En dehors des aspects purement sanitaires, la pandémie à la Covid-19 a cette vertu de dévoiler, sur un mode fast-track, les mécanismes les plus occultes et les plus obscurs de la façon cavalière, dont nos autorités exercent le pouvoir.
En effet, le ministre de la santé nous certifiait, avant-hier, le 04 juin, que l’épidémie, était sur une tendance baissière en lieu et place d’oscillations du taux de positivité sur un plateau évoquée lors d’une émission radiophonique du dimanche 31 mai dernier. Aujourd’hui, son équipe d’experts vient de confirmer, à l’occasion de sa troisième conférence -bilan mensuelle, que le coronavirus était dans une phase de circulation active et qu’il fallait redouter une démultiplication des cas et des décès.
Le seul remède brandi par toute cette élite bien-pensante contre cette situation délétère semble être d’accabler les citoyens, coupables de légèreté et de négligence dans l’application des mesures préventives. On semble leur assigner le rôle de boucs émissaires pour toutes les défaillances de nos décideurs.
Quels que puissent être la pertinence et l’efficacité des gestes barrières, ils ne sauraient, à eux seuls, tenir lieu de stratégie anti-Covid.
Les contradictions, évoquées plus haut, entre un homme politique de la majorité, ministre de la République et des technocrates compétents mais tenus par le devoir de réserve, semblent tout simplement relever d’un conflit entre deux logiques.
La première technique, à laquelle on a reproché son hospitalo-centrisme, sa médicalisation excessive et sa verticalité, a permis d’engranger quelques acquis malgré toutes les contraintes extra-sanitaires provenant du pouvoir.
Elle semble avoir atteint ses limites et tend de plus en plus à vouloir changer de paradigme, en mettant davantage en exergue la responsabilisation communautaire.
L’autre politicienne dont les motivations ont trait à la consolidation de positions de pouvoir que la crise sanitaire pourrait remettre en cause. Elle n’a pas su fédérer les forces vives de la Nation, qui pourtant, avaient fait preuve de bienveillance à l’égard d’un plan concerté de lutte contre la pandémie.
Les autorités de notre pays, au lieu de saisir cette main tendue, ont préféré persister dans leurs errements habituels, en privilégiant une gestion solitaire, caractérisée par la précipitation et le manque de transparence. Pire, ils n’ont cessé de poser des actes clivants, mal perçus par l’opinion publique (marchés octroyés de manière discrétionnaire, absence de concertation avec l’Opposition et la société civile, atteintes aux libertés, arrêtés controversés sur l’honorariat, promotion de transhumants…).
Last but not least, ils n’ont pas su mener à bien le programme de résilience économique et sociale, ce qui a plongé de larges secteurs des masses populaires dans une subite précarité aggravée par un couvre-feu illogique et oppressant, surtout pour ceux qui résident dans des quartiers populaires.
Cela a provoqué des manifestations sur toute l’étendue du territoire national mais plus particulièrement dans les deux plus grandes villes de notre pays, d’où la nécessité de mesures d’assouplissement pour baisser la tension sociale.
Au total, malgré l’auto-glorification qui est la marque de fabrique de ce régime, nous constatons une poursuite inexorable de la propagation du virus, dans un contexte où la visibilité sur la prévalence réelle de la Covid-19 fait défaut, à cause de l’insuffisance des tests effectués.
Les mesures correctrices passent par la mise sur pied d’un large front auquel le pouvoir en place devra associer de larges segments de la Nation, en vue de rétablir la confiance et surtout de délibérer, de manière démocratique du plan de résilience économique et sociale.
Il s’agira d’évaluer le niveau de mise en œuvre de ce plan, qui prévoyait, outre 64,4 milliards au secteur de la santé, 100 milliards pour les secteurs les plus touchés, en plus des 69 milliards destinés à la distribution de denrées alimentaires.
Il faudra également discuter des modalités de son exécution pour renforcer les rubriques dévolues au dépistage des cas, à la prise en charge des cas graves, mais aussi à l’accompagnement des couches les plus socialement vulnérables.
L’implication réelle des forces vives de notre pays, préalable incontournable à un engagement communautaire bien compris, doit dépasser le cadre symbolique d’un comité de pilotage confiné dans le rôle peu valorisant de supervision de la distribution laborieuse et controversée de denrées alimentaires.
Cette évaluation pourrait, en plus de procéder à une révision consensuelle des stratégies de maîtrise de la pandémie, jeter les bases de réformes profondes des différentes politiques publiques.