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De La Responsabilité Sociétale Du Cadre

Tout au long de ces lignes, on entendra par cadre toute personne qui assure une fonction d’encadrement à l’occasion de ses activités professionnelles. Indifféremment, nous allons parler de cadre ou d’intellectuel, qu’il s’agisse de sénégalais lettrés arabes ou de diplômés de l’enseignement supérieur formel.

De manière pratique, il s’agit de nos oncles, sœurs et frères médecins, Juristes, Financiers, Manager ou Oustaz, ayant exercé ou qui exercent une activité professionnelle noble, dans une position de direction et d’encadrement. Dans la cité ou le quartier, c’est la Dame, le Monsieur ou Serigne bi, très correcte, sans histoires et respecté, que toute la communauté pourrait confier la trésorerie de l’association locale, si seulement il pouvait nous consacrer une petite partie de sa journée de dimanche. Malheureusement, sa proximité avec la communauté n’est que physique. Il n’est, pour sa collectivité, pour sa communauté, pour reprendre les propos de R. ARON, ni « créateur d’idée » encore moins « spectateur engagé ». Il refuse catégoriquement de prendre sa responsabilité, il refuse de mettre ses compétences particulières et son sens de l’éthique au service de société.

TEEKKI NAA OU LA LOGIQUE EGOÏSTE

Certains me jugeront trop dur mais je suis convaincu que c’est très égoïste de leur part. Parmi nos sœurs et frères cadres, rares sont ceux qui rencontrent des problèmes de survie. Ils ont tout ce qu’il leur faut pour mener une vie calme et paisible ponctuée de vacances dignes de ce nom. Les meilleurs d’entre eux s’occupent même de la proche famille par le biais des transferts d’argent car le temps fait souvent défaut pour pouvoir remettre l’enveloppe en mains propres. De ce point de vue, mes sœurs et frères Teekinanu, ils ont réussi dans la vie.

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Pendant ce temps, la collectivité à laquelle ils appartiennent est gérée par un groupe dont la seule vraie compétence réside dans l’art d’abuser de la confiance populaire. Ces gens que personne dans la collectivité, pris individuellement, ne confierait son avoir. Mon frère médecin, égoïste, laisse la commission médicale de la collectivité locale être dirigé par un politicien qui, par paresse pour les études ou l’ouvrage, est passé à côté de sa vie. Mon Oncle, inspecteur d’éducation à la retraite, satisfait de ses 40 ans de services à la fonction publique sénégalaise, abandonne la commission éducation à un jeune enseignant du parti au pouvoir.

En somme, chacun d’entre eux, dans une logique individualiste, refuse de s’impliquer dans la gestion de la chose communautaire, disant laisser cette « sale » tâche à une catégorie de personnes.

Qu’il le sache ou pas, le cadre, dans une logique de solidarité agissante, a pour devoir de mettre ses compétences à profit dans la gestion de la chose collective.

JOMB NAA KO OU L’AUTO EXCLUSION

Même si, à travers l’histoire politique du Sénégal, ces types d’hommes, compétents et pétris d’éthique, peuvent se compter du bout des doigts, il est vrai que ces dernières années la tendance est relativement positive. Ainsi, avons-nous noté l’implication accrue d’individus de « bonnes mœurs » réputés hommes de valeurs, dans la gestion des affaires de la cité, surtout à travers les dernières élections législatives.

Seulement, je refuse d’entrer dans le débat sur le profil et le rôle de nos députés mais ma conviction reste entière, pour une action efficace avec des impacts réels sur la situation économique et sociale des populations, la meilleure station reste la collectivité locale. En refusant de « se salir » en s’impliquant dans la sphère de la gestion de la chose commune, il se laisse souvent administrer par une race particulière pour qui la collectivité locale n’est qu’un tremplin pour atteindre une position politique beaucoup plus confortable avec un budget encore plus consistant. Il se laisse, et laisse sa communauté, aux mains d’un être particulier, un transhumant professionnel qui, telle une girouette, tournera au gré du vent politique pour se mettre dans le sens du parti au pouvoir.

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LI JARA JOMB pour un intellectuel ou cadre, c’est assister, inerte, à la décadence de sa communauté par la faute de gens inaptes et formés dans la promotion de contre-valeurs.

Silencieusement, je souhaite que les élections locales prévues dans quelques mois soient une occasion pour nos intellectuels de remplir leur responsabilité sociétale.

 

Ngor Diouma Dione

Sociologue

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