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Hcct : Les Défaillances Du Système Représentatif 

D’une élection à une autre, il y a toujours des analyses à faire et des leçons à tirer. Et pour parler de celle que nous venons de vivre, avec les hauts conseillers des collectivités territoriales, elle constitue un prétexte pour repenser globalement à la problématique de la représentation de la population au sein des assemblées électives comme l’Assemblée nationale, le Conseil municipal et le Conseil départemental. L’option faite pour une assemblée représentative dans la marche de notre système démocratique ressuscite un débat entretenu jadis par une certaine élite sur les notions de gouvernement représentatif, de régime représentatif ou de démocratie représentative…

Ces notions traduisent à peu près la même chose. Elles se définissent généralement comme un système politique dans lequel il est reconnu à des élus le droit d’exercer, à travers une assemblée, la fonction de représentation de la population.

Ces élus n’ont de légitimité qu’au sein de l’assemblée qu’ils constituent, leur élection n’est donc pas une manifestation de la volonté individuelle, mais plutôt une fonction exercée au nom de la population. Ils doivent se mettre au service exclusif de l’ensemble des citoyens et non pas seulement pour les intérêts de leur parti ou coalition politique.

Le parti politique épouse par essence un idéal commun à un groupe d’individus, il présente des candidats aux élections et c’est la population qui apprécie si elle doit les élire ou pas. Il y a donc dans la pratique tout un mécanisme porté principalement par le mode de scrutin qui a une influence sur le choix final. Mais dès que les candidats sont élus, ils deviennent des relais entre leurs assemblées respectives et leurs mandants.

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La tenue d’élections à échéance régulière permet de fixer les limites du mandat des élus. La notion légale du mandat est étroitement liée au principe de la représentation, certains analystes politiques qualifient même le mandat «d’un contrat de mandat» liant les citoyens aux élus. La caractéristique, c’est que les élus détiennent le pouvoir pour parler et agir au nom de tous les citoyens.

Dans le système représentatif, la Constitution et les lois ordinaires sont déterminantes. Elles encadrent et fixent le champ d’actions des élus dans l’exercice de la souveraineté nationale.

Parmi les grands théoriciens de l’école du droit naturel moderne de l’époque, seul le philosophe anglais John Locke, un des précurseurs de la théorie fondatrice du libéralisme et de l’Etat de droit, mentionne la nécessité de réitérer le consentement populaire par la tenue d’élection régulière. Ainsi, soutient-il dans ses pensées que la nature du système représentatif ne peut être compromise sans référence à la temporalité électorale établie.

Cette réflexion est bien appuyée dans l’ouvrage intitulé Principes du gouvernement représentatif écrit par le politologue français Bernard Manin, Professeur à New-York University. Il rappelle que le système représentatif donne aux citoyens la faculté de renvoyer des élus au terme de leur mandat, si la politique que ceux-ci ont menée n’est pas satisfaisante. Le vote, ajoute-t-il, est utilisé comme un moyen par lequel les citoyens expriment une préférence sur la base d’un programme soumis par des candidats.

Le paradoxe pour notre pays, c’est que dans la pratique du système représentatif, les citoyens votent pour des appareils politiques, non pour des programmes de candidats. L’influence des partis ou coalitions politiques est dominante dans le choix des citoyens.

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Les conséquences sont connues de tous, les députés comme les conseillers municipaux ou départementaux, élus au suffrage universel direct, privilégient dans leurs actions la défense des intérêts de leur parti au lieu de rester au service de leurs mandants. Cela explique d’ailleurs tout le rejet et discrédit de l’institution parlementaire et le Conseil municipal et départemental.

Ces mêmes critiques sont faites récemment pour l’élection des hauts conseillers des collectivités territoriales – Hcct, avec un suffrage indirect où les conseillers municipaux et départementaux ont seulement été autorisés à voter. Mais on s’aperçoit que des voix se sont élevées pour dénoncer des achats de conscience. Cela montre encore toute la fragilité de notre système représentatif qui implique parfois une absence de maturité des électeurs et un problème de discernement dans la désignation des élus.

Il s’y ajoute pour cette nouvelle assemblée territoriale que l’ambivalence de la composition de ses membres pourrait être une tare congénitale. La tendance dans les politiques contemporaines, c’est d’avoir des institutions crédibles, mais aussi des élus légitimes.

 

Alioune SOUARE

Ancien député – Rufisque

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