Penser est le propre de l’homme .Tant que nous sommes nous pensons .En politique , il faut analyser les phénomènes , les situations objectives qui se présentent afin d’en tirer des conclusions .Pendant longtemps, le lien a été coupé entre gouvernants et gouvernés .Si les premiers dormaient sur leurs lauriers en croyant que tout était nickel, les seconds , eux , végétant dans la misère, et surtout éprouvant de l’amertume, attendaient que le déclic se crée pour exprimer leur ire et en découdre avec ceux qui sont responsables de la misère où s’enlise le peuple .C’est ainsi qu’une affaire des plus controversées, ayant occupé les débats de tous les coins et recoins du pays, permit de créer les conditions d’une révolte populaire, dont la spontanéité a, du reste, étonné plus d’un observateur .Les émeutiers ont lancé un signal fort , en détruisant tout sur leur passage , en s’attaquant aux domiciles des tenants du pouvoir et en détruisant des symboles de l’ancien colonisateur . Magasins et boutiques ont été vandalisés , et les produits et denrées alimentaires, qui s’y trouvaient, emportés. Quand la faim tenaille le corps , l’esprit ne fonctionne plus .Cette scène de misère qui rappelle les propos du Juge Keba Mbaye à Abdou Diouf trouve tout son sens: une jeune maman, l’enfant au dos , les yeux hagards , la démarche frêle et la mine déconfite , malgré des charmes de jeunesse pendant sur son visage innocent, s’introduisit dans le magasin Auchan de Soprim au milieu de la fumée et des jets de pierres , et ne trouva mieux que de s’approprier des sachets de lait et de sucre . Pensons-nous que si son bébé pouvait se nourrir correctement , elle prendrait un tel risque ? Non! Pensons-nous que si la misère n’avait pas atteint des proportions alarmantes, elle aurait franchi le Rubicon en subtilisant de la marchandise dans un océan de dangers?
Cette affreuse image qui n’honore ni l’humanité ni notre société doit nous amener à réfléchir sur le sens de la mission de l’État .En effet, lorsqu’un État ne peut satisfaire les besoins les plus élémentaires des citoyens , il n’a plus aucune légitimité .Il doit même disparaître et laisser la place aux plus compétents au risque d’installer l’anarchie .
Le cri de la jeunesse déboussolée et les lamentations du peuple meurtri ne sont pas tombés dans l’oreille d’un sourd .Aussi, un conseil présidentiel sur l’emploi et la réinsertion des jeunes s’est -il tenu .Mais , au lieu d’être un cadre et un intense moment d’échanges féconds et de discussions franches sur les questions du devenir de la jeunesse et, par ricochet , sur la problématique du rapport entre le pouvoir et le peuple , ce conseil a été une occasion pour remobiliser des troupes semblables à celles d’une armée mexicaine aux abois ayant reçu un coup de massue de la part de ses implacables adversaires. Le financement des jeunes , au lieu d’être en aval , a été en amont .Or , ce sont la formation et le civisme qui devaient y être en amont .Financer un jeune à coup de millions sans le rendre outillé pour développer son business me semble jeter de l’argent par la fenêtre .Il fallait exhorter la jeunesse à faire davantage de plus de patriotisme et de civisme .Le conseil devait être aussi une occasion de passer au peigne fin la condition difficile des ménages confrontés à la cherté des denrées de première nécessité et au coût exorbitant du loyer , surtout à Dakar où celui-ci est plus cher qu’à Padoue , en Espagne .Les jeunes et les révoltés, qui manifestaient, ont été surtout ulcérés par la cupidité et la spéculation des bailleurs autour du loyer . Pourtant depuis plus d’un an , nous nous sommes intéressés , nous autres citoyens avertis, à la problématique du loyer .Ce qui nous a valu d’être invités sur des plateaux de télévision .En outre , nous avons tenu une rencontre publique d’échanges autour de la question Mieux , nous nous sommes adressés au Cese à travers une pétition et une correspondance ; une telle initiative n’a pas été soutenue par les autorités dans la mesure où elle n’a fait l’objet que d’un simple rappel de la part du Président du Cese lors de l’ouverture de la session de ladite institution .La simple allusion du Président Idrissa Seck à cette revendication populaire légitime nous laisse perplexes quant à la volonté du pouvoir en place de résoudre les problèmes auxquels fait face le peuple .Pour autant , nous continuerons le combat sur le front populaire quitte à y laisser des plumes .
Félix Mboup