« Que ça plaise ou non, l’opposition doit subir ma politique.» Dans un Etat démocratique digne de la démocratie et des principes qui la fondent, ce genre de propos ne devrait pas relever du vocabulaire usuel d’un Président de la république soucieux de prévenir les risques de fractures dans la société dont il est le chef. C’était ce jeudi à l’occasion de l’installation du Présidium du «Oui» au référendum du 20 mars prochain.
Mais c’est peut-être pour acter ces cassures dans le tissu national, devenues trop visibles, que le chef de l’Etat s’est lâché ainsi au milieu de ses alliés, entrant en totale contradiction avec sa démarche visant à donner à cette même opposition un statut constitutionnel avec les réformes soumises au peuple.
Au milieu de ses partisans de la majorité présidentielle, Macky Sall, initiateur d’une consultation populaire arrimée à son agenda politique personnel, a assumé sa rupture avec une partie du peuple électeur en institutionnalisant la fuite en avant entrevue dans son discours de reniement du 16 février.
«Aujourd’hui, nous voici ensemble, dans la cohésion et l’enthousiasme, vers la révision constitutionnelle consolidante la plus profonde de notre histoire depuis le retour au multipartisme.» Ceci reste à vérifier. Ce qui est certain par contre – et les constitutionnalistes et intellectuels encore lucides s’entendent là-dessus – c’est que c’est sous le magistère du Président Sall que le Sénégal entreprend d’organiser le référendum le plus clivant de son histoire politique contemporaine. La faute à un homme en quête de prestige et incapable de s’en donner les moyens, sinon il n’aurait jamais manqué le rendez-vous historique du 16 février 2016 !
«Nous avons la force et la puissance des idées, nous avons des jeunesses et des femmes debout et déterminées, nous avons un peuple généreux et averti. Nous sommes le pôle des intérêts du Sénégal. Nous sommes le pôle de la vérité.» Volontairement factieux, le chef de l’Etat était en roue libre avec des compagnons à qui il a su donner, depuis quatre ans, des raisons sonnantes et trébuchantes de rester dans son giron. Lui pour la gloire et l’espoir d’une vie autoritaire au pouvoir, eux pour ne plus revivre la décennie de traumatismes passée hors des ors de la république, ils ont décidé ensemble d’incinérer substantiellement le capital d’orientation politique réformiste et patriotique produit par les Assises nationales.
A posteriori, on peut s’interroger sur les motivations fondamentales qui animaient ces acteurs politiques autour desdites assises après qu’Abdoulaye Wade avait contribué à les repousser hors des institutions… Ensemble, ils constituent aujourd’hui le pôle du reniement.
«Force et puissance des idées» ? Un ministre d’Etat conseiller à la présidence de la république était ce vendredi à la grande mosquée de la Gueule Tapée pour offrir un chèque de plusieurs (20 ?) millions de francs Cfa. En pleine campagne de fait pour le référendum, ce geste a un nom… La puissance de l’argent contre les (bonnes) idées.
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