rôle du fait de sa composition et des manques de moyens. Cette situation contribue en partie à l’inorganisation des acteurs sur la planification. On note :

• Des manquements sur son état actuel de fonctionnement ces dernières années

• Absence de son contrôle dans l’introduction et la diffusion des semences étrangères selon les dispositions règlementaires (Règlement semences CEDEAO, Loi 94 81, Décrets d’application et Arrêtés)

• Absence de moyens humains et financiers pour remplir ses missions

• Absence de fonds semenciers • Absence de politique semencière au Sénégal

• Lenteur dans la diffusion des nouvelles variétés homologuées

1 – 2 – Recherche sur le matériel végétal

Au niveau de la Recherche, on peut relever :

• Absence de moyens humains, financiers et matériels pour les programmes de sélection végétale et de multiplication des premiers niveaux (G0 et G1) au niveau de l’ISRA ;

• Non financement des essais variétaux des semences horticoles importées par les importateurs et les commerçants, conformément à l’article 2 du 97-602 instituant le catalogue

• Non constitution de stock de sécurité des semences de pré base et absence d’infrastructures de conservation au niveau de l’ISRA.

1 – 3 – Le catalogue des plants et variétés institué par le Décret 97-602

La dégénérescence génétique marquée par une perte de productivité de nos vergers est accentuée par le manque d’informations :

• Les fiches techniques des variétés d’espèces fruitières manquent dans le catalogue national.

1 – 4 – Production des semences et plants par les organisations professionnelles

L’inorganisation des multiplicateurs de semences, le manque de formation et l’identification des vrais professionnels du système créent des désordres au niveau de la production. Il est constaté :

• Les organisations professionnelles n’ont pas intégré les pépiniéristes et les producteurs de plants horticoles ;

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• Absence de carte professionnelle des producteurs de semences comme prévue dans le règlement de la CEDEAO ;

• Les membres des OPS manquent de formation aux techniques de production semencières et de commercialisation ;

• Les multiplicateurs manquent de compétences techniques pour la multiplication des semences ; • Insuffisance des sociétés semencières ;

• Absence de financement adéquat pour la production de semences certifiées ;

• Nombre insuffisant de stations de conditionnement des semences pour le contrôle et la certification ;

• Absence des stocks de sécurité/calamité ;

1 – 5 – Contrôle et certification des semences et plants

Le SOC, maillon le plus important sur le système à travers le contrôle et la certification, n’arrive plus à jouer pleinement ses missions essentielles pour garantir des semences de qualité du fait que :

• Le nombre de contrôleurs semenciers est insuffisant au niveau des zones de production

• Absence de moyens humains, financiers et matériels au niveau des services officiels de contrôle et de certification (budget, moyens de déplacement, équipements de laboratoire, de bureau)

• Absence d’évaluation du système des contrôleurs agréés (article 29 Décret 97-616 et à l’Arrêté 11617 du 14 Mai 2019), en vue de son extension

• Absence d’information sur l’état actuel de la production des semences et plants d’espèces horticoles : Tomate, Bissap, Gombo, Oignon VDG et espèces plants fruitiers

• Manque d’identification des importateurs-distributeurs de semences et plants horticoles par le SOC, conformément à l’article 41 du Décret 97 616

• Les demandes d’admission au contrôle des OPS et les déclarations de culture de production de semences par les OPS ne sont pas faites à temps

• Inexistence d’une base de données actualisée sur les semences pour toutes les espèces végétales

1 – 6 – Commercialisation

Au niveau de la commercialisation, il est noté :

• Système fragile parce que dépendant essentiellement de l’état comme client principal et qui rétrocède aux producteurs à un prix subventionné à 50 %.

• L’achat de semences écrémées entraine des distorsions dans l’établissement des programmes de multiplication à cause des stocks de semences certifiées invendues.

II – PROPOSITIONS DE L’ASIA

De cette analyse diagnostique, des recommandations à court et long termes ont été formulées allant dans le sens de lever les contraintes qui plombent la filière semencière au Sénégal. L’atteinte des objectifs d’augmentation de la production agricole nécessite entre autres, la conduite d’une politique semencière de qualité, bâtie sur le triptyque « Production – Contrôle – Conditionnement », pour améliorer les rendements agricoles.

2 – 1 – Recherche

Compte des besoins spécifiques en semences de pré-base et des variétés hybrides des producteurs en rapport avec les campagnes (hivernage et saison sèche chaude) et pour éviter l’utilisation de semences tout venant (« ECREME »), faute de disponibilité de semences certifiées, des mesures sont à prendre :

• Donner une autonomie financière suffisante à l’unité de production de semences de l’ISRA pour lui permettre de produire les semences de niveaux prébase dans les délais requis (calendrier cultural).

• Renforcer la recherche variétale, en ressources humaines, financières et en équipements modernes afin de raccourcir les délais de création notamment par l’utilisation d’outils modernes (biotechnologie végétale, marqueurs moléculaires, etc.)

• Privilégier dans les programmes de sélection notamment, dans la fabrication de variétés hybrides concernant les espèces céréalières (mil, maïs, sorgho, riz)

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• Poursuivre l’expérience de production de semences de niveau G3 d’arachide avec le privé

2 – 2 – Diffusion des nouvelles variétés

En vue de fournir des semences de qualité et en quantité aux agriculteurs, des efforts sont encore à faire sur la diffusion :

• Pour les espèces horticoles, il faut systématiser le processus de contrôle et de certification par le SOC, avant la diffusion et la commercialisation des semences.

• Il faut reprendre la production de semences horticoles, notamment celles d’oignon et de pomme de terre comme cela se faisait avec le projet de production de semences légumières (PSL) de Sangalkam

• Impliquer d’avantage le Conseil agricole et rural dans le processus de diffusion des variétés nouvellement créées et homologuées

2 – 3 – Contrôle des cultures

Pour permettre le contrôle du système sur toute la chaîne des valeurs, il faudrait :

• Un renforcement du SOC en moyens humains, financiers, en matériels et en équipements

• Une extension du système de contrôle privé agréé, chargé des contrôles au champ, et l’étendre dans les autres régions, après évaluation du système

• Le SOC doit effectuer tous les contrôles nécessaires aux semences (stockage, commercialisation, importation et structures privés agréées de contrôle au champ) comme lui confère la loi et les règlements sur les semences,

• Des vignettes ou des attestations doivent être délivrés à tous les niveaux de contrôle, en application de la loi et des règlements sur les semences.

2 – 4 – Au plan institutionnel

Pour coordonner toutes les interventions des différents acteurs et apporter plus d’efficacité et d’efficience sur le contrôle et la certification, des mesures sont à prendre.

• Erection, dans les meilleurs délais, de la DISEM en une structure nationale autonome, avec ses propres démembrements dans les régions et départements. Aujourd’hui, le contrôle de la qualité des semences certifiées échappe totalement à la DISEM. Cette mission est logée au niveau des DRDR qui n’ont pas ni la compétence technique, ni la compétence juridique pour effectuer cette mission.

• Dotation de moyens humains, financiers et en équipement au CNCSP, pour lui permettre de jouer efficacement son rôle dans la planification, l’homologation, la diffusion et l’élaboration de la politique semencière du Sénégal.

• Nomination par arrêté du chef de Centre d’excellence d’examen DHS du Sénégal, hébergé par l’ISRA, pour assurer son autonomie administrative pour l’homologation des nouvelles variétés végétales sénégalaises selon le règlement de la CEDEAO, permettant aussi d’assurer la propriété intellectuelle des obtenteurs à l’OAPI. Il faut rappeler que les frais liés à la mise en œuvre des essais d’homologation de variétés végétales sont à la charge du Demandeur, toujours selon la réglementation.

• Insertion des professionnels formés en technologies semencières, sortant de l’ENSA et de l’UCAD, dans la filière des semences.

2 – 5 – Commercialisation et subvention

Pour juguler les contraintes liées aux dysfonctionnements de la commercialisation à une meilleure utilisation de la subvention, il est proposé :

• Élimination du terme « écrémées » dans le langage des semences. Ce terme porte à confusion alors qu’il ne signifie rien d’autre que « tout venant », de très mauvaise qualité. Cette catégorie ne doit plus faire partie de la subvention de l’Etat.

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• Révision des attributions de quota, dans les meilleurs délais :

• Tout distributeur/commerçant de semences doit être agréé et disposer d’une carte professionnelle • Les attributions de quota doivent s’arrêter au niveau des semences R2

• Le SOC doit contrôler les stocks lors de la commercialisation et de la distribution.

• Révision du système de rétrocession des semences subventionnées aux producteurs. En effet, aujourd’hui, les quantités reçues par les bénéficiaires sont insignifiantes, comprises entre 3 à 10 Kg/bénéficiaire.

• Elimination du système actuel d’affectation de 25% du programme de chaque opérateur à d’autres multiplicateurs.

• Révision du système de la subvention vers la réduction du montant, en adéquation avec la proposition de suppression des semences dites écrémées afin de pouvoir participer au financement du fonds semencier. Ce montant devrait faire l’objet d’arbitrage entre : (i) renforcer l’ISRA dans la sélection variétale et la production de semences des niveaux prébase (G0, G1, G2, G3), (ii) appuyer la DISEM pour lui permettre de mener correctement sa mission nationale, (iii) renforcer les structures de contrôle sur le terrain, (iv) équiper tous les points de collecte et les magasins de stockage de matériels de collecte adéquats et (v) appuyer le fonctionnement du CNCSP.

2 – 6 – Triage et conditionnement

Afin de garantir des semences de qualité, il faudrait :

• Mettre en place de véritables usines de semences, avec tous les équipements nécessaires au lieu de d’équipements fragmentés qui ne font qu’une partie du travail.

2 7 – Financement

Pour une bonne organisation de la multiplication des semences et de la collecte, les recommandations suivantes sont faites :

• Financement de la production des semences des niveaux prébase, de manière durable. Les fonds doivent être disponibles, en rapport avec l’exécution du calendrier culturel

• Financement de la collecte des semences au niveau des producteurs : l’achat des semences doit impérativement précéder la collecte des graines d’arachide d’huilerie. Les fonds doivent être disponibles avant les récoltes.

III – LES MESURES CLÉS

Les principales mesures à prendre se résument ainsi :

1. Autonomisation de la DISEM en une structure nationale autonome, avec ses propres démembrements dans les régions et départements

2. Mise en place du fonds semenciers pour appuyer le CNCSP, la DISEM et l’ISRA

3. Dotation du CNCSP en ressources pour assurer son bon fonctionnement

4. Autonomisation financière de l’unité de production de semences de l’ISRA

5. Mise en place d’un programme de production de semences légumières et d’un système de contrôle et de certification

6. Contrôle de l’introduction et de la commercialisation des semences horticoles importées

7. Application rigoureuse de la réglementation harmonisée sur les semences de la CEDEAO

8. Mise en vigueur, dans les meilleurs délais, l’obtention de la carte professionnelle à tous les multiplicateurs de semences pour l’exercice de leur fonction

9. Suppression des semences écrémées dans le programme de subvention

10. Révision de l’affection des quotas de multiplication des semences

11. Révision du système de distribution des semences au niveau des commissions

Association Sénégalaise des Ingénieurs de l’Agriculture (ASIA)

*Note soumise au ministre de l’Agriculture, de l’équipement rural et de la souveraineté alimentaire (Octobre 2022)







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