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De La Situation Des Doctorants En Sociologie à L’universté Gaston Berger De Saint-louis

Dans la chaîne académique de transmission du savoir, le niveau le plus élevé reste sans conteste celui du doctorat. Et seuls des enseignants de haut niveau dans leur discipline peuvent arriver à ce niveau suprême de transmission du savoir. Alors, ils portent les grades académiques de Maître de Conférences d’abord et, ensuite, de Professeur Titulaire qui est le titre académique le plus élevé dans la carrière universitaire d’un enseignant du supérieur.

Pour arriver à ces grades académiques qui donnent autorité dans le domaine du savoir scientifique attesté, souvent plusieurs dizaines d’années d’enseignement et de recherches, ponctuées par une ou plusieurs dizaines de publications scientifiques de très haut niveau dans des revues locales ou internationales de renommée sont nécessaires. Ce sont de tels professeurs que l’on retrouve dans les Ecoles Doctorales, et ce sont à eux qu’est dévolue exclusivement la charge d’encadrement des doctorants que nous sommes.

A la Section de Sociologie, dont je fais partie, les enseignants fondateurs de la Section (les professeurs G. Mbdoj, I.P Lalêyè et A. Niang), dont certains ont commencé à encadrer des thèses depuis 1997, sont tous allés à la retraite entre 2008 et 2012. Eux trois ont encadré plus de 90% des doctorants inscrits en Sociologie. A ce jour ils ont à leur actif près de 70 docteurs, représentant près de 50% des doctorants dont les travaux de thèse sont placés sous leur direction scientifique depuis qu’ils encadrent des thèses (selon des informations recoupées).

Mais ces éminents enseignants-chercheurs ont encore ensemble sur leur bureau ou dans leurs ordinateurs, au bas mot, une quarantaine de drafts de thèses de doctorat émanant de doctorants très avancés dans la rédaction de leur thèse, et qui leur ont fait confiance pour les encadrer jusqu’à l’obtention de leur doctorat.

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Cependant, ces valeureux doctorants dont les potentialités intellectuelles sont des plus élevées (certains d’entre nous sont déjà recrutés comme enseignants-chercheurs dans des universités au Sénégal et dans d’autres pays d’Afrique), et qui se sont investis pendant plusieurs années dans la cherche sur leur sujet de thèse afin de pouvoir soutenir celle-ci avec une empreinte scientifique remarquable, courent aujourd’hui le risque, malheureusement, de ne jamais pouvoir présenter un jour leur thèse devant un jury.

Ce n’est pas parce que tout d’un coup, ils seraient tous atteints d’une maladie mystérieuse et handicapante qui les empêcherait de défendre avec brio leur thèse, mais parce que tout simplement le cadre académique actuel qui est complètement en dysfonctionnement par rapport aux réalités universitaires (très peu d’enseignants-chercheurs de rang A) et aux exigences de l’émergence du Sénégal (beaucoup de docteurs de qualité) , veut les sacrifier au nom d’une rigueur qui ne s’applique véritablement que très sélectivement.

Comment, en effet, dans un pays qui aspire à devenir rapidement un pays émergent, et qui pour se faire, investit des centaines de milliards de F CFA dans la construction et l’équipement de nouvelles universités afin de renforcer la carte universitaire, une institution universitaire quelconque peut se permettre de jeter à la porte des dizaines de futurs docteurs susceptibles de faire carrière dans ces universités, d’en devenir les premiers enseignants-chercheurs, et de contribuer ainsi, par leur dévouement à l’enseignement et à la recherche, à la réalisation des vœux les plus nobles des autorités de ce pays : faire du Sénégal un grand pays émergent par la qualité de ses ressources humaines, la qualité de ses jeunes.

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Si c’est l’admission à la retraite de ces enseignants-chercheurs, dont il a été question plus haut, qui doit être à la fois la source de malheurs des jeunes doctorants pleins d’ambition pour leur pays que nous sommes , et de privation pour le Sénégal de futurs jeunes docteurs susceptibles d’assurer valablement et dignement la relève de leurs maitres, alors la haute conscience de l’université de sa mission la plus élevée, qui est de créer les condition de sa propre reproduction (former des docteurs enseignants-chercheurs aptes à assurer la relève) et celle de la formation d’une ressource humaine de qualité pour servir de levier à l’émergence et au développement, ne devrait même pas lui permettre d’hésiter une seconde sur la conduite à tenir à l’endroit de ces professeurs à la retraite, qui n’aspirent qu’à nous accompagner jusqu’à la soutenance de notre thèse, dans un ou deux ans tout au plus, ce qui nous permettrait de mieux servir notre pays.

Dans le cas contraire, beaucoup d’entre nous risqueront d’aller rejoindre les universités occidentales dans lesquelles s’entache déjà la majorité des étudiants africains de 3ème cycle. Non ! Nous voulons rester dans notre pays, et à l’UGB, pour y obtenir notre doctorat.

L’avenir de cette quarantaine de jeunes doctorants et l’avenir du Sénégal pèsent cent millions de fois plus lourds que les quelques millions qui rémunéreraient durant cette période l’engagement dans un contrat de ces éminents et très respectés professeurs à la retraite à nous accompagner pour faire achever de faire de nous l’élite que nous aspirons d’être. Mais cette situation, pour le moins, a peut-être l’intérêt de montrer comment la vision des hommes qui occupent une position de pouvoir institutionnel peut être un levier puissant dans la conduite du progrès, du développement ou au contraire en être un frein pour longtemps. Au besoin d’autres contributions suivront !

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Demba SECK

Doctorant en Sociologie à L’Université Gaston Berger de Saint-Louis

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