Nous n’étions pas encore sortis de notre affliction après la disparition du saint Khalife El Hadj Mame Bouh Mouhamed Kounta ni, il y a quelques jours, de celle de son épouse Sokhna Mounina Ndamba Kounta, que le Maitre des destins rappelle auprès de lui, celui vers qui nos cœurs meurtris sont tournés en ces occasions. J’ai nommé notre frère, ami, collègue, un professionnel remarqué, Ahmed Bachir Kounta.
Porte-parole emblématique de l’illustre famille religieuse Khadre de Ndiassane, Ahmed Bachir Kounta avait tiré de son origine et de son itinéraire illuminés par la foi, une éthique du dévouement social faisant qu’il n’avait d’autre perspective ni d’autre horizon que de servir l’être humain.
On ne s’étonnera donc pas que cette icône des média électroniques publics sénégalais, ce porte-drapeau du désir de former et d’informer en restant véridique, équilibré et serein, ait été une véritable école du journalisme en langues nationales. Son aspiration suprême, à n’en pas douter, a toujours été d’être compris de tous afin de partager avec chacun le discours salvateur du respect réciproque et de la fraternité qui était son bâton du pèlerin.
Le pays a manifesté sa profonde gratitude à l’érudit pétri de modestie en faisant de lui un honorable Sénateur de la République. J’ai été, jeune élève et étudiant profondément marqué par la pratique du métier de journaliste, à la radio en particulier. J’ai été, dès mon jeune âge, bercé par le lyrisme, la rigueur dans le style et la justesse des mots de Pathé Dièye Fall, de Magib Sène et de Bachir Kounta, après avoir connu très brièvement les envolées de l’inimitable Allou. J’ai beaucoup appris sur le sport en écoutant ces trois journalistes que Bachir Kounta savait suppléer, parfois le dimanche, au stade. C’est vous dire que celui que nous venons de perdre était d’une culture vaste et d’une impressionnante érudition. Il le fut presque dans tous les domaines du journalisme.
Ahmed Bachir Kounta avait profité de cette station pour mettre son expérience inestimable et multiforme au service de la fécondation de relations humaines qui permettent de cimenter à tout instant et davantage les bases de notre Nation. Notre tristesse est certes incommensurable mais nous savons que tu n’es parti que pour occuper dans le Saint Paradis du Tout-Puissant la Place privilégiée qui est la tienne.
Bachir, comme on l’appelait affectueusement était un homme d’une élégance et d’un raffinement urbain marquant. Homme éduqué dans les pures valeurs de l’Islam soufi, il incarnait une ouverture qui en faisait un être vivant et agréable. Il savait flétrir avec compétence et clairvoyance tous les dogmatismes aveuglant, inclinant naturellement tous ses adeptes à l’intolérance…
Le Sénégal perd un passeur de culture fécondée dans une diversité impressionnante.
Repose en paix gardien du Temple des hautes valeurs spirituelles et morales !
Abdou Latif Coulibaly est ministre de la Culture