En ma qualité de citoyen, je ne souhaite pas rater l’occasion que nous offrent l’actualité et le début de la matérialisation des nouvelles dispositions constitutionnelles validées au soir du 20 mars 2016, par référendum puis, publiées quelques jours plus tard par le Conseil constitutionnel. Permettez-moi, Oh, vous, hommes et femmes politiques, qui avez brigué et obtenu les suffrages de vos compatriotes, de vous adresser quelques recommandations qui, sans doute, ne vous paraîtront pas superflues après les quatre ans de gouvernance de notre seconde alternance !
Des diverses obligations que notre régime démocratique plusieurs fois séculaire vous impose, celle assurément qui me semble la plus républicaine, celle qui vous apporte le plus grand défi à relever avec le Peuple, c’est le plus grand degré de responsabilité qui vous est accordé de donner à vos compatriotes la pleine satisfaction de leurs aspirations quotidiennes : entendons-nous donc pour tenter de bien fixer le caractère et l’objet de ce nouvel horizon d’attente et, pour y parvenir, je me mettrais un instant à votre place, afin de vous indiquer, par des cas empruntés au détail même de votre passion, la politique, comment vous pourriez remplir, à cet égard, vos devoirs, tous vos devoirs et rien que vos devoirs.
La Constitution issue des joutes référendaires du 20 mars se caractérise par un souci d’opérationnalisation des quinze points proposés, parmi lesquels un mérite une attention toute particulière. Il s’agit de la nécessité de conférer un sens et une portée élevés aux «nouveaux droits», en général et, plus particulièrement, aux «ressources naturelles» au cœur desquelles se trouvent l’or et surtout le pétrole et le gaz qui suscitent déjà énormément de convoitise et de polémique.
L’expérience du terrain, partout dans le monde, s’agissant de la recherche, du développement et de l’exploitation de ces types de ressources naturelles devrait nous servir de prétexte pour l’effectuation d’un «benchmarking» dans des pays comme la Norvège, la Hollande, l’Arabie Saoudite, le Qatar, le Nigeria, la Lybie, le Tchad ou le Soudan, afin de procéder à une évaluation-diagnostique sérieuse avant toute décision ultérieure à prendre, car in fine, nos options devraient être porteuses d’une consolidation de l’unité nationale, d’un renforcement de la démocratie moderne, participative, inclusive et d’une émergence d’un Etat de droit digne du 21ème siècle, édifié dans la paix, la sécurité et la prospérité. Il y va de l’avenir de toute la Nation sénégalaise, compte tenu des enjeux géostratégiques que suscitent notre cher pays et ses ressources en friche.
Il vous faudra faire preuve, chers hommes et femmes politiques, d’un véritable sursaut national doublé d’un patriotisme sans faille pour vous inscrire dans une logique de rupture de la dynamique partenariale anciennement servie, parce que de nos jours, en plus de la France et des Usa, le Brésil, la Chine, l’Inde, le Japon… frappent aux portes du Sénégal.
Pour la première fois depuis l’indépendance, de telles opportunités ne nous ont jamais été offertes pour construire un élan patriotique susceptible de fédérer toutes les forces vives de la Nation autour de l’intérêt général : l’or, le pétrole et le gaz placent ainsi au premier rang la nécessité absolue pour tous les acteurs politiques tout comme ceux de la société civile, quelle que soit leur appartenance, de s’approprier des comportements éminemment républicains et un sens élevé de l’éthique, de l’équité, de la justice distributive et du consensus, en vue de sauvegarder les intérêts supérieurs de la Nation sénégalaise, face aux lobbies extérieurs néocolonialistes de toutes sortes. A cet effet, Monsieur le président de la République et l’ensemble de son gouvernement doivent déterminer le tempo et indiquer la marche à suivre, dans la plus grande transparence.
Le principal effort à faire ici est, semble-t-il, de séparer intérêt général et intérêt particulier, d’éliminer toute possibilité de délits d’initié, de conflits d’intérêts et autres incompatibilités et des représentants de l’Etat et des opérateurs privés, de distinguer enfin deux domaines trop longtemps confondus : celui des relations affectives qui sont personnelles, libres et variables, et celui des normes républicaines qui sont communes et indispensables à tous. Oui, le jeu du pétrole, du gaz et de l’or en vaut la chandelle.
N’est-ce pas là ce qui est déjà consigné dans la loi constitutionnelle ? : L’«attachement» du Peuple sénégalais «à la transparence dans la conduite et la gestion des affaires publiques ainsi qu’au principe de bonne gouvernance», selon un alinéa du préambule, ce qui, traduit autrement, donne : «Une gouvernance transparente, sobre et vertueuse.»
Pour cette partie capitale de notre commune volonté de vie commune, c’est sur vous, hommes et femmes politiques, enfants du Sénégal, du pouvoir comme de l’opposition, que le Peuple souverain compte depuis toujours. En vous dispensant de la formation spirituelle et de l’éducation formelle de vos concitoyens, on n’a pas songé à vous enlever ce qui fait la dignité de vos activités de gestion de la Cité.
Au contraire, il a paru tout naturel que l’homme politique, comme l’homme religieux ou le chef coutumier, en même temps qu’il apprend à son Peuple à user de ses droits et devoirs, lui transmet à la fois par la parole et l’acte ces règles basiques de la vie citoyenne qui ne sont pas moins universellement acceptées que celle de la communication ou de la mathématique.
En vous conférant de telles responsabilités, le Peuple sénégalais s’est-il trompé ? A-t-il trop présumé de vos forces, de vos capacités, de vos compétences, de votre savoir agir global républicain ?
La question mérite certainement d’être posée, parce que l’heure est grave, au regard des tensions socio politiques actuelles notées dans la quasi-totalité des secteurs de la vie nationale, en particulier celle suscitée par le pétrole et le gaz ces temps derniers. En termes clairs, qu’attendons-nous en tant que compatriotes de vous, hommes et femmes politiques ? Rien d’autre qu’une fonction très limitée et en même temps très importante, très simple, mais très difficile.
Votre rôle en matière de formation spirituelle et d’éducation formelle est très limité. Vous n’avez à transposer, à proprement parler, rien de nouveau, rien qui ne vous soit familier comme à tous les honnêtes gens : le Peuple n’a voulu faire de vous ni des philosophes ni des théologiens improvisés. Il ne vous demande rien qu’on ne puisse demander à tout homme de cœur et de sens. Il attend de vous que les richesses issues de l’or exploité depuis la fin des années 1990 à Kédougou et bientôt du gaz et du pétrole soient distribuées équitablement aux citoyens sénégalais pour l’émergence d’une agriculture moderne, l’amélioration de l’accès universel à un système éducatif et à un système de santé de qualité, l’articulation des industries, l’éradication progressive du chômage des jeunes, l’atténuation de la paupérisation des masses populaires et, par conséquent, la consolidation de la citoyenneté, du patriotisme et de l’unité nationale.
Il est impossible que vous voyiez chaque jour tous ces Sénégalais, à près de 70% jeunes, hommes et femmes qui se pressent autour de vous, écoutant vos discours, observant votre conduite, s’inspirant de vos exemples et répondant présent à vos appels, à l’âge où l’esprit s’éveille, où le cœur s’ouvre, où l’espérance grandit, sans que l’idée vous vienne aussitôt de profiter de cette virginité, de cette énergie débordante, de ce potentiel inestimable, de cette confiance totale pour leur transmettre avec citoyenneté les principes de l’éthique, de l’éducation, de la justice et du travail pour honorer la mère patrie. J’entends simplement ces valeurs cardinales que nous avons reçues de nos aïeuls et que nous nous honorons tous de suivre dans les relations de la vie, sans nous mettre en peine d‘en discuter les bases spirituelles et sociologiques.
Le Peuple sénégalais vous demande de l’aider à bien gouverner son pays, à en faire à la fois une Nation, une République, un Etat de droit. C’est dire qu’il attend de vous, hommes et femmes politiques au pouvoir, non des paroles, mais des actes républicains, non pas un manifeste de plus à inscrire au programme politique, mais un service citoyen tout pratique que vous pouvez rendre au pays. En l’occurrence, la protection des intérêts supérieurs et exclusifs de la Nation, avant ceux de la famille ou du parti, une distribution équitable des richesses issues des ressources naturelles nationales à tous les citoyens constituent deux défis majeurs à relever.
Nous avons compté sur vous pour vous confier notre destin, sur la base de contrats à durée déterminée issus du suffrage universel. La reconduction ou non de ce lien positif dépendra de la manière même dont vous vivrez avec nous et devant nous, face à vos engagements, votre façon de gouverner notre pays avec ses richesses, ses relations, sa souveraineté. Nous avons osé prétendre pour vous que, d’ici à quelques générations, les conditions d’existence des populations au milieu desquelles vous aurez exercé attesteront les bons effets de vos actes politiques de citoyenneté.
Le Sénégal serait certainement un havre d’unité, de justice, de travail, de paix et de prospérité si, par ce message, j’avais contribué à vous montrer, chères femmes politiques, chers hommes politiques, détentrices et détenteurs de pouvoirs d’Etat issus du suffrage universel toute l’importance qu’y attache le Peuple.
Vive le Sénégal émergent, dans une Afrique unie et prospère !
Votre compatriote,
Papa Moustapha GUEYE
Inspecteur de l’Education et de la Formation, Spécialiste en Planification de l’Education
Diplômé en Management et Gestion des Ressources Humaines- Diplômé du Cesag – Certifié en Leadership dans les Tic et Ks
Certifié Ppp de la World Bank