En Afrique, parler de tribalisme est un abus de langage. Ç’aurait été merveilleux si nos dirigeants pratiquaient un véritable tribalisme : ils auraient au moins réglé les problèmes d’une partie de la population. En vérité, la politique chez nous n’est pas une affaire de tribu, c’est une affaire de famille. La mort du maréchal Idriss Déby, et son remplacement quasi automatique par son fils, en est un indéniable révélateur. Idriss Déby n’est pas un cas isolé, même si on a appris avec stupeur que son clan détenait à lui seul tous les leviers économiques et politiques du pays.
Les méfaits de la parentèle
À une ou deux exceptions près, tous nos dirigeants sont vulnérables aux terribles méfaits de la parenté. La famille est une chose forte, une chose irrationnelle devant laquelle nous sommes tous impuissants. Surtout en Afrique où, nombreuse et impérative, elle se mêle de tout, décide de tout. Houphouët-Boigny savait ce qu’il faisait quand, dès le début de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, il a chassé ses enfants du terrain de jeu politique. À l’inverse, ce sont les méfaits du clan familial qui ont eu raison de Sékou Touré. Ce sont ses frères et ses sœurs, ses cousins et ses neveux qui l’ont réduit au rang vil de dictateur sanguinaire, lui qui fut la figure charismatique du « Non » à de Gaulle.
De plus en plus contesté aussi bien au sein du peuple qu’au sein de son propre parti, il crut bien faire, à partir de 1967 de remplacer et son parti et son gouvernement par sa famille avec les désastreuses conséquences que l’on sait.