Site icon Senexalaat

Quelles Reformes Pour Sauver L’ipres Et La Css ?

Le récent scandale survenu à la Caisse de Sécurité Sociale (C.S.S.) portant sur 1,8 milliard de francs CFA (relayé par les sites seneweb.com le 6 juillet 2024, Dakaractu.com le 9 juillet 2024 et senego.com le 12 juillet 2024), doit provoquer un déclic pour le contrôle effectif de cette institution par l’Etat.

L’on se rappelle la révélation du site leral.net datée du 03 décembre 2021 sur un scandale de 6 milliards 500 millions FCFA pour l’achat d’un logiciel pour fusionner les deux entités (CSS et IPRES) afin d’avoir un système d’informatique unique et simplifié. A l’époque, le Secrétariat exécutif de l’UNSAS avait exigé « l’audit des deux institutions et un contrôle de la Cour des comptes afin de faire la lumière sur le financement du système d’information et les investissements dans l’immobilier. »

En 2018, les retraités avaient dénoncé un détournement de 572 millions de francs CFA au niveau de l’IPRES et demandé au Président de la République d’alors de protéger l’institution en prenant des mesures fortes (relayé par senenews le 08/10/2020).

Nous remarquons que malgré ces manquements récurrents et les alertes répétées des bénéficiaires et parties prenantes, l’administration de ces deux institutions reste préoccupante. La pression syndicale semble l’emporter, comme c’est malheureusement souvent le cas, quand il s’agit d’exigences de transparence et de reddition des comptes.

Les textes de la CSS et de l’IPRES

La CSS et l’IPRES sont régies par la loi N° 75-50 du 03 Avril 1975 relative aux institutions de prévoyance sociale.

En 1991, suite à l’adoption de la loi 91-33 du 26 Juin 1991, la Caisse de Sécurité Sociale change de statut et devient une institution de prévoyance sociale donc un organisme de droit privé chargé d’une mission de service public. Les statuts de la CSS ont été adoptés le 13 février 1992.

Les statuts de l’IPRES eux, ont été adoptés le 26 juillet 1977. A mon avis, ces textes sont complètement en déphasage avec les réalités actuelles en matière de bonne gouvernance, de pilotage des activités, de stratégie et d’instauration de critères de performance dans la gestion de ces institutions.

Il y a lieu de rappeler qu’un comité de pilotage chargé de formuler les orientations stratégiques et politiques du projet de réforme du cadre juridique de la sécurité sociale a été mis en place en 2015 par le ministère du Travail. Il s’agissait, entre autres, « d’innovations en matière de gouvernance des Institutions de Prévoyance sociale, de gestion technique et financière des branches et d’extension de la protection sociale aux travailleurs jusque-là non couverts ».

Les réformes attendues ne sont toujours pas réalisées.

La composition et le fonctionnement du Conseil d’Administration

L’IPRES est administrée par un Conseil d’Administration paritaire composé de vingt-deux (22) membres comprenant des représentants des membres participants et des représentants des membres adhérents.

Au niveau de la CSS, c’est la même configuration qui est retenue en termes de nombre (22) et de représentants.

Il faut noter que l’état employeur a quatre représentants au Conseil d’Administration de chaque institution au titre de la délégation des membres adhérents. Donc, les organisations syndicales ont un contrôle exclusif sur la gestion de ces institutions, notamment sur :

la nature des prestations ;

✓ les modifications du taux des cotisations ;

✓ la désignation des personnes chargées du fonctionnement de l’institution ;

✓ la gestion des ressources en matière d’investissements et de placement.

Le renouvellement des dirigeants, notamment du Président du Conseil d’Administration et des administrateurs n est pas systématique.

Pourtant, l’Etat, à travers la loi citée ci-dessus, notamment dans ses articles 21, 22 et 23, peut prendre des dispositions spécifiques pour garantir une gestion transparente et efficace de ces institutions afin d’éviter un risque systémique en cas de mauvaise gestion.

3. Les réformes

Les textes de ces institutions doivent évoluer pour permettre une bonne gouvernance avec la mise en place d’organes solides et de principes de transparence et d’éthique. Il s’agira de modifier le fonctionnement, la composition de l’Assemblée Générale et du Conseil d’Administration et de mettre en place des Comités spécialisés avec des compétences et expertises diversifiées, notamment :

Comité d’Ethique et de déontologie ;

❑ Comité d’Audit ;

❑ Comité de Sélection et de Rémunérations ;

❑ Comité d’Investissements.

En outre, un système d’évaluation des dirigeants et du Conseil d’Administration doit être mis en place et assuré par un organe indépendant.

Les réformes de ces institutions doivent toucher notamment :

✓ les conditions d’une protection sociale solide aux profits des travailleurs ;

✓ les modes d’admission et d’exclusion des membres ;

les obligations de toutes les parties prenantes ;

✓ le mode de constitution de l’assemblée générale et les conditions de vote ;

✓ la composition et le fonctionnement du conseil d’administration (mode de cooptation, renouvellement, durée, pouvoirs etc.) ;

✓ les pouvoirs de l’exécutif et le mode de sélection ;

✓ le mode de constitution et de calcul des prestations ;

✓ la constitution et l’emploi des ressources ;

✓ le mode de placement et de retrait des fonds ;

✓ les possibilités d’investissements ;

L’Etat pourrait prendre des dispositions appropriées et urgentes pour assainir et contrôler ces deux institutions avec les décisions majeures ci-après :

L’audit approfondi sur les cinq dernières années, avec un accent particulier sur les acquisitions immobilières, les placements, l’investissement dans les nouvelles technologies, la gestion des ressources humaines etc. ;

La suspension des organes délibérants ;

La mise en place d’une Administration Provisoire ;

La refonte des statuts et règlements intérieurs ;

La revue de la gouvernance : composition, fonctionnement et pouvoirs de l’Assemblée Générale et du Conseil d’Administration, mise en place de Comités spécialisés (Audit, Ethique et Déontologie, Sélection & Rémunérations, Investissements etc.)

Sidy Dieye est spécialiste en gouvernance et stratégie des organisations, Directeur Associé de Axley Bankers Afrique de l’Ouest, ancien Directeur Général de la Banque Islamique de Guinée, membre du MONCAP et Membre fondateur de l’Initiative 2FC.

sidy.dieye@gmail.com







Quitter la version mobile