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Exercice Du Pouvoir Par Le Peuple Au Sénégal : Le Référendum, Un Faux Jeu

Le référendum est un moment de consultation directe du peuple par le pouvoir pour l’amener à se déterminer sur une ou des questions qui engagent son avenir. C’est la raison pour laquelle elles sont importantes en démocratie.

Celui du 20 mars ne déroge pas à la règle même si, par ailleurs, on peut être d’accord ou pas sur son opportunité après le choix du président de ne pas y associer la réduction du mandat en cours.

Qu’à cela ne tienne, les Sénégalais iront aux urnes, le 20 mars. En principe, pour se prononcer sur les 15 points devant faire l’objet du référendum, même si dans les faits, l’enjeu peut être ailleurs.

Malheureusement, le référendum est loin d’être cette voie idéale de l’exercice du pouvoir par le peuple. Nous fondons notre pessimisme sur le fait que le choix des points de réforme n’est pas du peuple. Mieux, ce dernier n’en comprend pas toujours le sens du fait du fort taux d’analphabétisme et enfin le peuple est obligé de se prononcer par ”Oui” ou ”Non” sur un package sans possibilité de nuancer son choix. Autant de raisons qui peuvent techniquement faire douter de l’opportunité d’organiser une consultation populaire de cette nature.

Nous sommes convaincus que si le peuple était consulté sur le choix des points devant faire l’objet de vote, la réforme aurait tenu en compte l’ensemble des propositions de la Commission nationale de réforme des institutions (Cnri) dirigée par Ahmadou Mactar Mbow. À ce propos, le choix fait par le président Sall n’agréé pas tout le monde étant entendu que nombre de propositions comme la séparation des fonctions de chef de parti et de président de la République, l’adoption d’un régime parlementaire, la rupture du lien ombilical entre la Justice et la Chancellerie et bien d’autres points sont laissés en rade.

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Des électeurs analphabètes pour la plupart

Il s’y ajoute que dans la masse des électeurs sollicités, le nombre d’analphabètes est très élevé. Cela concerne les villes mais surtout les zones rurales. Ces électeurs ont du mal à saisir l’enjeu du vote mais surtout à comprendre les 15 points présentés comme devant constituer l’objet du vote. Une équation d’autant plus difficile à résoudre que le choix de la date du 20 mars a été précipité.

La preuve, il nous est arrivé de discuter du contenu du référendum avec des amis qui pensent sincèrement que ce seront les droits des homosexuels qui seront renforcés. Quand nous avons tenté d’expliquer que nous ne voyons pas de points qui renvoient à cela, nos interlocuteurs nous ont assuré que cela est en filigrane dans la formulation de certains points. Or, nous savons bien qu’ils ne savent pas lire…

Bien sûr, scolarité ne rime pas toujours avec intelligence. Et heureusement, au Sénégal, les citoyens non-scolarisés dans la langue de Molière sont parfois beaucoup plus informés et alertes que nombre d’autres estampillés intellectuels. Toutefois, elles sont aussi beaucoup plus promptes à être manipulées et à être victimes d’une mauvaise appréhension des choses.

Toutefois, même parmi les citoyens scolarisés, cette compréhension de la vraie dimension des choses n’est pas chose aisée.

En effet, certains points comme la modernisation du rôle des partis politiques, la promotion de la gouvernance locale, le renforcement des droits de l’opposition, l’élargissement des pouvoirs de l’Assemblée nationale, entre autres, renvoient beaucoup plus à des affirmations de principes généraux qu’à des actes réels à poser. C’est dire qu’il faudra forcément des lois pour leur doter d’un contenu réel et exécutoire. Pour cela, il faudra faire confiance à l’Exécutif et à l’Assemblée nationale, qui, au demeurant, peuvent en limiter le champ d’action ou l’élargir dans le sens souhaité par les populations.

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Notre sentiment est qu’en dehors de certains points clefs comme l’augmentation du nombre des membres du Conseil constitutionnel, la restauration du quinquennat, la participation des candidatures indépendantes à toutes les élections et bien d’autres points précis, il y a beaucoup de généralités dans la formulation des propositions, ce qui laisse place à beaucoup d’interprétations qui peuvent en altérer le contenu.

Pis, on demande aux citoyens de se prononcer sur un package. Il faudra répondre par ”Oui” ou ”Non” sans possibilité de discuter d’un ou de points de la réforme qui n’agréent pas outre mesure.

Certains seront alors obligés de répondre par ”Oui” même s’ils ne sont pas d’accord sur tous les points et d’autres par ”Non”, même s’ils approuvent des aspects importants de la réforme.

Les populations ont peu le choix, en réalité. Elles sont beaucoup plus conditionnées qu’on ne le croit.

Comme quoi, le référendum n’est pas forcément la panacée dans notre démocratie.

 

Assane Samb

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