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Un Sénégal émergent Par Un État Efficient …

Un Sénégal émergent Par Un État Efficient …

Aujourd’hui, nous abordons la planification dite globale qui traite de l’efficience de l’État en tant qu’appareil d’exécution (c’est à dire sa performance ou sa capacité de rendement).

Ainsi, après la question de la pertinence des fondements des politiques publiques par une prise en compte des réalités spatiales, vient l’étape du questionnement du  niveau de performance de l’appareil chargé de la mise en œuvre des politiques publiques.

D’ailleurs, ce défi de la mise en œuvre des politiques publiques est au cœur de l’actualité sénégalaise, avec le lancement du Plan Sénégal Émergent. Ce Plan, comme tout document de politique économique et sociale, témoigne de l’aspiration du pouvoir en place à vouloir sortir le pays de la pauvreté.

Ainsi, l’émergence de notre nation est une rampe sur laquelle nous aimerions voir le Sénégal s’élancer et prendre de la hauteur. L’idée serait d’atteindre une vitesse de croisière qui nous permettrait d’avoir une croissance  à deux chiffres et ainsi sortir les populations de la zone de tourmente d’une économique plate, qui vole bas et à tel point que l’inflation et la croissance démographique suffisent à phagocyter ses rendements. Mais, force est de constater que ce plan d’action stratégique pour une émergence de notre chère nation suscite un questionnement technique portant sur l’ingénierie de la planification, le défi de la mise en œuvre et la volatilité des leviers de financement utilisés. Le plus préoccupant est qu’au-delà des doutes liées à son efficacité  (C’est à dire l’aptitude à produire un résultat utile où attendu, nous y reviendrons dans le dernier volet traitant de la planification stratégique), il y’a lieu, avant tout, de s’interroger sur la capacité de rendement de l’organe, en l’occurrence l’État qui en charge de l’incubation, de la formulation et de la conduite de la programmation stratégique. Pour ma part, je demeure convaincu que l’efficience de l’État (niveau de performance et de rendement) en tant qu’appareil exécutif, est un préalable à la réussite de tout plan stratégique. Autrement dit, la capacité de mise en œuvre de l’appareil étatique, ses mécanismes, ses organes et sa logique de gestion sont les premières sources de réussite ou d’échec de ses programmes et projets d’actions publiques. Derrière cette remise en cause du niveau d’efficience du pouvoir exécutif, se trouve l’enjeu décisif d’une rupture  annoncée dans la gestion des affaires publiques. Toujours dans une approche objective, constructive et technique, nous allons démontrer qu’une planification globale de l’appareil étatique est la voie royale qui mène  un gouvernement à l’efficience et à l’efficacité de son action.

La conscience collective a souvent tendance à percevoir l’État comme l’incarnation de la puissance brute. Il est vrai, et je dois le concéder, que l’État a toujours détenu le monopole de la violence légitimée, ce qui explique cette conception et ce rapport entre l’État et les populations. Mais attardons-nous sur l’entendement que nous avons de ce pouvoir que l’on nomme L’EXÉCUTIF. Le pouvoir exécutif fait référence à l’aptitude méthodologique et technique d’arriver à des résultats souhaités par une exécution planifiée de l’action publique dans le seul et unique but de fournir aux populations un niveau, un milieu et un cadre de vie attrayant.  L’exécutif est lié  à l’action, une action qui n’est pas uniquement de la force ou de la puissance, mais de l’ingénierie et de la technicité, c’est-à-dire la compétence à pouvoir sonder la demande sociale, à planifier la vision politique et à exécuter les plans d’action.

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Un État doit être performant et cela passe nécessairement par une structure organisationnelle adaptée, des mécanismes de coordination efficients et une méthodologie de management des ministères publics adaptée aux réalités et à l’agenda des secteurs concernés. La Planification dite globale est ce processus par le lequel l’État se restructure, s’adapte et s’organise pour atteindre le niveau rendement nécessaire à  l’efficacité de son action gouvernementale. De ce fait, elle adopte une lecture verticale qui part du sommet jusqu’aux structures décentralisées, déconcentrées et d’autorégulation. Cette logique planificatrice pose la question de la pertinence des artéfacts de la gouvernance, de l’efficience organisationnelle et de l’usage des ressources publiques. Par voie de conséquence, la planification globale améliore la pertinence des règles et procédures, les moyens de contrôle et d’évaluation et les mécanismes de transmission. Mais, la plus bénéfique de toutes ses retombées est la détermination du cadre de gouvernance qui s’adapte à chaque typologie de département sectoriel. Dans son approche structuraliste, la sociologie de l’action publique, permet d’identifier trois idéal-types de  management sectoriel que tout État qui se veut performant se doit de différencier et d’appliquer de manière circonstancielle.

1-Dans un premier temps, nous avons la forme classique d’une structure de gestion directe où l’État conserve toute la responsabilité de l’action et l’exerce pleinement, comme dans les secteurs de la sécurité publique, de la défense, de la diplomatie et des finances publiques (notamment dans son volet contrôle). Ce type de gouvernance directe et unilatérale des hommes est tout à fait adéquat pour la sauvegarde des intérêts de l’État. Malheureusement, au Sénégal c’est ce type de commandement qui est bureaucratisé à outrance et généralisé à l’aveuglette dans des domaines de compétence qui ont plutôt besoin de dynamisme et d’interactivité. On ne peut gérer tous les ministères de la même manière bureaucratique et unilatérale. Certaines compétences ont besoin d’être déléguées et d’autres secteurs ont besoin de s’autoréguler. De ce fait, cette ignorance des spécificités de certains départements sectoriels, fait que l’État devient lui même un frein au développement et à la croissance.

2- La seconde typologie concerne les compétences qui nécessite une proximité avec la population et dont la planification doit se faire au niveau territorial. Ainsi, pour mieux apprécier leurs services, l’État permet aux localités de pouvoir choisir l’équipe en charge de leur développement, leur confère de la ressource et surtout l’autonomie de juger de l’opportunité des options de gestion des affaires locales : c’est la Décentralisation. Cependant, au Sénégal l’autonomie n’est pas la raison du partage de pouvoir, mais plutôt un maillage politicien de l’espace national. L’État demeure un éternel jaloux de ses prérogatives et les exceptions faites au contrôle de l’égalité en sont la preuve. Je veux dire par là que par principe une collectivité locale a une autonomie de gestion et l’État doit se limiter à contrôler la légalité des actes de gestion. Mais au Sénégal, l’État peut aller au-delà de la conformité administrative et peut exercer un contrôle sur l’opportunité des options de gestion. Ainsi, aller au-delà du contrôle de légalité est un frein indiscutable à la décentralisation sénégalaise, sans parler de la fiscalité bancale, de l’absence de viabilité des collectivités locales et du fait que les populations ne peuvent choisir directement leur maire (notre décentralisation est à l’image de l’adage populaire disant : « qu’on te donne une tête dont on a soustrait la langue »).

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3- La troisième et dernière forme de management sectoriel, l’autorégulation,  est presque inexistante au Sénégal. L’idée qui la sous-tend est que l’état n’a pas à dicter les règles, ni à choisir les exécutants et encore moins à être un acteur effectif et actif du système. L’autorégulation est assurément la forme de planification globale  la plus à même d’entraîner une croissance durable. Ces secteurs ont besoin avant toutes choses d’indépendance et d’autonomie. Car leurs agendas, leurs dynamiques et leurs principes directeurs sont différents des logiques administratives et bureaucratiques. En effet, l’analyse par l’instrument (sociologique de l’action publique) a démontré que l’État peut disposer d’autorité d’autorégulation  dont la mission essentielle est de créer des espaces de concertation et d’harmonisation au sein des territoires, de faire remonter ses règles, qui seront ensuite entérinées par l’autorité étatique et de permettre aux organismes d’exécution de faire respecter  les réglementations. Je citerai deux exemples : la justice et l’économie. Respectivement, il faut de l’indépendance et de l’autoréglementation pour assurer à ces deux secteurs le niveau d’efficience acceptable. C’est pour cela que je ne peux pas cautionner qu’on dise que nos hommes de droits refusent l’indépendance. En réalité, le système n’est pas fait pour et je puis vous assurer que si les exigences de progression, les évolutions de carrières, les mécanismes d’affectations et surtout les réformes du système obéissaient à des mécanismes internes de concertation et d’autorégulation par les acteurs du système de la justice, vous les verriez à pied d’œuvre et  prendre leurs responsabilités de manière totale et entière sur tous les dossiers.

Pour ce qui concerne l’Économie, nous allons prendre l’illustration de la planification structurelle du  système financier canadien à travers le secteur du commerce des valeurs mobilières. Ici, les professionnels en fonds d’investissement et fonds communs de placement sont regroupés en commission provinciale (territoire). Ce premier palier provincial est le niveau de régulation et de contrôle qui assure un assainissement continu du milieu financier canadien. Ensuite, on a le palier supérieur, l’autorité canadienne des valeurs mobilières, qui est constituée de l’ensemble des commissions provinciales. Ainsi, on s’y regroupe pour discuter des règles, des améliorations et on y crée un cadre d’autoréglementation ou d’autorégulation suivant les principes du libéralisme économique, mais adossé sur l’intérêt national. Les résultats de ces conclaves d’autorégulation seront transmis au pouvoir central et promulgués en lois et règlements. Et, c’est à  partir de ce moment qu’intervient l’organisme étatique (ici fédéral) en charge du respect de la réglementation. En somme, le système financier canadien est un modèle ascendant et descendant fondé sur le principe d’autorégulation et c’est cela qui fait sa force et sa stabilité. J’en veux pour preuve qu’à la suite de la crise de 2008 et que la rencontre de Bâle, en Suisse, fut convoquée pour réfléchir sur comment faire pour ne plus en arriver à cette situation, l’essentielle des dispositions arrêtées existaient déjà dans la réglementation des institutions financières canadiennes.

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Cependant, malgré ces idéal-types de régulation sectorielle bien différente, la notion de la territorialité s’applique à chacune d’elle sans exception. Qu’on parle de déconcentration, de décentralisation et d’autorégulation, la prise en compte de la dimension territoriale reste une nécessité pour la pertinence de l’incubation et la justesse de la formulation pour une conduite de projet satisfaisante.

Notre étude des formes de planification étatique nous a montré la nécessité pour l’état du Sénégal de marquer une pause est d’adopter une logique planificatrice. Un État doit être performant et efficient avant de se lancer dans la programmation stratégique (sujet que nous aborderons dans ma prochaine publication).

La planification spatiale que nous avons vue dans l’article précédent permet à un état de penser le développement de la nation depuis ses territoires et d’éviter l’impertinence d’une vision politique. En complément, la planification globale définit une structure, une organisation, des mécanismes et une approche de management sectoriel adapté aux spécificités intrinsèques des secteurs concernés.

Ainsi, par la planification globale, l’État répond à son exigence première et ultime d’être un appareil efficient. Car un État non efficient serait la première source de sous-développement pour une nation pauvre telle que la nôtre.

En résumé, les formes de planification que nous avons abordées jusqu’ici, permettent de jeter les bases saines d’un appareil étatique doté d’un niveau de conscience et d’efficience élevée et d’une rapidité d’exécution à même de noyer et d’éjecter tout élément qui ne disposerait pas des moyens de répondre aux exigences d’efficacité du système.

Seul un État peu ambitieux et peu exigeant peut tolérer la médiocrité et l’inefficience, car le bon sens voudrait que les artefacts de la gouvernance, les structures d’État, la législation et les règles bureaucratiques, ne puissent pas être des freins à l’évolution et à la croissance des différents secteurs d’une nation pauvre. Conscient de cette responsabilité et par voie de conséquence, on en déduit que l’appréciation du train de vie d’un État, la réduction des directions ou des agences, le nombre de départements ministériels, l’organisation interne de chacun de ses départements sectoriels, toutes ces choses banalisées par des mesures légères, doivent, en réalité, faire l’objet d’une planification globale adossée sur une planification spatiale.

Ce procédé aurait permit à la PSE, cette planification stratégique pour l’émergence de notre nation d’être un peu plus cohérente et surtout de se formuler depuis les territoires constitutifs de l’espace national. En attendant d’aborder la logique, les fondements et l’ingénierie d’une planification dite stratégique, retenons que le niveau d’efficience d’un pouvoir exécutif se mesure à l’ingénierie et à la technicité qui sont à la base de sa conception.

 

Moussa Bala Fofana

 

Moussa Bala FOFANA

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