«Quant à l’État du Sénégal, qui se targue de défendre la démocratie et les droits de l’Homme, il vaudrait mieux qu’il s’engage sur le CHEMIN DE LA DEPENALISATION de l’homosexualité.» (Me Sidiki Kaba, Président honoraire de la FIDH, Janvier 2009).
En décidant de libérer en catimini un homosexuel notoire, condamné par les lois de notre pays, à quelques encablures seulement du Grand Magal de Touba, qu’il vient pourtant de déclarer férié, l’Etat a posé un acte qui ébranle l’édifice même des valeurs ayant valu à Cheikh A. Bamba d’être exilé pendant plus de sept ans pour son peuple. Ainsi, malgré ses déclarations officielles de principe contre la dépénalisation de l’homosexualité durant son mandat, que nous avions tous, en leur temps, unanimement saluées (considérant que ce débat vaseux était virtuellement clos), le Président de la République, Macky Sall, vient d’avaliser, de façon remarquablement significative, une dérogation judiciaire constituant un signal fort aux groupes de pression extérieurs. A travers notamment son Garde des Sceaux, M. Sidiki Kaba, l’un de leurs «bras armés» les plus sûrs au sein de l’institution, connu pour ses positions très claires en la matière et son engagement de près d’une trentaine d’années pour la légalisation de cette déviance dans notre pays.
Face à un retournement aussi spectaculaire que troublant, qui contribuera sans nul doute à cristalliser davantage l’opinion, dans les jours ou mois à venir, nous nous retrouvons face à trois hypothèses.
L’hypothèse administrative
Similairement à l’argument soutenu tout dernièrement par les services officiels du royaume chérifien, lors de l’élargissement choquant et malencontreux pour l’opinion marocaine d’un pédophile espagnol, ceux de notre Présidence de la République pourraient bien déclarer, au même titre que Mouhamed VI, que le nom du chroniqueur-homosexuel a été ajouté par inadvertance dans la liste des 800 détenus libérés par les services ministériels. Et que, en conséquence, le chef de l’Etat n’en était nullement informé. Sachant, toutefois, qu’un argument de si bon aloi n’aurait aucune chance de prospérer. Pour un certain nombre de raisons assez triviales.
Primo, l’hypothèse du hasard ou du choix fortuit de ce cas très controversé, parmi des milliers d’autres détenus, ne saurait être valablement soutenue. Du simple fait que l’auteur direct de ces «libérations constitutionnelles», Monsieur Kaba en personne, pour ne pas le nommer, était non seulement bien au fait des dossiers judiciaires brulants portant sur l’homosexualité (qu’il s’était apparemment fait un point d’honneur, si l’on peut user de l’expression, à traiter en urgence, moins de trois mois après sa nomination), mais ce dernier n’est point sans savoir l’extrême sensibilité du sujet au sein de l’opinion publique sénégalaise, pour se permettre de le traiter aussi cavalièrement. C’est donc en toute connaissance de cause que ce choix a été opéré, en guise sans doute de défiance aux sénégalais opposés à la «dépénalisation active» de ce vice, mais aussi de message subliminal à ceux qui s’y adonnent, de même qu’aux observateurs étrangers recevant ainsi des gages de bonne volonté d’un pays «pilote», porte d’entrée idéale vers l’Afrique subsaharienne. Ceci, malgré toute la mascarade des multiples libérations provisoires et réductions de peines en amont qui ne furent, vraisemblablement, que de la poudre médiatique aux yeux d’une opinion que la plupart de nos gouvernants considèrent comme myope et amnésique…
Secundo, qui peut sérieusement imaginer, dans la configuration de notre système étatique actuel, caractérisé par un présidentialisme très marqué, qu’un ministre de la justice prenne entièrement, seul dans son bureau, la latitude de libérer un prisonnier si sensible, sans en avoir au préalable référé à la «hiérarchie» ou même reçu des instructions claires d’en «haut lieu» ? Si par extraordinaire cela serait le cas (ce qui s’avère plus improbable, à notre sens, que l’éruption prochaine du volcan des Mamelles), eh bien, il revient à son chef, de par les prérogatives régaliennes qui lui sont conférées, d’annuler simplement ladite décision ou, mieux, de démettre en même temps le ministre fautif, pour confirmer la sincérité de ses résolutions antérieures de non-dépénalisation. Simple non ?
Au cas, plus vraisemblable, qu’un tel désaveu public ne puisse être envisagé (pour des raisons que l’on peut aisément imaginer), il nous restera à analyser les deux seules autres hypothèses envisageables.
L’hypothèse du Cheval-de-Troie
Une autre éventualité, non moins improbable que la première, est celle d’un double jeu du ci-devant défenseur réputé des droits homosexuels qui, en tant que Garde des «Sots» (auxquels il assimile apparemment les citoyens sénégalais), représente, tel le ver dans le fruit gouvernemental, les intérêts des lobbies homosexuels et droits-de-l’hommistes au sein de notre État. Une position privilégiée, imposée par certains de nos «partenaires techniques et financiers», qui lui donnerait, sans nécessairement un blanc seing explicite de l’establishment, toute latitude de transformer (de l’intérieur) en dispositions et pratiques juridiques concrètes les principes du «Programme d’Ajustement Culturel» auquel nos peuples traditionnellement croyants seront de plus en plus soumis dans l’avenir par les mécènes impitoyables du Nouvel Ordre Mondial. Un tel schéma est-il réalisable sans l’accord tacite, la complicité passive ou même le feu vert occulte donné au plus haut sommet de notre État ? Nous ne le pensons pas. Dans la simple mesure où ce Cheval-de-Troie présumé a été choisi, parmi 13 millions de sénégalais non moins compétents et au casier moral moins entaché, en toute connaissance de cause par le chef actuel de l’exécutif pour être notre ministre de la justice. Et que ce dernier, pour donner le change et certainement mieux nous endormir, soutint sans sourciller qu’il était prêt à retourner sa toge d’avocat homophile et à tirer, d’un coup de sceptre magique, un trait sur ses 30 ans d’activisme gay. Car, selon ses propres termes mêmes, «exerçant dans le cadre d’un gouvernement et exprimant ses positions à travers celles du chef de l’Etat qui s’imposent à l’ensemble de ceux qui servent sous sa direction»(sic). Ce qui, en termes plus simples, signifie que toute décision qu’il aurait à prendre durant sa mission serait conforme aux orientations du Gouvernement et aux «positions» (explicites ou implicites) du chef de l’Etat, dont la «vision» est matérialisée par les actes officiels posés par ledit Gouvernement. Alors qu’il avait jusqu’ici défendu, sur toutes les tribunes du monde, qu’«il vaudrait mieux que l’Etat du Sénégal s’engage sur le chemin de la dépénalisation de l’homosexualité» (Yoonu Yokkuté ak Daganal Goor-jigéen). Position subtilement reformulée, dans un rare exercice d’équilibrisme sémantique, lors du récent passage du Sénégal devant la Commission des droits de l’Homme pour son Examen périodique universel (Epu) : « Personne n’est détenu au Sénégal pour le délit d’homosexualité»(!), sans aucun recadrage énergique et décisif de l’exécutif qu’il était pourtant censé représenter et «exprimer les positions». Tout ceci pour dire que, par quelque bout que l’on puisse prendre cette affaire de libération impromptue du chroniqueur homosexuel, tous les chemins de la «dépénalisation passive» actuelle mènent, directement ou indirectement, au cœur même du Palais de la République…
L’hypothèse de la «dépénalisation passive»
Tout le monde le sait – les activistes et lobbies homosexualistes au premier chef : la méthode d’imposition unilatérale et institutionnalisée de cette déviance dans notre société actuelle, vu les fortes résistances et conflits ouverts qu’elle susciterait, a très peu de chance d’aboutir. Du moins, à court terme. C’est certainement pourquoi une autre approche, à moyen et long terme, plus subtile et moins visible pour être ouvertement combattue, ayant notamment fait ses preuves ailleurs, a été peaufinée et mise en œuvre pour notre pays. A l’analyse, cette stratégie, dont les résultats commencent déjà à se faire sentir, s’articule autour de certains axes majeurs. Parmi ceux-ci la «mise à niveau» (upgrade) et la «mise à jour» (update) progressive et graduée, par nos gouvernants placés sous perfusion macroéconomique et idéologique (certains prêts ou subventions publiques étant à ce prix), alliés à des ONG, organismes et autres représentations diplomatiques, de notre architecture juridique et institutionnelle. Pour mieux préparer le terrain aux profonds bouleversements socioculturels des mentalités des jeunes générations présentes et surtout celles à venir, destinés à les rendre psychologiquement «prêts» (selon le paradigme posé par le Président Macky) à intégrer gentiment, sans même que l’on n’ait le temps de comprendre ce qui se passe, cette nouvelle «Culture des Sens» mondialisée.
C’est cela le sens même de l’accélération de cette démarche de «dépénalisation passive» à laquelle nous assistons actuellement, qui se traduit de facto par la relaxe ou la non inculpation, malgré tout l’arsenal juridique existant, de tout prévenu pour acte contre nature (cas récent des lesbiennes du Piano-piano etc.), sous divers prétextes procéduraux. A posteriori, on se rend même mieux compte maintenant que c’est cela le sens profond des assurances de notre ministre à la Commission des droits de l’homme de Genève : « Personne NE SERA PLUS détenu au Sénégal pour le délit d’homosexualité dans l’avenir». En effet, et il est très important que tous les sénégalais le réalisent. Avec la perpétuation et la routine des subterfuges judiciaires actuels et passés, qui permettent de relâcher au plus vite tout prévenu d’acte contre nature, l’homosexualité a été dépénalisée de facto au Sénégal. Même si c’est de façon passive et psychologiquement plus confortable pour l’opinion publique. Ce qui n’est qu’une première étape, à notre sens, vers une dépénalisation active qui paraîtra de plus en plus inéluctable, au train où vont les choses, sans une prise de conscience plus aigüe de la société sénégalaise réelle sur les processus en cours…
L’autre pilier majeur de cet «Axe du Mal» dans notre pays, qui soutient, accompagne et renforce le pilier politique et institutionnel, est celui de certains médias qui, sous les dehors facile du «people», d’une approche particulière des droits de l’homme, au nom des libertés individuelles et laïques ou du progrès social qui se dit libéralisme, procèdent en fait au formatage psychologique des masses et accélèrent, ce faisant, la sécularisation des mœurs, à travers la «fabrication du consentement». A la solde des lobbies ou bien même, quelques fois, sincères «idiots utiles» convertis, inconsciemment, à des schémas de pensée en réalité artificiels, ces nouveaux Hussards de la Liberté extrémiste causeront, à terme, plus de dégâts à notre peuple et à nos enfants. En leur imposant habilement, par exemple, à travers surtout la rhétorique politico-scientifique de certains relais «universitaires» locaux, virtuoses des «plaidoyers» enflammés, une autre vision moins restrictive de la sexualité et une nouvelle «approche genre» qui, en réalité, n’est qu’une vaste supercherie destinée à gommer à terme toute différence, même sexuelle (faisant porter des pinws à nos garçons et du topless à nos filles, devenues toutes aujourd’hui des FEMEN en puissance), au nom de la parité, de l’égalité horizontale par le bas (qui exclue toute autorité verticale), de la lutte contre les discriminations et des droits des minorités fourre-tout. Pour mieux déblayer, en réalité, la voie à toutes les déviances minoritaires des sociétés et à tous leurs «tabous». Pour en faire, à terme, de nouvelles normes sociétales et culturelles et les nouveaux…tabous de la Modernité.
Conclusion
La question mérite d’être posée. Peut-on encore aujourd’hui, dans notre pays, parler décemment d’ «indépendance de la justice», de la «fin de l’impunité» ou même d’ «État de droit», si l’on sait qu’il suffit encore que d’obscurs lobbies internationaux s’activent pour que leurs desiderata soient aussitôt satisfaits, sous les subterfuges juridiques les plus fallacieux et les plus puérils, contre la volonté du Peuple et de la «majorité démocratique» ? Ne doit-on pas également s’étonner qu’au moment où la France, pourtant considérée par nos élites politiques comme la «patrie des droits de l’homme et de la liberté», discute de la pénalisation éventuelle de la prostitution (progressivement extirpée des droits individuels, au nom de la traite des blanches – voir, à ce sujet, notre lettre à l’ancienne ministre de la justice : «Madame, il faut interdire la prostitution au Sénégal»), nos proconsuls idéologiques locaux en soient encore à se débattre dans la vase informe des valeurs préformatées, sans aucun génie propre, à s’échiner encore à manipuler notre peuple, sous le silence plus qu’assourdissant des pamphlétaires de la République, ex-société civile pourtant habituellement si prompte à dégainer, en d’autres circonstances, leur glaive acéré de la défense du Peuple ? Que dire justement de l’apathie de ce même peuple, apparemment plus porté à améliorer ses conditions de vie que de préserver ses raisons de vivre. Que dire de notre responsabilité à nous tous, en tant que parents, éducateurs, acteurs religieux, sur notre insuffisance d’organisation et d’engagement sur le terrain juridico-politique, lorsqu’il s’agit de la défense des principes et valeurs pour lesquels nous avons été désignés.
Il est grand temps, pour tous les citoyens sénégalais, au premier chef desquels les confréries et les autres communautés religieuses de ce pays, de mieux s’organiser pour jouer pleinement et plus efficacement leur rôle naturel de contrepouvoir à même de défendre les valeurs culturelles et religieuses ayant fondé cette nation. Pour ce faire, ces acteurs socioreligieux devraient, entre autres, réfléchir sur les mesures capables de juguler la stratégie de «dépénalisation passive» de l’homosexualité actuellement mise en œuvre par nos gouvernants, sous la pression de lobbies infiniment plus organisés et non moins déterminés qu’eux :
– En exigeant d’abord la démission immédiate du ministre de la justice actuel, comme gage de bonne volonté et de sincérité du chef de l’Etat par rapport à ses engagements précédents,
– En suggérant, dans le cadre de la réforme en cours des institutions, l’intégration d’une disposition citant explicitement le terme d’homosexualité (en plus de celui d’actes contre nature) dans la Constitution sénégalaise même, afin de mieux «verrouiller» sa pénalisation pour l’avenir,
– En sensibilisant davantage les populations sur les dangers auxquels elles sont plus que jamais exposées, afin qu’elles acquièrent une «conscience morale» active aussi aiguë que leur «conscience citoyenne» et puissent s’organiser et se mobiliser en conséquence,
– En sanctionnant, au besoin, le régime actuel aux prochaines échéances électorales, pour lui signifier politiquement notre opposition ferme et catégorique au projet de société ultra-libertaire qu’il promeut pour nos enfants, s’il s’entête à mettre le parti des bailleurs-lobbyeurs au-dessus de la Patrie des valeurs,
– En exigeant désormais de nos gouvernants l’intégration des valeurs socioculturelles, morales et religieuses historiques de notre peuple dans les curricula de l’éducation nationale, afin de prémunir nos enfants contre les dynamiques de perversion qui les guettent.
Nous devons faire notre choix, ici et maintenant. Car personne d’autre ne le fera à notre place. Personne.
* * *
«Au Sénégal, il existe une forme de pression sociale qui pousse la justice à sévir fortement. Elle est notamment le fait des islamistes et d’une partie de l’opinion publique hostile aux personnes ayant des orientations sexuelles différentes.» (Me Sidiki Kaba)
«L’homosexualité est un problème de société. Elle n’a pas commencé aujourd’hui et ne s’arrêtera pas aujourd’hui. Nous la gérerons de façon responsable avec toutes les forces vives qui sont mobilisées pour donner une SOCIETE MODERNE au Sénégal.»?(Candidat Macky Sall, Mars 2012)
A. Aziz Mbacké Majalis
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