Point de contradiction dans l’agenda de Macky Sall sur les évènements de Charlie Hebdo, sa participation à la manifestation de Paris est un signal de désapprobation de la violence et du terrorisme. L’interdiction de vente des publications représente une aspiration au respect des sensibilités religieuses et une volonté d’assurer l’ordre public. La liberté d’expression ne traduit pas absence de limite. Qu’est-ce qui fait qu’on ne peut traiter quelqu’un de pouilleux, de gros ou de moche ouvertement sans s’attirer le mépris de l’opinion publique? Il n’est pas question de loi, mais plutôt d’éthique et de responsabilité de tous pour un mieux vivre ensemble.
La complexité de la fonction présidentielle exige de Macky Sall une tempérance (postures mixtes) dont nous, sans charge publique, sommes exempts dans nos sentences souvent dogmatiques. Les exigences de recul et l’obligation de moyens sinon de résultats l’obligent à ménager bien des susceptibilités tant au niveau supranational qu’à l’intérieur du pays. Pas sûr qu’à sa place, un autre, lucide et avisé, aurait fait différemment sans hypothéquer le parapluie de sécurité et de défense.
Le discours sur la liberté d’expression constitue un plaidoyer de résistance contre l’intolérance intégriste. C’est une chose que de s’y identifier pour sa portée de lutte contre l’islamisation politique, c’est une autre chose que de s’approprier les injures à l’origine de l’événement. Macky Sall s’inscrit, dans une logique de solidarité, investissement politique. C’est excessif et perfide que de lui prêter une allure de promoteur des caricatures manifestement islamophobes. La responsabilité lie l’autorité et l’accule souvent dans de fines nuances.
Nous pouvons regretter une force panafricaine capable de faire face à la menace terroriste, mais toujours est-il que le Sénégal ne peut compter que sur des forces étrangères notamment celles françaises pour repousser d’éventuelles agressions islamistes d’envergure. Le cas récent du Mali le confirme bel et bien. Se résigner, certainement pas. Mais en attendant de réunir concrètement les conditions du sursaut, attelons-nous à leur réalisation tout en protégeant nos arrières. Il y va de notre survie.
La Politique ne peut se dérouler qu’à partir de la réalité. Faute de quoi, elle s’engage dans la spéculation, charrie en populisme et installe le chaos. Le cynisme ordinaire, les offres prétentieuses d’intellectuels et les enchères politico-religieuses viennent exacerber les contradictions entre notre volonté d’affirmation et notre condition d’indigence. Chacun y va de ses intérêts, de ses humeurs et des évènements sans se soucier du mouvement d’ensemble. La gestion des affaires publiques place l’autorité aux niveaux d’information et d’implication à lui couper des connivences quelconques.
C’est une chose que de déplorer notre position de faiblesse dans le jeu des relations avec l’occident, c’est une autre chose que de reconnaître, pour s’en plaindre s’il le faut, l’étroitesse de nos marges de manœuvre. Macky Sall est pris à offrir des parcelles de souveraineté (image de compromission) pour des garanties de protection et de providence. Ce n’est pas lui qui est en cause, c’est notre niveau d’organisation qui nous accable. Oui, ce sont les impératifs de gouvernance, stabilité, sécurité et survie, qui l’exigent. Malheureusement, plus de 50 ans après les indépendances, on en est là, indépendants mais toujours pas libres.
Birame Waltako Ndiaye
waltacko@gmail.com
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