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Gorée : Capitale De Souffrances

Gorée : Capitale De Souffrances

 L’ancien conservateur de la maison des esclaves de Gorée, Feu Boubacar Joseph Ndiaye, disait :

«Ce sanctuaire africain qu’est la Maison des esclaves de Gorée fut capitale de souffrances et de larmes, car des innocents sont morts ici, victimes du temps de la honte.»

Malheureusement, l’île mé­moire est devenue la capitale de souffrances pour les innocents élèves du Sénégal. En effet, chaque jour, des centaines d’élèves, voire même plus de mille élèves de tous âges, convergent vers l’île pour visiter surtout la Maison des esclaves de Gorée. Mais aujourd’hui, ces élèves vivent un véritable calvaire pour passer, ne serait-ce qu’une demi-journée à Gorée, en attendant leur tour de passage dans la Maison des esclaves. Partout, ils sont chassés comme des malpropres, au jardin, dans les écoles, au camp des sapeurs et la liste est loin d’être exhaustive. Ils sont obligés  de passer la journée sous le soleil et sous le vent, essayant tant bien que mal de réchauffer leur repas, avec bien sûr, le risque de le manger plein de poussière.

Si les esclaves n’étaient libérés qu’une fois dans la journée pour satisfaire leurs besoins, les élèves aujourd’hui ont toutes les peines du monde pour satisfaire leurs besoins à Gorée. J’ai rencontré dans une ruelle une petite fille complètement courbée, soutenue par deux de ses camarades. Elle ne pouvait pas marcher, car elle avait envie de pisser et ne trouvait aucun endroit pour le faire. Pourtant, ces fils du Sénégal, laissés à leur propre sort dans cette étroite île, ont fait des centaines de kilomètres pour venir honorer la mémoire de leurs ancêtres martyrs, victimes de la barbarie des esclavagistes européens. Mais on lit dans leurs regards perdus, entassés sous les arbres ou sous le soleil, le désarroi qui rappelle celui de leurs ancêtres esclaves attachés à leurs chaînes dans cet étrange marché dont parlait l’illustre Joseph Ndiaye.

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Et aujourd’hui, ce sont les descendants des anciens esclavagistes, venus passer de bonnes vacances en Afrique et qui n’ont cure de ce qui s’est passé dans cette île des martyrs, qui sont accueillis à bras ouverts et dans de somptueux cadres avec des guides à leur service.

Je me demande ce que fait la municipalité de Gorée ? La moindre des choses serait d’offrir un cadre d’accueil pour ces élèves qui ne passent que le temps d’une demi-journée sur l’île et qui tant bien que mal contribuent financièrement par les tickets de chaloupe, d’entrée au musée, à la Maison des esclaves et leurs achats dans les boutiques de Gorée. Si la municipalité de Gorée semble ne pas être préoccupée par le sort de ces fils du Sénégal, c’est l’Etat qui doit prendre des mesures pour résoudre ce problème, car Gorée est un patrimoine national où tout Sénégalais doit se sentir à l’aise et toujours enthousiaste d’y aller. C’est une véritable injustice que vivent les élèves sénégalais à Gorée.

L’île serait-elle condamnée à toujours être une terre de souffrance pour les enfants sénégalais ?

 

Saliou NDIAYE

Professeur d’histoire et de géographie au Cem de Keurgoumack

 Diourbel

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