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Notre Forêt De Bois Pillée, Volée Et Transférée Sous Nos Yeux

Notre Forêt De Bois Pillée, Volée Et Transférée Sous Nos Yeux

«Le Sénégal a perdu plus d’1 million d’arbres depuis 2010. Alors que les exploitants basés en Gambie ont empoché 140 milliards de francs Cfa en exportant ce bois vers la Chine.» (Source : interview de l’ancien ministre Ali Haïdar, titre qui fait la Une du Populaire du vendredi 27 mai 2016). Ainsi la Casamance, grenier du Sénégal, sa forêt, son dernier poumon vert, à la végétation luxuriante et odorante et aux essences variées, a déjà perdu plus d’1 million d’arbres en six ans. C’est dire qu’à ce rythme d’exploitation sauvage, «elle n’existera plus dans deux ans», enfonce l’écologiste. Effarant ! Un pillage organisé de son précieux bois de vène —bois rose appelé palissandre du Sénégal—  très prisé dans le monde de l’ébénisterie, pour meubles de luxe, qui a rapporté 140 milliards de nos pauvres francs à ce trafic illicite.

«Plus de 200 engins roulants traversent la frontière entre le Sénégal et la Gambie sans être inquiétés», déplore l’ancien ministre, reconnu à ce jour par la Communauté internationale com­me un des plus grands spécialistes de l’environnement au monde. Aucune réaction de notre part. Et au cœur de cette dégradation écologique, la Gambie ; un Etat anathématisé qui, assidûment, prend la liberté d’abattre nos arbres, traficote impunément sur notre dos nos propres ressources, au vu et au su des Autorités qui nous gouvernent et président à nos destinées. Nos Gouvernants, comme tétanisés, ferment les yeux, «motus bouche cousue» sur ces pillages de notre forêt et saccage de notre environnement. Une mainmise sur nos biens, se rendre maître de notre patrimoine commun. C’est incroyable ! Du jamais vu ! «Ndax li du yabaaté !» Sorti promptement de sa case, s’invite et se manifeste le vieux sage traditionaliste : «Déeeedet ! Mukk nak ! Du yabéel dé ; loo nangu nuy jel di la ko ann, di la ko ték, di la ko sef, dagaanna ; yow la néex, ya ko nangu, ya ko méyé, koon nak dagaanna.»…

Et voila que surgissent «les médecins après la mort»«Sénégaal, wax… waxrék, noo ci menn ñep.» Où s’étaient-ils donc terrés quand ces fossoyeurs s’activaient à la déforestation de cette belle région jadis visage florissant du Sénégal ? Comme toujours, des «médecins après la mort» qui prennent des mesures de circonstance pour se disculper, mais tentatives vouées indéfiniment à l’échec ; un feu de paille, des actions qui ne font pas long feu  par manque de suivi ; la maintenance… l’entretien des acquis et le manque de suivi… de supervision, c’est là que le bât blesse. Notre défaut majeur. Les faits sont là et parlent d’eux-mêmes : après la tragédie du Joola, où sont donc passées les mesures draconiennes et dispositions coercitives contre la surcharge des Cars rapides ? Cars rapides et  bus Tata se disputent aujourd’hui les surcharges à qui mieux mieux, rivalisant dans la performance de l’indiscipline et du je-m’en-foutisme. Que sont devenues toutes ces mesures annoncées à cor et à cri ? Jetées aux oubliettes depuis Mathu­salem. «Nii rékk nak, coow­ rék» (beaucoup de bruit pour rien).

Pour confirmer ce que nous avançons et stigmatisons, voulez-vous vous donner la peine -«bu léen ko tayal»- de faire un saut en plein jour, si bref soit-il, au mythique Boulevard général De Gaulle, le spectacle qui s’offrira à vous est affligeant ; vous en sortirez le cœur meurtri ! Voie triomphale, qui équivaut, pour nous, aux Champs-Elysées de Marianne, où se déroulent nos parades du 4 avril, Commémoration de notre accession à la Souveraineté nationale, toutes les composantes de la Nation en Habits de lumière …oh les valeurs de la République en marche… ! Le front haut, la démarche altière, en revue sous nos yeux ravis ! L’Obélisque, symbole fort de notre Indé­pendance, majestueux, tuto­yant le ciel, qui surplombe de la blancheur de sa grâce notre beau Peuple en liesse, le cœur en fête… c’est bien tout cela qui est aujourd’hui, de nouveau, déprécié, dévalorisé, déconsidéré. Eh bien oui ! Ce lieu sacralisé, qui appelle un respect absolu, épuré, débarrassé de ses défauts, de tout ce qui était inopportun et que nous avions fustigé dans le passé, est redevenu un marché à ciel ouvert ; vendeurs, marchands ambulants et de «par terre» qui y avaient élu domicile, puis délogés et dégagés, sont de retour, plus nombreux que jamais ; ils s’y affairent… et leurs tentes, parasols, parapluies… s’aperçoivent à perte de vue !

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Ah le manque de suivi ! Cette plaie qui s’apparente à un manque de sérieux ! Le grand drame de nos autorités, de ceux qui nous gouvernement, c’est de ne pouvoir assurer la continuité d’une action. L’occasion est propice pour pointer du doigt l’encombrement, véritable capharnaüm, qui sied au rond-point de Liberté VI, redevenu tout aussi, après son désengorgement d’il y a à peine quelques mois, un marché à ciel ouvert ; un passage très emprunté, mais aujourd’hui obstrué, bouché par ce marché imposé de force à notre cité ; et, le plus révoltant, à proximité, s’étire à l’infini… beau et aéré, le grand boulevard de l’ancienne piste où se développe à présent un marché naissant ; nous pourrons constater des tentes, parasols, parapluies… y fleurirent comme des champignons. Ahuris­sant ! Mais, où êtes-vous donc, Monsieur le maire ? Doit-on aller vous cueillir, Monsieur Agne, vous tirer de votre léthargie, pour vous voir enfin crever l’abcès ? Si on n’y prend garde et à force de complaisance, de  «masla», c’est tout Dakar, vitrine-prestige du Sénégal, qui sera transformé en marché de «fegg jaay» -des balles de friperie et de chaussures amorties, déversées, provenant des morts de l’Occident-, de verroteries et d’autres produits made in China pour Pays pauvres et à la durée de vie d’une rose.  «Ñii da ngay waaru quoi ! Kén xamméetul Ndakaaru ndax ñoom ; fuléen néex sampp ; fuñu dacc deju.» Et on laisse prospérer… Mais dans quel pays sommes-nous ? «Lii da fa mena wéey…» Jusqu’à quand ? Il faut que ces gens comprennent une fois pour toutes que «Réewi ­taax dafa am ay waréef» -ordre et discipline-, «du lu méeñn sa xel rék nga déf.»Et comment ne pas saluer au passage la fermeté de caractère de Monsieur Papa Sadikh Seck, maire des Hlm, qui a su combattre l’indiscipline et le je-m’en-fichisme à l’origine des gros embouteillages… en procédant au désencombrement du marché et de ses alentours ; de tout ce qui provoquait un bouchon monstre dans la circulation… libérant la cité des entraves d’un laisser-aller qui pourrissait la vie de ses habitants. Quelle belle leçon de courage et de pragmatisme à retenir ! Et les habitants de sa commune qui respirent à présent à pleins poumons cette bouffée d’air frais se souviendront à coup sûr demain. Ils n’oublieront pas aux prochaines élections locales de leur délivrance du joug de ce désordre effrayant qui perturbait leurs activités journalières dans leur quartier. Ils s’en souviendront certainement, reconnaissants, quand il leur faudra conclure un nouveau pacte de confiance avec leur édile. Et ce sera très bien ainsi.

De Abdou Diouf à Macky Sall, tous nos gouvernements se sont montrés d’une faiblesse coupable, tolérance laxiste vis-à-vis du régime Jammeh. En 2004, Abdoulaye Wade au pouvoir et au sommet de la gloire, des gardes forestiers avaient intercepté et confisqué ses deux camions surchargés de vène s’apprêtant à traverser la frontière. Eh bien ! Accrochez-vous ! Curieux personnage aux accents tragiques et d’une hardiesse effrontée, Yaya Jammeh exigea de mauvais ton à nos Autorités de lui restituer sans délai ses deux camions. Vous devinez la suite ! Camions et conducteurs furent libérés dans les minutes qui suivirent… avec des excuses… des regrets… malentendus et autre «ay mbookk la ñu». Inadmissible et inacceptable d’un Etat, Nation libre, souveraine et démocratique.

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Yaya Jammeh qui souffle à son gré le chaud et le froid ou selon ses intérêts, est assurément le pourvoyeur… à l’origine de ce qui alimente la mésentente dans la crise casamançaise qui perdure. Attisant la discorde, la gravité et la lâcheté d’une telle attitude, un acte répréhensible entre Etats, de surcroît des pays, proches voisins dont, exalte-t-on, les populations sont de la même veine, donc appelées à se lier d’amitié parce que liées par le sang. Le Sénégal et la Gambie ne partagent-ils pas une communauté de langue et de destin qui se sont forgés dans la nuit des temps ? Les procédés innommables de Jammeh, qui révoltent, et que soutiennent des discours cyni­ques qui édifient, nous aideront-ils à admettre enfin que les rapports de l’homme avec le Sénégal sont pleins de traîtrises ?

Et ce qu’on attend d’un Etat qui se respecte et qui tient à se faire respecter, c’est de mettre en avant la sécurité ; conserver l’intégrité du territoire national, et la sauvegarde de la Nation qui n’est rien d’autre que la Communauté humaine que nous formons.  Nous attendions de nos Gouvernements successifs une réplique ferme et énergique, une verte semonce et mise en garde musclée de leur part. Mais qu’est-ce qui nous a été servi de dissuasif à l’égard de Jammeh ? Quelles représailles pour le contraindre à arrêter ses coups bas et revenir à la normalité des saines relations entre Etats ? Tuss- dara-rien-nada sinon de révéler et dénoncer ses faits….   Et éveille notre attention le philosophe antique, un conseil averti : Rien n’est plus dangereux pour une Nation que la faiblesse de ses dirigeants ; leur manque d’autorité, de courage, de fermeté et de détermination expose cette même Nation à tous les risques et périls. «Té muy dëggit.»

Mais, à bien réfléchir, il y a assurément une connivence, complicité occulte, un accord tacite entre des nationaux sans fibre patriotique et la Gambie qui s’adonne depuis des lustres à ce qu’on assimile en diplomatie à du banditisme d’Etat. Ces compatriotes, obnubilés par l’appât du gain, avec comme devise «Après moi, le déluge», ne visent à vrai dire que ce qui leur est profitable et offre un avantage matériel. Ils ne sont donc pas prêts à sacrifier leurs intérêts personnels à l’intérêt public. «Du ñu ko déf.» Si la raison de ce mutisme de nos autorités est à chercher et expliquer dans une pudeur de sentiment, comme de protéger, assurer la sauvegarde d’un voisinage parental, nous n’avons rien à f… d’un soi-di­sant «Mbooka» si l’autre n’en a cure ou n’en a jamais tenu compte. A preuve : le récent conflit de la transgambienne parmi tant d’autres illustre à suffisance, à leurs yeux, que le Sénégal n’est pas digne de considération et de respect.

Nul ne peut douter de l’évidence ; de ce qui est clair et manifeste comment le contester ? Vos réalisations sont visibles dans tous les secteurs de la vie nationale et sont, pour la plupart, des vérités palpables, Monsieur le président de la République. Toujours sur la brèche, en perpétuel mouvement… entreprenant et doublé d’un tempérament de gagneur et en quête d’innovations,  homme courageux, d’avant-garde et de votre temps, ai-je dit, il est pratiquement reconnu de tous que vous êtes un gros travailleur. A moins d’être de mauvaise foi ou pour renchérir sur vos réalisations, qui tient de la politique politicienne, et c’est de bonne guerre, personne ne peut dénier ou réfuter que bien des choses ont changé dans notre pays et bougé dans le bon sens. «Wax dëggit ci jaamu Yàlla la bokk. Wala déet ?» Comprendront ceux qui voudront comprendre qu’une œuvre humaine n’est jamais parfaite et que la demande sociale, talon d’Achille de tous les Gouvernements du monde, ne sera jamais pleinement satisfaite. «Munul né.» C’est tenter l’impossible. Assouvir ce désir sera toujours la poursuite d’un idéal pour tous ceux qui gouvernent leur Peuple. Mais l’essentiel est d’agir : autant que faire se peut ; faire aussi bien que l’on peut. Et ce sera très bien ainsi. Car faire une telle promesse d’assurer leurs demandes et de couvrir tous leurs besoins aux populations tient de la fabulation -caractéristique de certaines maladies mentales des adultes- et de la pure démagogie. «Kén munu koo facc lu dul déf ci loo menn. Da ñu léen di nax ; séen cartes dong na ñu soxla.»Nous vous encourageons donc, Monsieur le Président, à persévérer dans la voie que vous vous êtes tracée, car la réussite, un heureux résultat, est au bout de l’effort. Dieu vous y aidera et assistera !

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Néanmoins, pour revenir à l’objet de ce texte qu’est l’appropriation de notre forêt de bois, votre erreur, Monsieur le Président, une action maladroite et préjudiciable, c’est d’avoir relevé sans raison valable l’écologiste Ali Haïdar de son poste ministériel. Accusé de tous les péchés d’Israël dans son domaine de compétence et d’intervention, vous avez agi délibérément ou, faut-il le dire, subi la pression de certains lobbies de la pêche et des puissantes industries de charbon de bois, allergiques à tout contrôle et réglementation et rétifs dans leurs activités respectives. Devenu encombrant voire gênant parce que très regardant… une priorité se dégage : s’en débarrasser proprement, le faire partir, mais d’une manière officielle, qui soit licite et civilisée aux yeux de l’opinion.  Si c’était le cas, vous n’auriez jamais dû vous laisser attendrir… et céder à leurs récriminations, Monsieur le Président. C’est une méprise, fâcheuse initiative, pensons-nous, d’avoir destitué l’homme d’Etat. «La Patrie avant le parti», Très belle formule, un slogan porteur qui a été scandé et qui a animé tous vos meetings de campagne lors de la dernière Présidentielle, Monsieur le Président. Le ministre Ali Haïdar n’a-t-il pas été remercié ou plus exactement liquidé au seul profit d’un politicien professionnel, ou pour satisfaire, caser un transhumant de poids -ce qui est assez courant-, même s’il ne réunit pas les conditions requises pour le poste ? La question s’impose de savoir qui au Sénégal présente un meilleur profil que l’écologiste pour l’environnement, Monsieur le Président ? Est-on prêt à oublier de si tôt le rôle qu’il a joué avec son équipe de plongée dans l’épave du naufrage du Joola ?

Nous allons conclure. Autorités, gouvernants, expliquez-vous !  Vous ne pouvez ne pas savoir, être au courant de cette agression mortelle de notre patrimoine -car c’en est bien une-, une atteinte grave à l’intégrité de notre environnement, qui doit être protégé. Notre Peuple veut savoir. C’est son droit de s’informer ! Il piaffe d’impatience, éclairez-nous ! Et de grâce, Monsieur le président de la République, mettez-nous désormais dans vos choix «L’homme qu’il faut à la place qu’il faut» ; des hommes qu’il faut à leur juste place pour le mieux et «on accélère», augmente la cadence… vivre au rythme de notre temps. Vous verrez que ce sera bien mieux ainsi. Car celui qui fait l’objet d’un choix, considéré parmi ce qu’il y a de meilleur pouvant traiter ex professo et diriger ce qui est de son domaine, sachant ce dont il parle, en être imprégné -à l’instar de Madame le ministre de la Santé-, saura œuvrer efficacement pour la grande et noble cause qui nous est commune et si chère : Un Sénégal émergent.

 

Etienne Mathurin DIOP

Liberté VI – Dakar

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