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Le Mandat Présidentiel S’impose à Tout Le Monde

Le Mandat Présidentiel S’impose à Tout Le Monde

« Les institutions doivent être stabilisées parce qu’elles contribuent à la régulation des rapports sociaux » Locke

Lors de son discours à la Nation le 31 décembre 2015, le Président Macky SALL, a indiqué que dans le projet de réforme qu’il a initié, figure la réduction du mandat présidentiel de sept (7) à cinq (5) ans avec applicabilité au mandat en cours.

Au lieu de dissiper la suspicion et le doute que d’aucuns entretenaient, cette déclaration a installé une vive controverse dans laquelle les uns soutiennent que nonobstant un avis contraire du Conseil Constitutionnel, rien ne peut empêcher la réduction du mandat en cours de sept (7) à cinq (5) ans ; tandis que d’autres estiment que l’avis du Conseil Constitutionnel doit prévaloir.

Cette controverse qui va crescendo, et qui est en réalité sans objet, pourrait être constitutive de prodromes de troubles si, les uns et les autres ne se ravisaient pas, pour se rappeler que lorsque les yeux sont béatement fixés sur un désir donné, ils ont tendance à se fermer sur la réalité.

A ce propos, l’on eût dit que depuis que la question de la réduction du mandat en cours s’est posée, beaucoup d’intervenants se sont contentés de rester à la surface de l’eau pour parler de procédure au sens général du terme.

Or, en l’espèce comme ailleurs, le juge se doit d’aller au fond pour déterminer les caractéristiques du mandat dès lors qu’il s’agit de modification.

Mais pour cela il faut commencer par poser les termes du problème de manière claire ; car la question n’est pas de savoir si le peuple souverain peut modifier telle ou telle disposition de la Constitution, parce que la réponse à une telle question relève de l’évidence.

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Pour l’affaire qui nous préoccupe, la question qui se pose en droit, est de savoir si le Président élu, peut prendre la décision d’INITIER un projet de loi constitutionnelle pour réduire le mandat en cours ? En d’autres termes, le Président élu peut-il disposer du mandat présidentiel pour initier à sa guise des projets de modification allant dans un sens ou dans l’autre ?

A cet égard, nous savons que le mandat en droit civil est caractérisé par le fait d’être consensuel (c’est-à-dire qu’il est établi d’accord parties à la suite de négociations), et essentiellement révocable (chacune des parties peut en faire cesser les effets).

Alors, qu’en est-il du mandat présidentiel ?

Pour répondre à cette interrogation, il faut remonter vers la fin du 19éme siècle. En effet, voyant que les négociations avec le Comte de Chambord pour son rétablissement sur le trône de France achoppaient sur la question du maintien ou non du drapeau tricolore, l’Assemblée Nationale à majorité monarchiste décida que le  Maréchal Mac-Mahon dont la durée du mandat n’était pas précisée « Garderait la place » en attendant que les négociations aient avancé. Au cours de celles-ci, les propositions des candidats variaient entre dix (10) ans (par Albert Duc de Broglie, Chef de l’opposition monarchique) ou cinq (5) ans proposés par la Commission de l’Assemblée Nationale.

A titre transitoire, une loi constitutionnelle fut votée le 20 novembre 1873 ayant pour objet de confier un mandat de sept (7) ans à titre PERSONNEL, au Maréchal Mac-Mahon Duc de Magenta.

Avant l’expiration de ce mandat, et pour faire barrage à toute possibilité de retour à quelque forme monarchique et asseoir définitivement la forme républicaine de l’Etat (art 103), le Peuple de France avait adopté par référendum le 25 février 1875, une loi constitutionnelle qui consacrait en son article 2 le caractère IMPERSONNEL du mandat présidentiel (Manuel de Droit constitutionnel Olivier GOHIN, p.775).

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A partir de cette date, et contrairement au mandat de droit civil, le mandat présidentiel était devenu impersonnel et sa durée était préfixée souverainement par le peuple.

Le mandat présidentiel est par excellence le moyen par lequel le Peuple exerce sa souveraineté, c’est pourquoi, il se définit comme la limite de temps pendant lequel, le Peuple, à l’issue d’une opération d’assentiment (le suffrage) marque sa confiance à une personnalité en lui déléguant sa souveraineté pour une durée de temps unilatéralement préfixée. Aussi, la personnalité qui est bénéficiaire de ce mandat ne peut prendre l’initiative d’en modifier la durée sans aller à l’encontre de l’article 3 alinéa 2 de la Constitution.

Il a été vérifié qu’à l’instar des Etats républicains et démocratiques, la Constitution de notre pays n’a pas inclus les cas de réduction ou d’augmentation de la durée du mandat présidentiel en cours.

Or, selon un principe fondamental de droit Constitutionnel, c’est uniquement lorsque les modifications sont opérées dans le cadre et selon les modalités que la Constitution définit, que le Peuple conserve sa souveraineté dans une démocratie équilibrée. Parce qu’il est impersonnel et que sa durée est préfixée souverainement par le Peuple, le mandat présidentiel constitue un des principaux verrous de protection de notre système politique.

Il n’est pas douteux que s’il était donné au candidat élu la possibilité de déroger à la volonté populaire, pour modifier le mandat en cours, un candidat peu imbu des valeurs républicaines, pourrait une fois élu, être tenté de profiter de la période dite de grâce durant laquelle il bénéficie d’une large majorité sociologique, pour organiser un référendum et modifier à sa guise le mandat qui lui est confié.

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En tout état de cause, ceci montre à suffisance qu’il serait mal à propos de déplacer la question de la réduction du mandat, du domaine du droit pour l’entraîner vers le champ émotionnel de l’éthique.

De plus, le calendrier républicain ne peut pas relever de l’hypothèse et de l’incertitude (exemple : dans sa livraison du mercredi 30 décembre 2015, le quotidien « Rewmi » sur la date de l’élection présidentielle prochaine écrivait : « Septennat ou quinquennat ? Personne ne sait » ; le même jour, le journal « Libération » parlait de « flou total »).

Sous le bénéfice de ce qui précède, il est permis de rappeler que dans la pratique de la démocratie, il est utile de ne jamais se départir de jugement rationnel ; parce que la démocratie peut provoquer la désunion en créant un univers social et politique où la concurrence de tous devient une règle d’existence pour tous.

Souleymane NDIAYE

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