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Psychologue-conseiller : L’impérieuse Nécessité De Décloisonner Ce Corps !!!

Psychologue-conseiller : L’impérieuse Nécessité De Décloisonner Ce Corps !!!

S’il y a un corps qui est peu connu voire pas du tout connu au Sénégal, c’est bien celui des psychologues-conseillers. La méconnaissance de ce corps, classé pourtant à la hiérarchie A1 dans la fonction publique sénégalaise (bac+6), par une bonne partie de la population, explique également, et sans nul doute, l’impopularité de ses professionnels auprès même de ses principales cibles.

Le corps des psychologues conseillers a pourtant été créé au lendemain de l’accession de notre pays à la souveraineté internationale. En effet, la loi n°59-024 du 19 juin 1959 et le décret n°60-249 de 02 juillet 1960 ont placé l’information, l’orientation et la psychotechnique au cœur des attributions du ministère de l’Enseignement technique et de la formation des cadres. Le centre d’orientation scolaire et professionnelle a été créé dans la même lancée en 1960, comme organe d’exécution de cette nouvelle politique de l’Etat du Sénégal, après que le décret n°62-099 du 14 mars 1962, lui a défini ses modalités de fonctionnement.

Depuis lors, diverses réformes, quoique superficielles, ont été apportées en termes notamment d’appellation et d’attributions, ce qui fait du reste, que le secteur n’a pas connu le bond qualitatif, jusque-là escompté. Autant dire que l’orientation scolaire et professionnelle est née avec ses tares consubstantielles car, au-delà de l’effectif réduit du personnel en charge de sa mise en œuvre et de l’énormité des tâches qui lui étaient confiées, il a également été noté depuis plusieurs années, l’absence d’une véritable politique nationale de l’orientation. Pour faire face à l’insuffisance numérique des psychologues conseillers, l’Etat enclenche, dès 1966, dans le cadre notamment du deuxième plan de développement du Sénégal, un processus de déconcentration des services en charge de l’Osp avec la création dans chaque région d’un centre régional de l’orientation scolaire et professionnelle en vue d’atteindre le maximum de cibles.

A la suite de la création de ces centres régionaux, différentes autres réformes concernant le secteur de l’orientation scolaire et professionnelle ont été notées comme celle qui a prévalu à l’organisation du ministère de l’Education nationale par le décret n°86-877 du 19 juillet 1986, faisant du centre national de l’orientation scolaire et professionnelle une structure du Men rattaché au cabinet du ministre.

Bien d’autres réformes ont certes existé, mais parlons de celle de 2010 portant création des centres académiques et antennes départementales de l’orientation scolaire et professionnelle, la­quelle réforme est instituée par l’arrêté ministériel n°9371 du 26 octobre 2010. En créant les centres académiques et autres antennes régionales de l’orientation scolaire et professionnelle en 2010, l’Etat cherchait à alléger, un tant soit peu, le Cnosp de ses lourdes charges en tant qu’organe central chargé d’impulser, de mettre en œuvre, de coordonner et de contrôler toute la politique d’orientation au Sénégal mais aussi d’œuvrer pour un accès équitable à l’information scolaire et professionnelle.

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Cependant, si les centres de Dakar, Pikine-Guédiawaye et Rufisque, sont fonctionnels depuis lors, il n’en est pas de même pour les antennes départementales dont une seule est aujourd’hui opérationnelle et il s’agit de celle de Goudomp dans le Sud du pays. Aucune autre antenne départementale n’est fonctionnelle du fait de la modicité des moyens dont disposent les Caosp, sous la tutelle desquels elles se trouvent, dans un contexte pourtant fortement marqué par les soucis d’accès, d’équité, de gestion et surtout de qualité du secteur l’éducation et de la formation.

Malgré l’immensité de leurs missions et la densité de la carte scolaire (couvrant toute une Académie), nombreux de ces centres n’ont même pas un véhicule de terrain devant leur permettre d’exécuter pleinement l’une de leurs principales activités à savoir, les sciences d’information collective qui doivent se tenir dans tous les établissements d’enseignement au niveau du moyen-secondaire. Pire, les budgets alloués annuellement à ces centres atteignent rarement les deux (2) millions de francs Cfa.

Les autres ressources provenant des quotes-parts que les établissements doivent verser sont difficilement mobilisables. Celles émanant de la gestion des candidatures individuelles au bac et d’autres concours sont, pour la plupart du cas, gérés dans la plus grande opacité au niveau de certains centres alors que les textes relatifs à la gestion de ces fonds sont clairs et précis (cf. les circulaires n°4380 du 1er octobre 1996, n°5014 du 13 novembre 1996, n°1626 du 14 mars 2017). Toutes choses par ailleurs qui nous poussent à nous interroger sur la volonté réelle de l’Etat d’impulser véritablement le secteur de l’orientation scolaire et professionnelle, au-delà de celle exprimée du reste, dans de nombreux documents et qui tarde encore à se concrétiser.

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Nous sommes convaincus que l’une des principales faiblesses du secteur reste, et demeure encore, son confinement au sein du ministère de l’Education nationale alors que la plupart des acteurs s’accordent sur le fait qu’il soit un secteur transversal. Cela dit, c’est tout le secteur de l’éducation et de la formation qui est concerné par l’Osp du primaire au supérieur en passant par la formation technique et professionnelle. En effet, l’article 32bis du chapitre premier relatif aux dispositions générales du décret n°87-1057 régissant le corps des psychologues con­seillers illustre parfaitement cette transversalité en disposant que les psychologues conseillers doivent «participer à une adaptation permanente des élèves, des étudiants, à la vie scolaire et universitaire et contribuent à leur insertion professionnelle» alors que le décret n°9371 du 26 octobre 2010 assigne également aux Caosp la mission d’«accompagner les élèves, les étudiants et les chercheurs d’emploi dans leur projet scolaire et/ou professionnel».

S’y ajoute le fait que la formation des psychologues conseillers est encore assurée par le ministère de la Formation professionnelle puisque l’Ensetp d’où ils sortent relève effectivement de ce ministère. Dans le même ordre d’idées, la dépendance ad­mi­nistrative des Caosp aux IA constitue aussi un blocage quant à leur autonomie, alors que les niveaux de formation et d’hiérarchie sont les mêmes avec les inspecteurs (Bac +6 et hiérarchie A1).

Aujourd’hui la mise en place des bureaux d’information et d’aide à l’orientation (Biao) dans les universités sénégalaises et la création du Service national de l’orientation professionnelle (Snop) au niveau du ministère de la Formation professionnelle, de l’apprentissage et de l’artisanat, dans lesquels interviennent d’ailleurs des psychologues con­seillers comme personnel technique, renseigne à bien des égards de la transversalité de ce secteur et surtout de la polyvalence de son personnel. Pourtant, d’autres structures publiques et parapubliques ont, de tout le temps et à toute occasion, exprimé leur besoin d’avoir des psychologues conseillers en leur sein, qu’il s’agisse du ministère de la Famille à travers notamment le Centre Ginddi, le ministère de la Justice (les Aemo), le ministère de la Jeunesse, le ministère de la Santé entre autres services, d’où l’impérieuse nécessité de décloisonner ce corps !

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Somme toute, vouloir confiner exclusivement les psychologues conseillers au sein ministère de l’Education nationale et sous la tutelle des IA en particulier, c’est sans nul doute œuvrer pour la restriction de leur champ d’action. En effet, la dimension appui psychosocial fait également partie des missions essentielles assignées à ces derniers, au titre notamment du décret n°9371 préconisant un «accompagnement et un soutien des élèves et des professionnels sur le plan psychosocial», accompagnement qui peut s’étendre d’ailleurs «partout où l’expertise du psychologue conseiller est nécessaire». Cette dernière disposition devait être mise en œuvre lors de l’incendie du Daaka de Médina Gounass, si l’on sait que les victimes avaient demandé elles-mêmes, d’être accompagnées par des psychologues alors que la dimension clinique est partie intégrante de notre formation. Nous osons espérer que Bettenty ne sera pas non plus laissé à lui-même alors que l’Etat dispose d’un service qui peut aisément assurer l’accompagnement et la prise en charge psychologique des familles des victimes.

Abdoulaye CISSE

Sociologue-chercheur,

Psychologue conseiller

au Caosp de Kolda

abdoulayecissesam@gmail.com

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