Voilà ce qu’on lit dans la presse sénégalaise : « Le rapport de la Cour des comptes note que sur près de 1000 milliards de francs cfa prétendus destinés à la lutte contre le covid, 19 milliards ont été alloués à des dépenses comme l’achat de bacs de fleurs par le ministère de l’urbanisme, à l’attribution de 17 marchés affairistes à trois agences de voyages n’ayant aucune expérience dans la fourniture de matériels médicaux appartenant à la même personne pour un total de 15 milliards, le paiement en espèces d’une dizaine de fournisseurs alors que le règlement exige le paiement par chèque ou virement ».
A ces scandales sans nom, il faut ajouter les accusations de vols visant des caciques de l’APR/BBY de 6000 milliards, 300 milliards, 108 milliards, 94 milliards, 40 milliards, 29 milliards, 17 milliards, 500 millions, 76 millions de francs. Le cynisme de l’indécence est que le pouvoir Macky/APR/BBY a aussi récolté au nom de la « lutte contre le covid » près de 20 milliards de la maman vendeuse de tiaf (ndlr : arachide), de l’ouvrier, du goorgorlu (ndlr : travailleurs informel précarisé) du secteur informel, de l’éleveur, du pêcheur, du paysan qui se serrent tous la ceinture pour survivre.
Le bilan calamiteux de la mal gouvernance de Macky/APR/BBY épinglé par tous les corps de contrôle (OFNAC, Inspection d’Etat) s’allonge aussi des bradages aux multinationales impérialistes des richesses nationales minières, gaz, pétrole, zircon, fer, phosphates, or, etc, halieutiques, foncières à coups de marchés de gré à gré, de surfacturations, de dessous de tables, de sous traitances et d’externalisations mafieuses, etc.
En 1979 quand débuta les plans libéraux d’ajustement structurel imposés par la Banque Mondiale (BM), le FMI, l’OMC et les accords successifs de Lomé et l’actuel APE avec l’UE, il y avait environ 180 entreprises publiques et parapubliques qui ont été liquidées à vil prix au profit des firmes impérialistes surtout françaises par la dévaluation de 1994 du franc colonial cfa.
Cette recolonisation économique leur a offert quasi gratuitement les fleurons de l’entreprenariat national étatique que sont les télécoms, l’eau, le rail, le port, la fin d’Air Afrique avant de leur céder pour des vétilles les nouvelles découvertes minérales dont la Constitution dit qu’elles appartiennent au peuple, les poissons, la terre. Puis l’on a assisté au cumul de « grands travaux » laissés aux soins des entreprises impérialistes, de vrais éléphants blancs avec parfois des malfaçons réalisés à coups de contrats léonins et de surfacturations.
De 1960 à 2022, chaque régime néocolonial a aussi parallèlement fabriqué sa propre bourgeoisie privée par l’appropriation privée de l’argent public par la bourgeoisie bureaucratique juchée à la présidence, dans les ministères, les institutions budgétivores, les sociétés agences publiques et parapubliques, etc.
Si sous Senghor, les détournements des deniers publics se comptaient en dizaine de millions, sous A. Diouf en centaine de millions, sous A. Wade en dizaines de milliards, sous l’ère de Macky, c’est en centaines voire en milliers de milliards de francs cfa.
La boulimie vénale insatiable de l’hyène bourgeoise bureaucratique à la tête du pays qui s’approprie la petite part des richesses nationales après avoir concédé la part du lion à ses maîtres impérialistes est une caractéristique intrinsèque du système néocolonial façonné lors de la décolonisation négociée des années 60.
C’est l’aggravation de la crise de l’impérialisme et ses prolongements dans les néo-colonies qui est la base économique de la fascisation en cours du régime de Macky/APR/BBY qu’illustre l’obsession maladive fanatique d’une troisième candidature anticonstitutionnelle. La superstructure politique qui facilite cette fascisation est le présidentialisme néocolonial qui confère au président des pouvoirs qui lui soumettent les pouvoirs judiciaires, législatifs, etc.
La bourgeoisie apatride a tout simplement, au fond, pris la place des « nègres traitants » comme nouveaux intermédiaires entre les ouvriers, les paysans, les éleveurs, les pêcheurs et travailleurs de l’informel et les entreprises coloniales en accédant à la tête des États néocoloniaux.
L’actuel réveil du patriotisme panafricain associe dans un élan souverainiste les classes opprimées de la fraction nationaliste de la bourgeoisie, de l’intelligentsia patriotique aux classes laborieuses, celles qui produisent les richesses du pays contre cette fraction servile de la bourgeoisie alliée aux impérialistes prédateurs.
Cette alliance patriotique qui rappelle celle qui a donné naissance en octobre 1946 au Rassemblement Démocratique Africain (RDA) à Bamako lors de la première phase de la lutte indépendantiste anti-coloniale est en train de se frayer un chemin dans chaque pays pris à part sous des formes inédites civiles et/ou civil-militaires dans cette seconde phase de libération anti-néocoloniale en Afrique.
25/12/22
Diagne Fodé Roland