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Vers Une Nouvelle Orientation Stratégique Pour La Survie Des Entreprises De Presse

Vers Une Nouvelle Orientation Stratégique Pour La Survie Des Entreprises De Presse

La presse joue un rôle éminemment important dans la construction d’une opinion publique solide et pressante face aux actions des gouvernements. Elle est incontournable dans un monde où la circulation de l’information est à la vitesse de la lumière.

Cependant, il semble que les investisseurs dans le secteur de la presse se passent d’une étude de marché rigoureuse avant de se lancer. En effet, il existe un réel paradoxe entre le foisonnement des entreprises et le niveau d’élasticité que présentent les opportunités au Sénégal. Ce n’est pas aberrant de se demander comment ces dites entreprises arrivent à couvrir les charges et dégager des bénéfices ? Peut-être qu’elles ne sont pas créées à but lucratif mais pour la promotion politique.

On entend souvent les patrons de la presse privée se lamenter. Ils usent parfois de menaces et de comparaisons à la limite insensées avec les média publics pour susciter l’intervention de l’Etat. Sous Wade, ils ont bénéficié d’une amnistie fiscale et d’autres avantages. Cela parait normal car l’Etat, en plus de la redistribution et de l’affectation de ressources, a un rôle de régulation. Il est de son devoir d’accompagner des acteurs économiques en subventionnant le papier ou l’électricité. Mais, la fréquence de l’intervention publique dans le secteur laisse apparaître une faiblesse de l’Etat et une incapacité managériale des patrons de presse.

Nos gouvernants depuis 1960 ont toujours, quelle que soit la forme, cherché à museler la presse. Ils ont plus peur du 4ème pouvoir que d’autres secteurs qui contribuent davantage au PIB. La part de la presse dans le secteur tertiaire pour ne pas dire dans la richesse nationale est vraiment négligeable. Pourtant, les paysans, les ingénieurs, menuisiers, commerçants, éleveurs s’investissent corps et âme pour nourrir, moderniser, meubler, fournir des biens aux populations sénégalaises sans aide ni subvention. Ils n’ont jamais bénéficié d’un local à coup de milliards à l’image de la maison de la presse alors que le fruit de leur travail est très important. Leur seul problème c’est de ne pas disposer d’un moyen de pression sur l’Etat. Les accointances des patrons presse avec le pouvoir rendent illisibles les performances économiques du secteur et précipitent incessamment vers son déclin.

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Le marché publicitaire principale source de revenu de la presse privée hormis la vente de journaux n’est pas élastique. Les budgets des annonceurs n’observent pas de hausse. Seuls les secteurs de la lessive, de l’agroalimentaire et de la téléphonie mobile offrent des opportunités aux médias privés.

Par ailleurs, la multiplication des entreprises de presse n’est pas suivie d’une augmentation de la publicité. Les annonceurs répartissent la commande en fonction du positionnement des médias.

L’intensité de la concurrence due au caractère fragmenté du secteur a poussé beaucoup de groupes de presse à tenter la diversification pour être dans une dynamique de performance. Mais le faible potentiel du marché imposé par la conjoncture recommande une nouvelle orientation stratégique.

Les patrons de presse, pour ne pas éprouver notre budget national, devront envisager des stratégies de recentrage et de fusion. Il faut dire qu’on n’a pas besoin d’avoir un journal, une radio, un site Internet, et une télé si on n’a pas les moyens. Il faut recentrer, à savoir éliminer les activités non rentables et se concentrer sur ce qui marche. Ainsi, les coûts seront réduits avec l’effet d’expérience et l’innovation plus rapide dans la mesure où les efforts sont concentrés sur une seule niche.

Une autre orientation consiste en la fusion entre groupes de presse. On déplore le nombre de partis politiques au Sénégal mais on n’est pas loin de faire de même avec la presse.

Il est plus judicieux de se regrouper dans des entités solides financièrement et matériellement que d’être dans un secteur fragmenté inopportun, où règnent la concurrence déloyale et le manque de contrôle.

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Les problèmes managériaux déterminants dans l’échec des entreprises de presse ne sont pas à occulter. Un journaliste ou spécialiste de la communication n’est pas un gestionnaire. Il faut déléguer la gestion aux spécialistes si on n’a pas les capacités afin d’éviter d’être omniprésent au point de ressembler à un hyper taylorien. Il faut, ensuite, utiliser des outils modernes de management, fixer des objectifs et évaluer les performances.

Il faut enfin, recourir au benchmarking (imiter ce qui marche chez le concurrent ou une autre entreprise) et non entretenir une rivalité personnelle entre patrons de presse. Car, les compétents et valeureux travailleurs des médias privés ne doivent pas souffrir des « guéguerres sordides » entre dirigeants. On doit plutôt les valoriser en montrant leurs aptitudes managériales.

L’Etat dans la perspective d’assainissement et de redynamisation du secteur de la presse doit conditionner les aides et subventions à des objectifs de performance. Au lieu de considérer les patrons de presse comme des enfants gâtés de l’économie nationale, l’Etat doit appuyer la formation de leur personnel aux outils et règles du management actuel. Mieux, il doit imposer un cahier de charges qui empêche le foisonnement et le mécénat politique au grand soulagement du contribuable sénégalais.

 

SILIMA NIEUMBE DIOUF

mohalamdiouf@gmail.com

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