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Mais Où Est L’autorité De L’état ?

Mais Où Est L’autorité De L’état ?

De Wuhan en Chine plus précisément dans la province de Hubei, d’où est partie l’épidémie, un virus de la famille des Corona a contaminé en moins de trois mois plus de 300.000 personnes dans le monde et plus de 13.000 ont perdu la vie. La quasi-totalité des pays du monde est touchée, ce qui en fait une pandémie. Au tout début de la crise sanitaire, le réflexe primaire des pays européens, américains et même africains étaient de noliser des avions pour aller extirper leurs ressortissants de cet enfer coronarien qui était en train de consumer cette partie de la Chine. Même si certains pays européens en l’occurrence la France et l’Italie ont consenti à fournir des aides matérielles à l’Etat chinois, elles étaient loin de penser que deux mois après, le coronavirus baptisé Covid-19 par l’OMS se déplacerait chez elles au point de faire du pays de Dante l’épicentre de cette pandémie qui prend les allures d’une tragédie mondiale.

Ainsi, du 28 janvier où l’Italie a connu ses deux premiers cas à l’heure de la rédaction de , plus de 53 000 cas de contamination ont été officiellement recensés avec plus 4 800 morts. Il faut préciser que ce pays a connu son premier mort sur 20 cas de contamination le 22 février dernier. Et ce au moment où Wuhan, le berceau du virus, ne connait presque plus de cas local et de pertes en vies humaines. La Corée du Sud, qui a connu son premier cas le 20 janvier, a vu sa courbe de personnes contaminées s’aplanir dès le 10e jour de l’épidémie avant de décroitre littéralement à partir du 9 mars. Et sur un total de 8 897 cas confirmés à ce jour, 104 ont perdu la vie. Si ces pays ont connu des baisses drastiques par rapport au nombre de cas de contamination et de pertes de vies humaines en deux mois et demi, c’est dû essentiellement à leurs puissances logistiques, à l’autorité de leurs Etats, à leur capacité d’organisation, mais surtout à leur discipline.

A Wuhan et en Corée du Sud, toutes les mesures prophylactiques et prohibitives assorties d’une sanction pécuniaire forte sont respectées par les populations. Et pendant que le virus se propage à une vitesse exponentielle dans le reste du monde, l’Afrique, le continent le moins encore touché parce que tardivement affecté, semble être plongée dans un sommeil profond au point que l’OMS la secoue et la prévient d’une éventuelle tragédie humaine si des dispositions précautionneuses ne sont pas prises dare-dare. Au Sénégal, les autorités étatiques ont édictée des règles à suivre dans le respect scrupuleux des mesures-barrières, du respect de la distanciation sociale, des rassemblements publiques, de la fermeture de lieux de culte, des cérémonies religieuses. Nonobstant ces mesures salvatrices, il y en a qui font fi des interdits de l’autorité de l’Etat. Au nom de leur profonde croyance en Dieu, des confréries ont adopté une attitude de défiance vis-à-vis de l’Etat en se rendant dans leurs mosquées pour célébrer la prière de vendredi. Chose gravissime, le Kazu Rajab a été bien célébré à Touba et contrairement à la déclaration califale qui enjoignait les fidèles de célébrer la naissance de Serigne Fallou chez eux. Nonobstant l’injonction de la famille de Serigne Fallou, des fidèles ne se sont-ils pas rendus à Touba, ne se sont-ils pas rassemblés en masse dans les maisons hôtes pour magnifier la naissance du deuxième khalife des mourides ? Ainsi, les regroupements officiellement interdits ont été encore violés et pourtant l’Etat s’engonce dans une frilosité effarante en laissant certaines familles religieuses se comporter en hors-la-loi sans réagir énergiquement. D’ailleurs, l’image choquante de la République, c’est celle du secrétaire général du de la présidence de la République, Mahammad Boun Abdallah Dionne, qui a prié dans la mosquée de Touba en violation flagrante du décret qui interdit les rassemblements publiques en pareille occurrence. Et que les Sénégalais ne soient point étonnés, dans quelques jours, au retour des pèlerins qui se sont rendus à Touba pour le Kazu Rajab, qu’il y ait une explosion des sujets contaminés. Et au cas où les célébrants du Kazu Rajab dissémineraient le virus très présent en latence à Touba, nous tiendrons l’Etat responsable de non-assistance de personnes en danger.

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Aujourd’hui nous sommes embarqués malgré nous dans une guerre sanitaire qui, malheureusement, risque de faire plusieurs victimes si nous ne changeons pas nos comportements et si notre Etat continue de se coucher devant les marabouts qui ne sont pas au-dessus des lois. Ainsi, évoquer l’hypothèse de plusieurs morts dans un avenir ne résulte ni d’une fake news, ni d’un catastrophisme, ni d’une élucubration d’un oiseau de malheur sorti d’un roman d’épouvante, mais d’une simple rationalité : le taux de propagation du Covid-19 et son taux de mortalité sont afférents. 

Il faut qu’on cesse de se prendre pour un pays exceptionnel habité par les plus grands saints du monde qui, outre-tombe, vont nous protéger de ce virus qui ne met pas d’identité nationale sur le visage de ses victimes. Le Sénégal n’est point un ilot béni de Dieu. C’est un pays comme les autres avec ses tares, ses défauts et ses mauvaises habitudes. Au lieu de participer à l’effort moral de guerre en sensibilisant les populations exposées sur mesures à prendre, certains pseudo-prêcheurs, écumant les médias et s’étant autoproclamés gardiens de la morale religieuse, nous vrillent les tympans en considérant cette pandémie comme la résultante de la prolifération des péchés de l’homosexualité, de l’adultère, de la franc-maçonnerie, de la perte de la foi religieuse et tutti quanti. Et par conséquent, il faut accepter passivement cette punition divine qui nettoiera l’humanité de ses impuretés.  

Ailleurs, les autorités religieuses prennent part activement à la lutte. Ainsi, beaucoup de lieux de culte ont été fermés pour enrayer la propagation de l’épidémie. De Casablanca à la Mecque en passant par Jérusalem, elles ont appelé les fidèles à honorer les heures de prière à domicile. Le vendredi 20 mars, ces images resteront gravées dans nos mémoires : l’esplanade entourant la Kaaba, lieu le plus saint de l’islam, situé au cœur de la Grande mosquée de La Mecque en Arabie saoudite, était complètement vide. Le même phénomène était constatable à la mosquée Al-Aqsa, troisième lieu saint de l’Islam.

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Alors que chaque heure qui passe est précieuse pour lutter contre la propagation pandémique et éventuellement les morts, il semble évident que chacun a agi à son rythme. C’est ce dont témoignent les rassemblements dans les lieux de culte, la célébration des Magals, des mariages, des baptêmes, l’usage des transports urbains même s’il n’y plus de surcharge dans les cars et bus (il faut noter que la distanciation sociale de 1,5 m minimum n’y est pas de mise). Les mouvements sur le territoire sont encore trop nombreux et beaucoup constituent un vecteur de diffusion rapide du virus.

Au moment où le personnel soignant intrépide, la société civile responsable, l’association des imams et oulémas du Sénégal, certaines familles religieuses s’échinent à sensibiliser minute par minute les Sénégalais sur les dangers du virus, certaines confréries tiennent en toute conscience la prière de vendredi dans leurs mosquées respectives. En sus, le président de la République à qui tout le peuple a donné les moyens constitutionnels de veiller à sa santé fait preuve de faiblesse devant ces familles religieuses.

Avoir la volonté de freiner le virus ne peut marcher qu’avec l’adhésion de l’ensemble de la population aux mesures décidées. C’est effectivement dans ces moments de crise que l’Etat, dans la plénitude de son rôle, doit prendre ses responsabilités. En période de crise comme celle que nous traversons tragiquement, la puissance publique ne doit pas se situer dans la même temporalité que d’autres composantes de la société. Il doit aller au-delà et faire prévaloir son autorité sans crainte, sans faiblesse et sans discernement. En ce moment où le nombre de cas augmente de jour en jour, le président Sall doit agir vite en mettant en place un plan d’urgence assorti d’un confinement bien pensé et en faisant prévaloir l’autorité dont il est investi. Autant le faire vite sans tergiverser, sans atermoyer. Certes cela a un coût financier, voire humain. Mais puisque nous nous acheminons irrémédiablement vers un scénario-catastrophe, autant confiner les Sénégalais chez eux pendant plusieurs semaines pour endiguer la maladie pendant qu’il est encore temps. Il y a va du salut de 15 millions de Sénégalais.

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sgueye@seneplus.com







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