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La NausÉe Du Surplace

La NausÉe Du Surplace

Des jeunes du Mouvement des élèves et étudiants républicains  (Meer) se sont opposés mercredi dernier aux gendarmes en charge de la sécurité, devant les grilles du Palais de la République. Frustrés de se voir exclus de l’audience avec le chef de l’Etat, ils n’ont pas hésité à souiller toute la charge symbolique de ce haut lieu de la puissance institutionnelle. A bien y penser, on pourrait,  si ce n’était pas là la traduction d’un retour de manivelle, s’étonner de  la tenue d’une telle réunion.

Ainsi mal en a-t-il pris au chef de l’Etat de s’entêter, contrairement aux recommandations et aux attentes exprimées par les Sénégalais, à diriger son parti, au lieu de s’en décharger au profit d’un de ses hommes ou femmes de confiance. En maintenant une telle posture, il semble oublier que ce qui est attendu de lui, c’est de se mettre au service exclusif d’une République irréprochable et non partisane. Pour autant, on peut subodorer que cette situation s’origine  dans ce qu’il est convenu d’appeler le syndrome du second mandat. Cette drôle d’obsession qui fait que dès son élection prononcée, au lieu de se savoir investi de la lourde mission consistant à trouver des réponses aux térébrantes attentes des populations, le nouvel élu s’empresse d’enjamber tout cela pour, tel un roi fainéant,  se focaliser sur comment assurer sa reconduction. Oubliant qu’il  lui incombe hic et nunc de créer les conditions favorables à un environnement à même de résorber le chômage qui frappe durement les jeunes, qu’ils soient diplômés ou non, de sortir le monde rural  d’un certain archaïsme qui le rend complètement dépendant de la saison des pluies, l’éloigne de l’électricité, de l’école, de l’eau courante, des soins de santé.

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C’est dire qu’une telle préoccupation plombe toutes les dynamiques de transformations et oblige plutôt à des compromissions de toutes sortes. Elle dicte surtout à s’asseoir sur des convictions de refondation exprimées lors de la quête de suffrages. Paradoxalement  l’objectif est d’assouvir, par tous les moyens, des ambitions personnelles et égoïstes. Et va pour la transhumance qu’on encourage en débauchant les adversaires d’hier. Va pour le recyclage du personnel politique qui se voit gratifier de ce qui peut s’apparenter à des emplois fictifs à travers nombre d’institutions érigées  à cet effet. Oubliées les mesures fortes  de redressement à prendre,  pour remettre les Sénégalais au travail, quoi que cela puisse coûter.

Aussi, est-ce le lieu, en cette période de commémoration du cinquantenaire de Mai 68, de rappeler la posture patriotique adoptée par l’ancien Chef d’Etat Major Général des Armée face à la grève des étudiants et des syndicats de travailleurs qui secouaient le Sénégal. A l’occasion de l’hommage qu’il lui avait rendu en 2011, à l’Ordre de Malte , le Pr Amadou Mahtar Mbow  révélait que dans une lettre adressée au président Senghor, le 2 juin 1968, le général Jean Alfred Diallo avait suggéré à ce dernier  les mesures urgentes à prendre pour tenter de juguler une situation quasi insurrectionnelle qui avait amené les autorités politiques à décréter le couvre-feu et l’état d’urgence.

En relisant les propositions de feu le général Jean Alfred Diallo ( réduction des dépenses de l’Assemblée nationale ; remaniement du gouvernement par le regroupement de ministères et la suppression de certains d’entre eux qui seraient remplacés par des directions en train d’en diminuer le nombre ; amélioration de l’efficacité de l’action gouvernementale par le renvoi des Ministres et Directeurs incompétents ; exclusion de tout dosage politique pour ne tenir compte que des critères de compétence et d’efficacité ; réduction des dépenses de réception qui entraînent de grosses dépenses et celle des déplacements à l’étranger ; réduction du nombre des Ambassades afin de réaliser des économies), on est saisi par la nausée. Tout ce qui a cours aujourd’hui est aux antipodes de ce qui était préconisé il y a 50 ans déjà. Aussi,  est-on submergé par un mal être face à un gâchis qui perdure  et qui à l’évidence,  oblige à reconsidérer le rapport que nous entretenons avec le pouvoir. Rapports d’autant plus problématiques que les valeurs qui ont cours se structurent grandement autour d’une conception qui réduit le bien public à un butin dont il faut s’accaparer.

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Et pendant ce temps c’est le pays qui trinque car les tenants du pouvoir et leurs affidés se croient tout permis, persuadés d’avoir contracté un bail avec l’impunité. C’est ce sentiment abject et indigne qui s’est encore exprimé mercredi dernier devant les grilles de la Présidence de la République. C’est ce sentiment qui continue de s’exprimer lorsqu’on travaille à privilégier le parti plutôt que la patrie, les amis, la famille, plutôt qu’à améliorer les conditions de vie des citoyens. C’est ce sentiment qui continue de prévaloir lorsqu’on embastille ou exclu du jeu politique les personnes qui ne sont pas en odeur de sainteté avec le pouvoir en place.  A cette allure, c’est à se demander « où va le Sénégal » ?

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