« La démocratie est d’abord un état d’esprit », disait Pierre Mendès-France. Il n’y a pas de meilleure formule pour dire l’incapacité du régime de Macky Sall à s’accommoder aux principes et exigences de la démocratie pluraliste. Avec l’arrestation de Oumar Sarr, après celle de Toussaint Manga et d’autres jeunes du PDS pour des raisons plus qu’occultes, le gouvernement de Macky Sall vient de prouver encore sa nature dictatoriale.
Contributions de Alassane K. KITANE
L’on se rappelle la promptitude avec laquelle nos compatriotes, au premier rang desquels le syndicat politico-affairiste qui dirige notre pays, avait soutenu Lamine dans ses démêlées avec la justice française. Alors même qu’ils prétendent lutter contre l’enrichissement illicite et le blanchiment d’argent, allant jusqu’à ignorer et refuser la présomption d’innocence, ils ont décerné, sans aucun discernement un certificat de pureté morale et d’immaculée fortune à leur ancien camarade dans le combat contre Wade. Cette attitude d’alignement systématique derrière un prévenu pourrait être révélateur d’un état d’esprit pernicieux : le mal c’est l’autre et jamais nous et ce, parce qu’il est l’autre ! Cela témoigne de l’innommable étroitesse d’esprit et de la culture chauvine de nos dirigeants.
Les jets de pierres dont le cortège du Président a récemment fait l’objet à l’Ucad ont été, à juste titre, unanimement condamné, mais on n’a presque pas pris la peine de l’analyser froidement. La violence, quelle qu’elle soit, est toujours regrettable dans les affaires de la cité, car elle n’a rien de proprement humain.
C’est par le verbe que le monde fut crée, mais au regard de l’altération actuelle du verbe, il y a lieu de redouter que par la parole le monde s’achemine tout droit vers la décadence. L’efficacité étant l’unique souci dans les formes actuelles de la communication, la censure morale à laquelle s’astreignaient les anciens par sagesse a cédé le pas au libertinage verbal dans notre pays. Tout peut être dit au nom de la liberté, même si les conséquences qui en découlent se révèlent être désastreuses pour la liberté. C’est vrai que la libération de la parole n’est pas un phénomène spécifique au Sénégal, mais le DÉLIRE national auquel nous sommes soumis est sans nul doute une perversion de la vocation naturelle de la parole.
Le Sénégal est le seul pays au monde où des élites religieuses et politiques pratiquent la transhumance et changent de conviction au gré de leurs intérêts sans que cela ne froisse pratiquement personne. Ceux qui devraient incarner la constance et la dignité sont précisément ceux qui, les premiers, les foulent aux pieds. Comment peut-on prétendre être un guide religieux et faire preuve d’une si grande inconstance en matière de conviction ? Comment peut-on prétendre être une élite politique et renier ses principes devant tout le peuple sénégalais ? La réponse à ces questions est à chercher dans la culture du MASLAHA.
La grande forfaiture des intellectuels d’aujourd’hui, c’est que quand ils sont face à un défi dont ils ne peuvent venir à bout par une démarche discursive probante, ils procèdent à un déplacement très astucieux du problème.
La femme sénégalaise est à elle seule un indicateur de l’extrême pauvreté que vivent nos concitoyens surtout ceux du monde rural. La précarité dans laquelle évolue cette frange de la population est assurément indécente au regard des dépenses de prestige qu’engagent impunément nos dirigeants. Pourtant la femme est un vecteur de développement en même temps que socle de la famille sénégalaise. Toute politique de développement devrait donc faire des femmes un levier essentiel pour combattre et éradiquer la pauvreté, car elles sont non seulement les plus exposées, mais elles débordent de créativité et de persévérance dans l’effort. Les gouvernants actuels prétendent, par le PSE, mettre la femme au cœur de leurs priorités, mais au regard de leur démarche, il y a lieu de désespérer et même d’être angoissé quant à l’issue de leur entreprise.
C’est fait ! Latif Coulibaly s’est définitivement jeté dans la mare politique. Celui qui se faisait passer pour un journaliste d’investigation est devenu souteneur de Macky Sall dont le régime ne cesse de s’illustrer par la médiocrité et le recul démocratique. Alors que nous prisons grouillent de prisonniers politiques qui n’ont commis d’autres crimes que d’exprimer une opinion « mal pensante » et que la famine gagne le monde rural, des intellectuels comme Latif Coulibaly, Sidiki Kaba, Penda Mbow, etc. ont choisi les prairies paisibles de l’APR au détriment des droits de l’Homme.
La société sénégalaise est traversée de codes, de normes, de croyances et de représentations qui se violent ou qui sont incompatibles. Les croyances supposées caduques gardent encore une certaine vivacité, sinon resurgissent dans les nouvelles ; les normes, en plus d’être confuses, ont des espaces et des temps de validité et d’invalidité, etc. C’est pourquoi d’ailleurs l’existence sociale est non seulement conflictuelle mais aussi fécondatrice d’égarement et d’abasourdissement pour ceux qui ne sont pas capables de voguer avec équilibre dans les différents courants.
Trois ans seulement après une grande manœuvre ayant débouché sur un fantasme national à propos la dévolution monarchique du pouvoir avec pour cible Karim Wade, le bon Dieu nous envoya Aliou Sall frère de l’actuel Président. Les mêmes Sénégalais qui avaient vu dans la candidature de ce dernier à la mairie du Point E trouvent normal l’élection de Aliou Sall à la mairie de Guédiawaye et son ascension fulgurante et incessante dans les structures décentralisées de l’État. Ce type qui n’a jamais osé se présenter dans cette localité a été élu par les mêmes Sénégalais qui ont diabolisé la candidature de Karim à la mairie de la localité où il a grandi !
Il y a neuf ans, soit en 2006, nous adressions cette lettre ouverte à nos collègues et aux compatriotes suite à une grève dont le caractère radical et sauvage n’avait quasiment pas de précédent. Nous sommes aujourd’hui au grand regret de constater que les propos sont d’une étonnante actualité.
Le cerveau de nos compatriotes est ainsi occupé des heures durant à l’amusement et à la superficialité insupportable de quelques maîtres de la parole et du spectacle que ni la décence, ni la religion, ni même le civisme n’arrêtent. Divertis à longueur de journées, les Sénégalais ne voient pas qu’on les forge ainsi pour les vendre au plus offrant (publicitaires ou hommes politiques).
Le «sexe» est devenu ambiant et omniprésent dans l’espace médiatique et, par ricochet, dans l’univers mental des Sénégalais. Il est partout ! Il fait tout ! Le mythe de la «femme-objet», symbole du fantasme le plus extravagant de l’homme, est devenu le cristallin de toutes les chaînes de télévision. Matin, midi, soir : les belles filles sont devenues le symbole de l’ornement érotique d’un vide médiatique très profond.
Nos autorités se morfondent de gloire artificielle et se noient dans une sorte de misère dorée tandis que le pays sombre dans une misère noire. La campagne de vente de l’arachide a démarré, mais jamais le monde rural n’a été aussi angoissé et même meurtri. Janvier est traditionnellement le mois de l’année où le monde rural sénégalais revit et retrouve un semblant de liberté et de dignité. Cependant cette présente campagne est partie sur des bases d’exploitation arrogante et sans vergogne de paysans déjà suffisamment meurtris par une très faible pluviométrie et des récoltes problématiques.
La propagande pro-Macky a si admirablement réussi à mythifier la traque des biens mal acquis de sorte que s’y opposer, ou plus exactement s’opposer à la tournure injuste et discriminatoire qu’elle a prise, est synonyme de trahison, d’incivisme et d’antipatriotisme. En même temps elle n’a pas hésité à franchir l’indignité consistant à montrer à la télévision nationale (regardée partout dans le monde) l’image truquée de la maison de fonction anciennement occupée par Abdoulaye Faye avec les stigmates hideux d’un vandalisme prétendument orchestré par ce dernier. Une chaise anglaise arrachée, des étagères emportées ! Comment des êtres civilisés peuvent-ils pousser la fureur vindicative à ce point ? Cette machine de propagande n’a pas vu qu’en mentant de façon si ignoble elle a davantage écorché l’image de notre pays que celle de la personne incriminée. L’oligarchie politico-médiatique a osé titrer durant des semaines et des mois à la « Une » des journaux : « Palais dévalisé », « Meubles et moquettes volés » « Voitures de fonction volées », etc. Comment peut-on être si cruel et si déloyal envers ses adversaires politiques défaits?