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Lettre Ouverte Aux Députés Du Sénégal En Vue De La Destitution Du Président Macky Sall

Chers honorables Députés,

Je viens en ma qualité de citoyen sénégalais, par la présente, vous exposer les motifs, qui, à mon sens,  justifient le déclenchement, sans délai, de la procédure de destitution du Président Macky Sall qui, à plus d’une fois, a trahi son serment du 2 avril 2012. En effet, il a trahi son engagement à défendre de toutes ses forces les institutions de la République, l’intégrité du territoire ainsi que l’indépendance nationale.

L’article 101 de la constitution définit les dispositions vous permettant de veiller aux intérêts supérieurs du peuple sénégalais ainsi qu’à la sauvegarde de la République suite à la haute trahison de la part de l’actuel  Président de la République qui, dans l’exercice de ses fonctions, nous entraîne dans une dérive sans précédent alors que des centaines voire des milliers de sénégalais ont combattu pour nous léguer un Sénégal qui, à force de luttes acharnées ayant parfois nécessité le sacrifice suprême, a vu son peuple obtenir des acquis démocratiques qui ne sont plus à négocier.

Honorables députés, bien qu’il soit vrai, d’une part que vous n’êtes pas dans une Assemblée Nationale libre et sans lien de subordination avec le Président de la République, qui , en toute violation de la constitution et des lois, désigne son président ainsi que ses vices présidents, arrête la liste des députés de son parti et d’autre part,  même s’il est vrai que vous êtes loin d’être des exemples en matière de respect du devoir citoyen puisqu’il est avéré que vous vous êtes accordés la liberté de ne point payer vos impôts depuis plusieurs années, j’ose croire, tout de même, qu’il vous reste encore un tant soit peu de fibres patriotiques pour sauver cette République qui va,  inexorablement, à la dérive sous le magistère de Macky Sall.

En effet, en cas de haute trahison de la part du Président de la République, ce dernier «ne peut être mis en accusation que par l’Assemblée nationale, statuant par un vote au scrutin secret, à la majorité des trois cinquièmes des membres les composant ; il est jugé par la Haute Cour de Justice.» d’après l’article 101 de la constitution.

Honorables Députés, permettez moi d’attirer votre attention sur les faits suivants qui sont d’une extrême gravité. En effet, ces derniers jours, le Président Macky Sall a encore une fois récidivé dans la violation de son serment par lequel, « devant Dieu et la devant toute la nation », il s’était engagé à « …observer comme de faire observer scrupuleusement les dispositions de la constitution et des lois » et de « consacrer » toutes ses « forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire  et l’indépendance nationale… ».

A travers le cirque du, soi-disant, dialogue national, il a encore une fois récidivé par son activité favorite : la manipulation de l’opinion à des fins politiques pour son seul intérêt et celui de ses partisans. Il avait, auparavant, pris en otage le conseil constitutionnel pour légitimer, et je serai même tenté de dire, constitutionnaliser son « wax waxati waxaate waxeet », et cela semble avoir fonctionné puisqu’il a obtenu sa fameuse constitution, sans dialogue national ni consultation, malgré une abstention historique. Pourquoi donc s’arrêter en si bon chemin ?

Puisqu’il est mal entouré, mal conseillé, il a fini par fermer les yeux sur cette abstention qui traduit l’immense déception du peuple sénégalais par les politiques au lieu d’en tirer les leçons qui s’imposent pour rectifier le tir avant qu’il ne soit trop tard. Sans , pour autant, s’attarder sur les scandales de ce référendum organisé en violation du code électoral  en son article  LO.182 qui stipule que « les électeurs sont convoqués par décret publié au moins quatre vingt dix (90) jours avant la date du scrutin », permettez moi de souligner  la fraude électorale savamment orchestrée et  qui semble être un test réussi dans l’optique de passer au premier tour à l’occasion de la prochaine élection présidentielle.

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En effet, il ressort de  la comparaison entre le nombre de bureaux de vote publié par les services du ministère de l’intérieur et du décompte du président de la commission nationale du recensement des votes, une différence de 1213 bureaux de votes fictifs passée sous silence par une bonne partie de la presse et de l’opposition ouvrant ainsi la voie à des fraudes  massives  aux prochains scrutins sans parler de l’utilisation des moyens de l’État et des cas avérés d’achats de conscience. D’importants moyens ont été employés pour arracher la victoire du OUI. Les chaînes de télévision privées ne me démentiront pas puisque leurs services commerciaux ont été réquisitionnés par le camp du OUI, ce qui leur a permis de booster leurs chiffres d’affaires tout en ostracisant le camp du NON. Des milliards aux origines douteuses ont été, ainsi, dépensés pour, coûte que coûte, gagner ce scrutin.

La seule chose qui semble  préoccupé le Président Sall depuis son accession au pouvoir est sa réélection. Le Président est obnubilé par l’obtention d’un second mandat qui est devenue sa seule et unique obsession et tous les moyens sont bons pour y parvenir. On a l’impression qu’il a été élu dans le seul but d’obtenir un second mandat. Au lendemain de son élection, au soir du 25 avril 2012, il a réduit la société civile, la presse, les syndicats, les adversaires politiques à leur plus simple forme d’expression pour pouvoir manipuler à sa guise le peuple sénégalais. Aujourd’hui toutes les limites ont été franchies dans la dérive présidentielle sans précédent. Jamais, la constitution et les lois de mon pays n’ont  été autant violées par un Président en exercice.

Une des premières grossières manipulations de l’opinion sénégalaise est la traque des biens mal acquis. Annoncée en grande pompe, la montagne a fini par accoucher d’une souris. La réactivation d’une juridiction comme la CREI, digne d’un pays dictatorial comme la Corée du Nord, nous a non seulement coûtée des milliards de F CFA mais a fini par  démontrer la totale soumission de la justice sénégalaise au Président de la République qui joue, à la fois , le rôle de procureur, de magistrat et de juge des libertés. Il a pleinement abusé de son droit de grâce. On ne dénombre plus les immiscions du Président qui fait arrêter et libérer à sa guise ses opposants. Il a fait libérer  des personnes dont leurs culpabilités ont été reconnues par les tribunaux compétents mais aussi a usé de son influence pour étouffer certains dossiers  d’une extrême gravité comme je l’ai souligné dans ma précédente contribution.

Ainsi, plusieurs affaires comme celles du Commissaire Keïta (ayant révélé le supposé trafic de drogue dans la police), du Colonel Ndaw (ayant révélé l’existence de pots de vins et détournements de fonds dans la gendarmerie), la nébuleuse que constitue la gestion du pétrole et du gaz en cours d’exploration aux larges de nos côtes qui aurait déjà rapporté 200 milliards FCFA aux frère du Président (probable prête nom  de ce dernier) et ses associés, la Banque de Dakar, l’indemnisation d’Adama Bictogo à hauteur de 12 ou 13 milliards, la mafia de la douane avec les scandales d’enrichissements illicites grâce à l’huile et autres produits alimentaires de base détournés et revendus… ont été étouffées. La liste est loin d’être exhaustive.

La dernière comédie pour narguer le peuple est le dialogue national qui, après la légitimation de la transhumance à outrance, n’est, ni plus ni moins, qu’ un deal entre un père lassé de voir son fils être le seul à croupir en prison et un Président connu pour son cynisme à envoyer ses opposants en prison. Le Président Wade est conscient que son parti, le PDS, n’est pas prêt de revenir au pouvoir donc inutile de laisser son fils trois ans encore derrière les barreaux, d’autant plus que l’article 28 de la nouvelle constitution l’invite à renoncer à sa nationalité française pour remplir les conditions de validité de sa candidature à toute élection présidentielle ; et de toutes les façons, le pouvoir trouvera un moyen pour l’empêcher de participer à l’élection présidentielle de 2019. Ainsi, fallait-il prendre les sénégalais pour des demeurés pensant pouvoir utiliser l’alibi du dialogue national pour justifier la prochaine libération  de Karim Wade ?

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Walfnet.com nous rapporte les révélations de Moussa TOURE, ancien ministre de l’Économie, des Finances, du Plan et du Commerce du Sénégal et leader du parti Citoyen Éthique et Transparence Cet/ Jariñ sà Rééw, qui soutient, tenir de bonnes sources, que le chef de l’État a casqué beaucoup d’argent pour les délégations qu’il a accueillies le 28 mai dernier au palais dans le cadre du dialogue national. « Même s’il n’avance pas de chiffres, Moussa TOURE est formel, l’argent a coulé à flots. De la liquidité comme les Sénégalais en voient rarement par ces temps qui courent. » peut-on lire sur walfnet.com.

Le président Macky Sall semble manifesté un profond mépris vis à vis des sénégalais et se comporte de plus en plus en parfait dictateur. Les marches pacifiques afin de manifester ses revendications ou son désaccord, droit constitutionnel de tout sénégalais, sont systématiquement interdites, la dernière étant celle de la coalition anti APE dont certains leaders étaient arrêtés par la police. Il ne communique guère avec son peuple. Il préfère annoncer à travers les média français, américains ou arabes des décisions importantes concernant son peuple au lieu de répondre aux questions des journalistes sénégalais. Un président proche de son peuple devrait répondre aux questionnements de ce dernier par le biais de conférences de presse périodiques ou de face à face avec des journalistes sur un plateau de télévision.

Le 03 avril 2016 deux ex détenus de la prison de Guantánamo ont été transférés en catimini au Sénégal sans aucune explication au peuple qui se pose des questions légitimes sur les dessous de cet accord secret avec les États Unis et les dangers que pourrait encourir notre pays. Il expose de, plus en plus, notre pays jusqu’ici, connu pour sa neutralité et sa discrétion au sujet de la guerre des civilisations qui oppose l’Occident et une partie du Moyen Orient, à des représailles. Nos troupes ont été engagées dans des conditions louches dans le conflit sunnites contre chiites opposant l’Arabie Saoudite et les rebelles du Yémen soutenus par l’Iran. L’armée américaine disposera désormais de bases militaires sur notre sol et l’armée française a pu revenir dans notre pays avec des logements et terrains mis gracieusement à sa disposition par le Président de la Républiquue.

Le Président Macky Sall a multiplié les marchés de gré à gré souvent octroyés à des entreprises nouvellement créées par ses proches. Ainsi, comme nous l’apprend le site d’information dakarmatin.com, l’affaire Adama Bictogo n’a pas encore révélé toute la vérité.  L’homme d’affaires, ancien ministre ivoirien démis de ses fonctions à force de scandales financiers, qui a été dédommagé à hauteur de 12 ou 13 milliards de FCFA par l’État du Sénégal, dans des conditions opaques, « ne serait pas  le seul à bénéficier de cette manne financière ». Dakarmatin « tient de sources sûres que de hautes autorités devraient bénéficier aussi de ce montant qui a été retiré à travers des valises au niveau de la banque Atlantique ».

« L’homme d’affaires au passé sulfureux avait raflé le marché de la construction de l’Université Amadou Makhtar Mbow à hauteur de 50 milliards », mais à failli perdre le marché pour faute de caution. Cependant,  grâce à   la manne financière tirée du dédommagement , Bigtogo qui décroche bizarrement beaucoup d’affaires au Sénégal,  a pu déposer la caution pour sauver le marché. Il s’avère que sa société, la Snedai, est essentiellement composée de personnes apparentées au couple présidentiel.  On peut citer, en exemple, Omar Wone (directeur général),  Adama Badiane (directeur d’exploitation ex secrétaire du Président  et fille de l’amie intime de la Première dame),  Maïmouna Sall (assistante et cousine du DG et du Président), Touty Ndiaye (fille du ministre Mbaye Ndiaye) etc…

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Le Président Macky Sall entrave le travail de la justice en empêchant à des magistrats de faire leur travail. On peut citer l’exemple du l’ex procureur spécial Alioune Ndao qui a été démis de ses fonctions en pleine audience pour la bonne et simple raison qu’il  refusait de limiter la traque des biens mal acquis à la seule personne de Karim Wade. Il était déterminé à poursuivre les 26 personnes dont il avait cité les noms lors de sa première conférence de presse courant novembre 2012 mais c’était sans compter sur la détermination du Président à politiser cette affaire et l’utiliser comme instruments de chantage afin d’intimider des adversaires politiques.

Le Président de la République « entretiendrait des relations exécrables » avec la digne et incorruptible Nafi Ngom Keïta, présidente de l’OFNAC plusieurs fois menacée de mort, qui a le seul tort d’enquêter sur des scandales financiers impliquant certains proches du pouvoir. A défaut, de pouvoir la démettre de ses fonctions puisqu’elle est nommée pour cinq ans irrévocable, il lui met les bâtons dans les roues d’autant plus qu’elle serait  « privée » des moyens nécessaires pour l’exercice normal de ses fonctions et ses rapports qui ne sont jamais officiellement reçus par le Président de la République sont systématiquement rangés aux oubliettes. Le Président ne souhaite pas la recevoir en audience d’après les révélations de Pape Alé Niang dans sa dernière chronique hebdomadaire.

Le Président Macky Sall est totalement soumis aux occidentaux qui règnent sans partage sur notre économie au détriment des entreprises locales. On ne compte plus les secteurs dominés par des entreprises étrangères bénéficiant d’exonérations fiscales colossales représentant un manque à gagner de plusieurs milliards pour un pays qui peine à éliminer ses 600 abris provisoires en guise d’établissements scolaires, dans un pays où le coton est à la charge du patient dans plusieurs hôpitaux. Il n’a pas hésité à signer les accords de partenariat économique entre l’Union Européenne et les pays de l’Afrique de l’Ouest qui vont nous priver de plusieurs milliards de francs CFA en terme de recettes douanières.

La régression des recettes fiscales, du fait de l’application des accords de partenariat économique (APE) avec l’Union Européenne, pourrait atteindre un montant cumulé de 2.470 milliards de FCFA à l’horizon de 2030. Tels sont les résultats d’une étude d’impact réalisée à partir de février 2008 par la Direction des affaires économiques du ministère camerounais des Finances.

Cette étude indique que le manque à gagner annuel de recettes fiscales s’élèvera graduellement de 4 milliards FCFA en 2010 à 129 milliards FCFA en 2013 et 233 milliards FCFA en 2030.

Je pourrai ainsi continuer à énumérer les différents scandales qui maquillent le régime de Macky Sall, un multi récidiviste dans la violation des dispositions de la constitution et des lois de la République, ce qui nécessiterait très certainement un livre. Au vu de tous ses motifs, honorables Députés, vous êtes le dernier recours pacifique à pouvoir sauver la République des griffes d’un Président, irréversiblement, atteint par l’ivresse du pouvoir. En votant pour la procédure déclenchant sa destitution, vous rendrez à l’Assemblée Nationale sa dignité perdue, chers honorables Députés et vous rentreriez, ainsi, dans l’histoire par la grande porte.

 

Serigne Mbacké FALL

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