Si paradoxal que cela puisse paraître dans ce monde des évidences trompeuses, des dommages (dégâts) collatéraux dramatiques peuvent produire des conséquences bénéfiques. C’est le cas du drame de l’UGB avec la mort de l’étudiant Fallou Sène. En effet, des ministres tonitruants qui nous polluaient l’air à longueur de journée semblent subitement frappés d’une salutaire aphonie.
Il s’agit de l’encombrant ministre de l’Intérieur Aly Ngouille Ndiaye, le très généreux argentier du pays, qui se signalait tous les week-ends par des « khawaré » dans nos banlieues avec des deniers qui ne sont pas à lui, et, le très psychorigide- matheux qui croit que tout se résout avec des formules mathématiques, Mary Tew Niane. Depuis qu’ils sont la cible des étudiants de Saint-Louis notamment, ils sont silencieux. Et ça fait énormément de bien pour notre environnement social.
On respire mieux depuis qu’ils ont appris la modestie, et senti le sabre d’un président sous pression. Ce dernier est dans une opération désespérée de colmatage à tout-va de larges lambeaux d’une société qu’il se plaisaient hier à nous peindre, et à nous imposer un paradis qu’ils étaient seuls à vivre du fait de leur imposture posture. Ils la ferment et c’est tant mieux , jusqu’à que le bras de fer, entre le Prince du Palais et ses étudiants en colère et insoumis, penche d’un côté comme de l’autre.
Mais ce que cette apnée dans les abysses du silence dans les hautes sphères du régime montre et démontre, c’est le caractère archaïquement pyramidale de nos institutions. Le président est tout, le reste est un grand rien, hérité des grandes folies de l’ère Napoléonienne. Jusque dans le langage et le rendu, nos ministres étalent chaque jour leur inutilité : « son excellence, le chef de l’Etat, monsieur le président de la République, Macky Sall, nous a instruit »… et blablabla. La formule dévoile la surpuissance de l’institution « président de la République ». Elle envahit tout, avale tout, étouffe tout. Même, et surtout, la République.
Conséquences dramatiques : on laisse pourrir la crise scolaire et faire perdre la face au très arrogant et antisyndical (cela vient de son parcours) ministre de tutelle Serigne Mbaye Thiam. Ensuite on justifie au Premier ministre sa fonction de fusible, en l’envoyant tardivement tailler la bavette avec les syndicats qui, alimentaires qu’ils sont, préféreront de loin un « ndogu » généreusement mitonné et servi par une Première dame qui connaît parfaitement le rapport ombilical qu’ont les hommes avec la bouffe. Surtout la bonne bouffe. Les rondeurs (mes respects) de son président de mari en sont la preuve. On ne l’avait jamais vue celle là : la paix signé autour de notre bol national. Au fait, ils étaient à table (sic !) ou sur des nattes ?
Puis, survient le drame de Saint-Louis. On institue le paiement tardif des bourses pour des étudiants dont la survie et les études en dépendent pourtant pour une large part ; on habitue les forces de l’ordre à bouffer (pas seulement au dessert du tirailleur) de l’enseignant et de l’étudiant à la moindre fumée, on les autorise même à faire usage de balles réelles contre leur peuple. Des recteurs se drapent dans des habits policières en s’asseyant sur les franchises universitaires ; on autorise les responsables du Crous à affamer des étudiants qui veulent légitimement manger gratis en attendant leurs bourses et, ce qui devait forcément arriver arriva : la mort d’un étudiant à cause d’une chaîne de défaillances. Tous responsables, mais aussi coupables quelque part. Coupables d’un je-m’en-foutisme entretenu aux plus hautes sphères d’une République abîmée par des pratiques corrosives.
Il se trouve pourtant des analphabètes politiques et autres mange mil qui déclament péremptoire : « Ce n’est pas aux étudiants de demander le départ de ministres. » Les étudiants comme les autres Sénégalais en âge de voter ont élu un président pour qu’il améliore leur quotidien à défaut de changer leur vie. Ce dernier, fort de sa légitimité acquise par et dans les urnes, choisit les hommes et les femmes qui l’aident à répondre aux besoins de ses concitoyens. Si tel ou tel ministre faillit à sa mission on le dégage. C’est le fardeau quand on sert le bien public . Il n’y a pas de ministres indispensables. Ils ne sont pas meilleurs et plus méritants que les autres Sénégalais qui aspirent légitimement à servir leur pays.
Le silence épais qui entoure la descente aux enfers des étudiants de l’UGB est symptomatique de la nature des gouvernants : ils ont choisi leur survie à celle d’une grande partie des jeunes de ce pays. Un silence qu’ils viennent de dénoncer dans leur dernier communiqué : aucune nouvelle de l’enquête sur l’assassinat de Fallou, du gendarme supposé tireur, du Parquet de Dakar dont on se demande dans quelles tractations paralysantes il s’est fourré.
Oui, ces silences annoncent une autre tragédie : celle de l’oubli de « l’affaire Fallou Sène », comme toutes les autres affaires où la police ou la gendarmerie, sont impliquées d’une manière ou d’une autre.
PS : Il n’y a qu’une République défigurée et abîmée au plus point qui produit des énergumènes comme des députés peu honorables comme Moustapha Cissé Lô dont le jeu favori est de menacer le chef de l’Etat… Comme s’il le tenait « par la barbichette ». Ou cet autre délinquant, Birima Ndiaye, qui menace ouvertement de tuer les étudiants de Saint-Louis. Comme s’ils n’avaient pas eu leur lot de morts !
Oui, le président devrait rappeler à l’ordre Moustapha Cissé Lô, sous peine de passer pour un président sous « haute influence ». Et monsieur le Procureur, justifier votre fonction de « représentant du peuple » en mettant hors d’état de tuer demain ce fou qui déclare en public qu’il est armé et qu’il va tuer des étudiants qui, sont selon lui , sont « des fils de p… ». Pour moins que ça, le maire de ma commune, Barthélémy Dias, est à Rebeuss. Vous avez dit justice à deux vitesses » ?