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Plaidoyer Pour La Post-démocratie

Plaidoyer Pour La Post-démocratie

Tous les grands courants de pensée, qui ont marqué l’évolution de l’humanité depuis l’antiquité abyssinienne et égyptienne, ont connu leur apogée mais aussi leur déclin. C’est cela la loi de la bouillonnante nature cognitive de l’Homme qui, perpétuellement, construit, déconstruit et reconstruit. Pour son mieux-être matériel, moral, social et intellectuel…

Le modernisme, qui a débuté au milieu du 17ème siècle et qui fait de la science et de la technologie les seuls prérequis à même d’améliorer la condition humaine pour l’éloigner des difficultés du Moyen-âge, a été fortement contesté, voire détrôné, par le postmodernisme.

En effet, des penseurs postmodernistes, comme Jean-Paul Sartre, mettront à rude épreuve cette certitude pour, non pas, jeter aux gémonies la science et la technologie, mais plutôt pour insister sur l’importance de l’humanisme qui doit les encadrer pour éviter qu’elles ne deviennent « ruine de l’âme », pour reprendre Rabelais.

Le communisme et le capitalisme, que l’on pourrait considérer comme les deux doctrines les plus radicales, les plus intolérantes, les plus conquérantes du monde moderne et contemporain, au point d’avoir failli plonger l’humanité dans une troisième guerre mondiale, ont eux aussi subi l’érosion du temps et deviennent, progressivement mais irréversiblement, des coquilles plus ou moins vides. Et, inéluctablement, viendra le tour de toutes les formes d’intégrisme religieux, culturel et racial… Le temps étant le meilleur remède contre tous les excès de l’Homme…

Nous estimons que l’heure de la destruction/reconstruction a sonné pour l’autre rejeton de l’intolérance culturelle occidentale : la démocratie !

Présentée comme une panacée dans la gouvernance sociale des hommes, et abusivement appelée « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », elle doit, sans tarder, passer à la table d’opération pour que le chirurgien institutionnel des pays du Sud en général, et du Sénégal en particulier, l’ampute de son parti-centrisme, de son universalisme et de son unanimisme, pour la rendre homo-centriste, hétérogène, plurielle et locale.

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Tous les peuples du monde aspirent à la liberté raisonnable, à la dignité, à la paix sociale, et à la gouvernance inclusive, qui constituent les composantes quintessentielles de la démocratie. Et cela a été bien compris et pris en charge en Afrique par Sunjata et ses alliés, dans la Charte de Kurukan-Fuga en 1236. Bien avant la Révolution française de 1789

Mais pourquoi cette aspiration naturelle et toute légitime des individus et des peuples, devrait-elle se réaliser exclusivement par le biais d’associations privées que sont les partis politiques, dont certains sont dirigés par des autocrates qui piétinent les règles de gouvernance collégiale les plus élémentaires ?

Les partis politiques, qui sont plus de deux-cents-cinquante au Sénégal, sont devenus, pour la plupart, de véritables entreprises commerciales drivées par des activistes, des agents commerciaux qui n’ont qu’un seul et unique objectif : prendre le pouvoir le plus rapidement possible pour se sucrer !

Et tous les moyens sont bons pour réaliser ce rêve, devenu une véritable obsession aveuglante et débilitante pour certains dirigeants politiques. D’où le règne sans partage des « naaféq » (tortueux) sur les plateaux des télévisions et sur les ondes des stations de radiodiffusion. La langue fourchue ayant plus de valeur que le langage de vérité, les voleurs du peuple sont transformés en héros et lavés à grande eau, les légalistes en traitres et en menteurs, le peuple souverain en troupeau de gougnafiers bons à berner, les réalisations faites par ceux qui gouvernent en fonds de commerce ré-électoraliste.

Et ceux qui s’opposent à eux prient chaque jour leurs dieux pour que rien ne marche dans le pays, que le régime en place rencontre les pires difficultés, que les puits de pétrole et de gaz découverts explosent ou soient obstrués par une force invisible, que le peuple soit dans la misère la plus totale et se révolte pour que s’ouvre pour eux la voie qui mène au pouvoir.

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Voilà la démocratie multi-partisane à la sénégalaise, à l’africaine, mais importée d’Europe, depuis 1960, qui a lamentablement échoué parce qu’ayant ruiné le pays, spolié le peuple de sa souveraineté, et lacéré et avili le visage de la société sénégalaise naguère si mignon.

Il urge alors de balayer de la scène politique sénégalaise, africaine et mondiale cette forme de démocratie usurpatrice de la souveraineté du peuple, ainsi que le socle sur lequel elle est assise : les partis politiques, qui doivent mourir de leur belle et définitive mort. Pour que naisse une nouvelle forme de démocratie, participative et citoyenne, qui s’appuie sur un nouveau type de citoyen, à la fois républicain, légaliste et patriote, donc adepte du triptyque : République-Etat-Nation.

La post-démocratie n’est donc pas antinomique à la démocratie. Elle en conserve les fondamentaux, mais change de base, en s’éloignant du parti politique et des politicards pour s’appuyer sur la citoyenneté et les citoyens. Avec elle, les candidatures indépendantes remplacent les candidatures partisanes, les joutes électorales placent les rênes du pouvoir entre les mains des plus compétents et les citoyens retrouvent les champs, les ateliers, les chantiers, les bureaux et les salles de classes, après la proclamation des résultats.

Pour travailler pour faire avancer le bien commun : le pays.

Et ceux qui s’accrochent à la politique comme métier, iront à la retraite forcée ou finiront par en chercher un autre…

Pr. Gorgui DIENG

Etudes Africaines et Postcoloniales, UCAD

Pr Gorgui DIENG
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