La population Sénégalaise est une société mal politisée, qui a sauté des étapes décisives dans la construction et la marche d’un Etat, surtout Africain.
En accédant à l’Indépendance, dans la balkanisation (dixit Senghor), alors que le pays faisait partie du deuxième ensemble politico-économique du monde après les USA, l’AOF, ancêtre et copie de l’Union Européenne, dont la capitale était Saint-Louis, le Sénégal avait tous les atouts économiques et politiques en main, pour se poser en leader incontesté de l’Afrique entière, la République Sud Africaine, comprise. Le Sénégal disposait des infrastructures industrielles, académiques et de voies de communications qui lui ouvraient tout le continent africain. Le port de Dakar était connecté au chemin de fer qui allait jusqu’au Niger, et desservait les principales villes du pays. La seule université de renom de la sous-région se trouvait à Dakar. Le Sénégal était doté d’usines de transformation et de conditionnement, les principaux comptoirs de commerce et les banques s’étaient établis dans le pays. Le Sénégal était la tête de pont du développement en Afrique.
Mais, ses dirigeants prirent les mauvais chemins, le sens inverse du développement dès l’Indépendance. On se mit à promouvoir un type de citoyen au dessus de tout le monde, par la fonctionnarisation à travers l’Ecole Française. Un type d’Education aux antipodes de nos valeurs de travail et du potentiel des richesses naturelles que sont la mer (580 kms de côtes), les terres cultivables, les ressources hydriques – Trois grands fleuves traversent le Sénégal ; le Sénégal au nord, le Gambie au centre, le Casamance au sud – et déjà, 90% des populations, se trouvant dans ces activités à travers des groupes socio – ethnico-religieux ( Pêcheurs lébous et walo-walo. Eleveurs peuls. Agriculteurs mourides) et bien sûr, l’exploitation agricole familiale, qui ne demandaient qu’à être mieux outillés pour propulser le pays au rang de premier pays développé d’Afrique.
Les vrais acteurs de ces secteurs sont exclus de toute formation diplômant du fait de la structure et de l’approche de la politique de l’Education au Sénégal, celle – ci ne donne aucune chance à ceux que l’on considère comme des analphabètes tant qu’ils sont hors de l’Ecole française telle que conçue et léguée à nos dirigeants par le colon. Il faut que cela s’arrête. Il faut que s’arrête cette propension à penser et concevoir à partir de lunettes de perception déformantes telles les doctorats et autres diplômes de haut niveau sur des matières qui ne nous concernent pas et sur des thèmes préfabriqués. Ce complexe de supériorité des diplômés est en train de tuer le Sénégal. Des gens vont ailleurs se barder de diplômes et de connaissances qui ne nous mènent nulle part, parce qu’eux-mêmes sont incapables de les traduire ou transformer sur le terrain, mais au nom du diplôme et de la propension des Sénégalais à n’écouter que les diplômes et les diplômés, ils nous imposent sans débats des vues et des directions qui nous font tourner en rond. Les diverses politiques sur l’Education, l’Industrie, l’Agriculture et autres sont là pour le démontrer, aucune d’entre elles n’a eu ne serait – ce qu’un début de réussite.
Une Ecole doit épouser les réalités économico – sociales du terroir pour prospérer, sa création doit s’articuler autour de l’existant et du palpable. Le Sénégal, adossé à la mer, regorge d’eaux douces, de terres fertiles et de forêts, des potentialités telles qu’on devrait associer toutes les formations à ces larges secteurs de la pêche, de l’agriculture, de l’élevage, de l’industrie et de l’artisanat. Savez – vous qu’il n’existe pas d’écoles de formation de base de paysans au Sénégal ? il n’y a aucune école d’initiation à l’agriculture, à la pêche ou à l’élevage au Sénégal. Les seules écoles qui existent telles le centre de formation de Tobor à Ziguinchor, l’ENCR de bambey ou l’ENSA de Thiés sont des structures qui forment des cadres intermédiaires ou supérieurs, ceux qui en sortent ont plutôt vocation à conseiller et (dé s’) orienter que cultiver ou entreprendre. Ils ont une approche de fonctionnaire dans un milieu qu’ils ne connaissent pas souvent.
S’il est vrai, que le Sénégal, devait s’outiller pour s’ouvrir au Monde, accéder aux outils de la Science et bâtir un Etat moderne, cela devrait se faire en fonction de paramètres qui mettent en avant les besoins des réalités économiques et du marché du travail en ressources académiques ou du savoir-faire scientifique. Mais, on se mit à glorifier un enseignement, une école sans attache avec la Société Sénégalaise. Le problème de l’Education au Sénégal, vient de cette greffe qui ne prendra jamais, et qui fait qu’on a crée un homo sénégalensis hybride, déraciné de son Moi (sa culture au sens le plus large du terme) et formaté dans des réalités qui ne sont pas les siennes.
Les Autorités de la République, les personnes ressources, les pères et mères de ce pays sont interpellés au premier chef, ce sont nos ressources et nos enfants qui sont concernés, nul n’a plus le droit de se taire quand des orientations tatillonnes, inadaptées nous sont imposées, il faut qu’on ait notre mot à dire sur ce qui nous concerne. On ne doit plus laisser les erreurs se répéter et qu’on les paye par la suite sans les avoir commises. Nos maisons sont pleines de jeunes bardés de diplômes issus de l’université ou de centres de formation qui ne trouvent aucun débouché sur le marché du travail du fait de mauvaises politiques de formation ou d’orientation. Il faut arrêter la saignée, aussi bien financière qu’intellectuelle. Cette gabegie a trop duré, on doit utiliser nos jeunes à autre chose qu’à la résignation et à l’utopie ; faisons leur faire ce qui leur profitera demain et profitera à leur pays. La fuite en avant n’a que trop duré. Les organisations paysannes, les acteurs, entrepreneurs, industriels de ces secteurs doivent proposer quelque chose, au lieu de regarder faire et de dire après : on le savait. Il faut arrêter de se taire.
L’erreur que nous sommes entrain de payer au prix fort, c’est, dès le début de l’Indépendance, pour nos Autorités d’alors, d’avoir confondu, l’Education et la Formation. L’Education est un large spectre d’apprentissage des valeurs culturelles qui fondent une Nation. La Formation, est l’outil des conquêtes de la place de l’individu dans sa Société. L’Ecole, au Sénégal, doit être un creuset d’apprentissage et de formation à la base, pas un centre d’alphabétisation ou d’abêtisation de la jeunesse.
Arrêtons – Nous ! Arrêtons cette Ecole qui ne mène nulle part nos enfants. Ce n’est pas aussi difficile qu’on le pense. D’autant que cette Ecole est en panne depuis belle lurette.
Alioune NDAO
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