Le choix du président est encore une énigme. C’est une cuisine interne à Benno et à l’Apr. Aucune immixtion étrangère dans le processus n’a lieu d’être. Chacun à sa place et les vaches seront bien gardées. Mais il y a un bémol. L’Apr ne s’appartient plus tout à fait tant qu’elle est aux affaires. On peut donc s’autoriser un petit grain de sel. Délivré le 3 juillet dernier, le message à la Nation du chef de l’Etat a reçu, du dedans comme au dehors, une ava- lanche de félicitations. Quarante-huit heures avant le discours de clarification, une question pas anodine a fusé au cours d’une audience du président avec les maires et pré- sidents de conseil départemental de même obédience. Dans quelles mains tomberons-nous si le général quitte ses troupes ? Avec qui vous nous laisseriez ? L’angoisse de Thérèse Faye Diouf s’est justifiée devant la réalité faite de peu de certitude et de lisibilité. Aucun leader naturel ne s’est imposé à côté du grand manitou resté « la seule constante » comme on disait dans l’ancien monde. La préparation obstinée d’un continuateur incontestable et incontesté n’a pas été soigneusement orchestrée pour que tout soit éclairé et ordonné comme du papier à musique à l’heure du choix.
Une primaire qui ne dit pas son nom
Le grand oral des impétrants auprès du patriarche Moustapha Niasse est un aveu. Il y a bel et bien une forme d’atermoiement. Tous des hommes sans l’ombre d’une femme, peut-être nés sous une bonne étoile, ils ont été soumis à un protocole pour voir l’élève le plus appliqué et peut-être même le moins perfide. Par ce procédé, les prétendants ont été en vérité quelque peu ballotés pour ne pas dire infantilisés. Dans cette primaire qui ne dit pas son nom, le miracle sera d’en sortir indemne et sans bobos. L’Alliance pour la République a beaucoup de mérite. Elle a établi en 2012 une performance de taille en coiffant sur le poteau les apparatchiks libéraux et socialistes. Ce serait un grand gâchis s’il avait le destin du météore. Cette formation politique doit absolument survivre à son chef. Ses divisions intestines attestent d’un manque d’instinct. Elles font dire qu’elle n’a jamais su être une véritable famille politique. La 3ème alternance viendra de ses turpitudes et déchirements. Après tout, ça ne sera pas une mauvaise nouvelle pour la démocratie qui va respirer. Comment comprendre que la plupart de ses délibérations finissent en quiproquos ? Les apéristes n’ont toujours pas compris que les organisations s’enrichissent de diversité et de talents qui s’acceptent sans se jalouser. En l’absence d’altruisme et de discipline, il ne faut pas s’étonner qu’en interne l’autocratie pulvérise la démocratie. D’où la trouvaille bien com- mode du blanc-seing, la carte blanche pour ne pas faire chou blanc et faire ensuite les choux gras de la presse à sensation.
Le parti n’est pas rempli d’apparatchiks
La plus grande surprise chez les marron-beige, c’est la multiplication comme des petits pains des candidats à la candidature. C’est le choc des égo à la place du choc des titans. On voit certes des profils relativement teintés de lucidité, mais à côté les ambitions paraissent extrêmement démesurées. L’envergure et le physique de l’emploi sont indispensables. Le manteau de président est trop long pour la plupart dans le quintet annoncé après l’enterrement de première classe du 2ème quinquennat. La cour d’honneur du palais requiert du beau linge. Pas un linge sale qu’on lave sur la place publique. N’est pas président qui veut. Le Sénégal n’est pas prêt d’ac- cueillir n’importe qui à sa tête qui finira par se perdre dans les méandres de l’Etat.