Vous avez été nombreux à réagir à ma chronique sur les mendiants conforté en moi l’idée qu’il y a des maux, hors du mesquin tintamarre politicien, qui suscitent l’engouement de la population civile. Ces maux voilés par une piteuse condescendance des autorités et hommes politiques partisans, ont besoin de mots réconfortants, tranchants pour les mettre à nu afin que nul n’en ignore.
La seule réponse du citoyen à l’indécence est le refus doublé d’indignation
Aujourd’hui j’ai pour motif un fait grave, inacceptable, dont les images hideuses circulent sur les réseaux sociaux, consistant en un charretier qui soulève sa charrette et la fait traverser les lignes interdites du BRT, entravant ainsi le passage du Bus de transit. Voilà donc un quidam qui, d’après celui qui a pris la vidéo, répète son forfait de plein jour chaque fois que l’envie lui en prend, sans coup férir. L’auteur de la vidéo que je remercie au passage, interpelle l’indifférence des policiers. Cependant, le dilemme du policier qui fait de lui un démissionnaire est qu’il se sait démuni face à un attelage de cheval et charrette encombrant, conduit par un cynique charretier qui s’en donne à cœur joie de son impuissance en le narguant.
Par contre dans le décor, on aperçoit des citoyens contrariés qui, comme anesthésiés, observent avec désolation, alors qu’il leurs aurait suffi de se lever et faire barrage pour empêcher cette forfaiture de s’accomplir. Imaginez la différence s’ils avaient eu le comportement convenable, quel impact aurait eu une vidéo d’une telle scène pour le civisme, le patriotisme et le courage. Face à l’indécence dans l’espace public, tout acte du citoyen en deçà d’un refus indigné catégorique est un déficit ou une trahison des normes et vertus civiles inhérentes en nous-mêmes.
La jeunesse responsable est partie prenante d’un pacte de maintien des acquis.
Sur un autre aspect, l’incroyable paradoxe de cette scène réside dans les acteurs en cause, le lieu et le temps.
- Les acteurs : de vigoureux jeunes passants ou habitants du voisinage,
- Le lieu : il est le même que là où s’est déroulé plusieurs fois de suites des affrontements sanglants entre la jeunesse et les forces de sécurité et de défense
- Le temps : l’espace-temps entre l’un et l’autre événements relatés n’est que de peu de mois.
Donc en rapprochant des événements qui se sont déroulés dans un même lieu en l’espace d’un an à peine, avec les mêmes acteurs, nous essayons de comprendre le bon sens et la raison des actes posés.
Quand les jeunes risquaient leurs vies face à des gendarmes armés n’était-ce pas pour une meilleure qualité de vie promise par leur leader ?
Ces infrastructures en train d’être vandalisées devant ces mêmes jeunes des mois plus tard ne participent-elles pas à cet objectif de meilleure qualité de vie ?
La même personne qui se joint aux foules au péril de sa vie, au gré de l’appel d’un leader, n’est pas prête à lever le plus petit doigt à l’encontre d’un délinquant à ses œuvres, devant sa propre demeure. Voilà la triste révélation.
Non ! Ce n’est pas ce qu’on attend de cette jeunesse capable de beaucoup de choses. Il lui faut nous servir autre chose de mieux, donner un sens civique à son engagement et avoir le courage patriotique d’engager des actes spontanés de solidarité de maintien des acquis, dans l’espace public. Il n’est besoin d’aucune organisation préalable pour ça, il suffit de peu de gens qui l’exercent pour que le processus dit du “cercle d’expansion” fasse le reste et répande partout la nouvelle norme. Les jeunes doivent à présent prouver que leur mobilisation n’est pas un inconditionnel acquis à une stratégie de patriotisme aux relents de populisme, dépourvu d’appel à la raison. Le patriotisme c’est aussi prendre ses responsabilités selon ses convictions et principes dans la discrétion, sans triomphalisme. Lorsque par exemple on est quatre jeunes vigoureux en train de deviser au coin d’une rue et qu’un délinquant se mette tout d’un coup à vandaliser les ouvrages publics, attendre la police n’est pas une option, il faut le mettre hors d’état de nuire avant que les dégâts ne s’aggravent.
Ceci dit, pour solutionner ces incivismes lamentables, il appartient à l’État de mettre ses agents à l’abris d’une submersion par tout type de délinquance, en les dotant de moyens performants. Par exemple, face à ces charretiers, qui ne tiennent leur aberrante réalité au cœur de notre capitale que de la défaillance chronique des autorités, les moyens performants pourraient consister en maîtres-chiens en circulation, menottes pour tous les policiers afin qu’ils puissent dans pareils extravagances, menotter le charretier à son attelage le temps qu’un remorqueur vienne les conduire en un lieu idoine.
Cet appel à la responsabilité est une invite à de l’environnementalisme et à une stratégie d’épanouissement durable, en réponse à la stratégie de chaos gratuit ambiante.
Ibe Niang Ardo est président du Mouvement citoyen Jog Ci.