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De L’école élémentaire à L’université, Je N’ai Jamais Vu Mes Enseignants Faire La Grève 

De L’école élémentaire à L’université, Je N’ai Jamais  Vu Mes Enseignants Faire La Grève 

«La grève est un acte démocratique détestable, car elle fait toujours des victimes innocentes» (Extrait du roman La malédiction de Raabi de M. Guèye. Ed. Nei/ceda).

Je n’ai jamais voulu me prononcer publiquement sur les grèves perpétuelles des enseignants de mon pays, tant mon respect et mon admiration pour ces enseignants ont toujours été très profonds depuis mon âge de dix ans.

A la veille des indépendances, l’ancien combattant et mutilé de guerre Abdoulaye Ndiaye Boly, chef du Quartier Ndar Toute, m’a inscrit à l’école Alfred Dodds de Saint-Louis. C’était à la veille de l’indépendance du Sénégal. C’est ainsi que des enseignants comme Fall Massourang l’élégant, Kane Mame Saliou le généreux, Camara Oumar l’ancien combattant, Emile Sarr le rigoureux, Laay Naar le beau gosse aux cheveux lisses et Abdoulaye Thiam le grand footballeur qui avait battu l’Equipe de France en 1963 se sont succédé à la table du maître pour me faire lire Mamadou et Bineta et La lecture et le français en Afrique.

Ha ! Oui ! Il faut le souligner, ces enseignants n’étaient pas de simples enseignants au sens réducteur du terme. Ils étaient de vrais maîtres-éducateurs. Nous les respections. Nous les admirions. Nous les craignions aussi. Combien de fois, tout comme mes camarades de classe, j’ai détalé comme un lièvre en voyant venir le «maître» ? Il ne fallait surtout pas que je me fasse repérer par lui, en train de flâner dans les rues de Saint-Louis, au lieu d’aller apprendre mes leçons, lire, écrire et faire mes devoirs.

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Ces enseignants que j’ai connus et adorés dans les années 50 et 60 étaient non seulement compétents et amoureux de leur métier qu’ils considéraient comme un véritable sacerdoce, mais ils étaient propres et beaux. Ils étaient élégants et généreux. D’ailleurs, je dois avouer que de l’école élémentaire à l’Institut polytechnique et Université d’Etat de Virginie (Usa), je n’ai jamais vu un de mes enseignants aller en grève. En ce temps-là, la grève était une exception, mais pas une règle qui s’appliquait de manière intempestive. Ces enseignants-éducateurs de l’élémentaire et du collège, je ne les ai jamais vus faire la grève. Et pourtant, tout le monde sait que le Blanc colonisateur n’a jamais bien rémunéré les services du Nègre colonisé. J’ai toujours souhaité devenir enseignant, car j’admirais en silence les instituteurs, en particulier Abdoulaye Thiam, qu’Allah (Swt) soit satisfait de lui et M. Adam F. Moreau, que Dieu lui prête une très longue vie.

Hélas ! Les enseignants de cette envergure sont une génération presque entièrement éteinte. Malheureusement, ils n’ont pas eu le temps de former des maîtres-éducateurs à leur image, ils ont été surpris par la mort et emportés au Paradis. Ils ont rejoint les vertes prairies célestes en nous laissant une autre race d’enseignants  grévistes, râleurs et radicaux.

Ce nouveau type d’enseignant est majoritairement constitué d’instituteurs et de professeurs qui passent le plus clair de leur temps à débrayer et à abandonner leurs élèves. Certains d’entre eux préfèrent dérober des heures de travail à l’école publique pour aller les monnayer dans le privé et chez des particuliers nantis. C’est ce qu’on appelle le «xar màtt».

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Et pourtant, si vous consultez les grilles salariales de la Fonction publique, vous constaterez aisément que très souvent, à indice égal, l’enseignant est presque toujours mieux payé qu’un autre fonctionnaire de même grade. A cela s’ajoute le fait que l’enseignant est le seul agent de l’Etat qui bénéficie, chaque année, de près de trois mois vacances.

Si j’avais suffisamment de sagesse et de notoriété pour être écouté par les enseignants grévistes, je leur aurais conseillé d’adopter une autre forme de lutte, celle-là qui préserverait nos enfants du sacrifice éducatif. Je leur aurais recommandé de renoncer à réclamer tout ce qu’ils veulent, comme ils le veulent, là où ils le veulent, tout de suite et maintenant. Je leur aurais conseillé de faire prévaloir le sacerdoce qui caractérise leur noble métier. Je leur aurais suggéré de faire preuve de patriotisme, cette qualité majeure qui doit animer tous ceux qui se disent Sénégalais et qui seraient prêts à mettre leur vie en jeu pour défendre la patrie du Lion et du Baobab.

A défaut de l’adoption de ces principes, que ces enseignants poussent donc leur radicalisme en ayant la dignité de renoncer volontairement à ces salaires et indemnités qu’ils s’empressent de percevoir chaque fin de mois, car ils sont loin de mériter ces émoluments.

Si je pouvais me faire écouter, j’aurais fait savoir à tous les enseignants grévistes radicaux de comprendre qu’aucun gouvernement ne pourra véritablement les rémunérer à la juste valeur de leur haute mission. Cette mission qui consiste à forger l’avenir de nos enfants, les espoirs de notre Nation. Je suis convaincu que seul Dieu (Swt) peut leur payer réellement ce qu’ils méritent. Je leur aurais rappelé également que percevoir un salaire sans travailler, c’est comme avaler des braises et les braises cela ne se digère jamais. Un salaire perçu après un refus volontaire de travailler ne se digèrera jamais.

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Enfin, j’inviterais fortement le chef de l’Etat, gardien de la Constitution, à faire preuve de compréhension, mais également de fermeté pour sauver l’école publique. Je lui conseillerais de veiller scrupuleusement à faire respecter les promesses faites aux enseignants et dans les délais les plus courts. C’est ainsi que son gouvernement pourra assurer la paix, la cohésion sociale et la sérénité dans l’environnement scolaire et universitaire de notre pays.

 

Moumar GUEYE

Ecrivain

moumar@orange.sn   

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