En lisant cette deuxième Lettre au Président Macky Sall, dont il était le Premier Ministre à l’époque des faits qu’il y relate, l’on se rend compte à quel point Abdoul Mbaye n’avait aucune conscience des responsabilités constitutionnelles qu’il exerçait auprés de lui.
Pourtant, je fus partie de ceux qui avaient applaudi à ce choix du Président de la République d’un haut cadre sénégalais de la société civile, issu du milieu bancaire et financier, pour exercer la fonction prestigieuse de Premier Ministre du premier gouvernement de la seconde alternance au Sénégal.
Ses compétences présumées dans les affaires bancaires et dans la finance mondiale qui est gangrenée par l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent sale vers les paradis fiscaux avec leurs comptes off- shore, lui donnaient un préjugé favorable aux yeux de nombreux hommes politiques comme moi, qui n’avaient reculé devant aucun sacrifice pour l’avènement de cette alternance afin de mettre en œuvre les ruptures qu’elle porte comme les nuées portent l’orage.
Un pareil homme, présumé de compétences et de moralité, représentait à mes yeux un gage éloquent de la volonté du Président Macky Sall, de mener une politique économique et financière de rupture, pour mieux défendre notre intérêt national, souvent bradé sous le régime de son prédécesseur Abdoulaye Wade, dans des contrats avec des partenaires étrangers.
Avec la nomination d’Abdoul Mbaye dans les fonctions de Premier Ministre, le Président Macky Sall se donnait les moyens constitutionnels, et nombre de Sénégalais comme moi y ont cru, de n’accorder des contrats aux partenaires étrangers que sur des bases sures et valables qui préservent l’intérêt national.
En effet, aucun Décret que signe le Président Macky Sall ne peut être constitutionnellement et légalement valable, sans qu’il ne soit validé par son Premier Ministre Abdoul Mbaye en y apposant sa signature auprès de celle du Président de la République.
Donc, pourquoi le Premier Ministre Abdoul Mbaye, a-t- il validé les contrats pétroliers sans avoir procéder avec ses services dédiés, les informations qu’il demande au Président Macky Sall maintenant, après son limogeage de la Primature et son entrée dans l’opposition politique ?
Lui, en tant que Premier Ministre chargé constitutionnellement de valider par sa signature tout projet de Décret que le Président de la République lui soumet, savait- il l’implication du frère du Président de la République dans le pétrole ? S’il ne le savait pas, pourquoi n’a-t- il pas procédé aux vérifications d’usage avant de contresigner le Décret portant sur le contrat pétrolier qu’il soulève maintenant ?
Même si le Président Macky Sall le savait, qui l’a empêché, lui, Premier Ministre, avec tout ce qu’il est présumé avoir de compétences en matière de Banque et de Finance du monde, de faire ses propres vérifications sur le contrat pétrolier, et de s’y opposer en cas de doute, en refusant de valider ce projet de Décret par sa signature ?
En validant le contrat avec sa contresignature du projet de Décret qui lui a envoyé le Président de la République, n’a t- il pas fait confiance à l’expertise de Pétrosen, comme le Président de la République et son Ministre de l’époque Chargé de l’Energie l’auraient aussi fait ?
Si Abdoul Mbaye, pour cela, les soupçonne maintenant de « concussion », n’est –il pas alors coupable de « complicité » en validant ce qu’il avait le pouvoir de ne pas valider ?
L’exercice de commentaire de texte qu’il a fait aujourd‘hui du projet de Décret qui lui a été soumis pour validation, pourquoi ne l’avait –il pas fait à l’époque pour s’y opposer ?
De deux choses, l’une : ou bien il savait et cela ne le dérangeait pas pour valider le contrat par sa contresignature du projet de Décret que lui a soumis le Président de la République, ou bien, il ne savait par incompétence dans l’exercice de ses fonctions de Premier Ministre en ne s’adonnant pas aux vérifications d’usage, surtout qu’il s’agit d’un contrat pétrolier qui engage l’avenir économique de notre pays, et qu’il devrait savoir, de par sa profession, que ce genre de contrat est souvent objet d’irrégularités.
Comment donc peut- il aujourd’hui vouloir se prévaloir de sa propre turpitude pour interpeller le Président de la République sur ce dossier ?
Qu’est ce qui s’est produit alors, pour que ce contrat soit devenu subitement, aujourd’hui, si suspect, jusqu’à tenter de créer les conditions psychologiques dans l’opinion pour le remettre en cause ?
Est-ce par ce qu’il a fait, une fois dans l’opposition, les vérifications qu’il aurait dû faire comme Premier Ministre pour protéger les intérêts du Sénégal ? Dans ce cas, de quel patriotisme peut alors se prévaloir ?
Ou alors, ce contrat pétrolier, qu’il a validé et qui donne aujourd’hui aux américains, britanniques et australiens, le pétrole et le gaz du Sénégal, donc le devenir économique de notre pays, dérange- t-il la France, qui , comme lui, en exigeant la liquidation de la SAR avec l’appui de la Banque mondiale, veut réduire le Sénégal en HUB d’import-export de produits pétroliers, et non un pays producteur, fort de ses réserves et de son outil industriel ?
En tout état de cause, il est nécessaire de se demander à qui profite le « crime de résiliation » du contrat pétrolier validé par Abdoul Mbaye, depuis que le Premier Ministre Français, Manuel Walls, en visite à Dakar, ait exprimé publiquement l’intérêt de la France dans le pétrole et le gaz du Sénégal, alors qu’elle y est déjà exclue par le contrat pétrolier déjà validé par Abdoul Mbaye, qu’il met aujourd’hui en cause , une fois qu’il s’est engagé dans l’opposition.
Voilà dans quelles contradictions inextricables tombent des cadres qui rentrent en politique sans le minimum d’apprentissage nécessaire de la vie et l’action politique qui ont ses propres règles et leur éthique, qui veulent, « qu’en politique, on ne peut pas faire feu de tout bois ».
C’est pourquoi, il est impossible de « s‘improviser homme politique ». On le devient à travers un apprentissage approprié, au sein d’un parti politique, dans la lutte politique qui ne veut rien dire d’autres « que la lutte pour la conquête du pouvoir d’Etat et pour le conserver ».
C’est par manque de cet apprentissage, que des cadres professionnellement compétents qui rentrent en politique se « brûlent les ailes » en voulant faire « feu de tout bois ».
Ils n’ont pas la « langue de bois », mais ont une forte propension à la démagogie et à la politique politicienne qui finit par les discréditer et les « détruire politiquement », en ne leur laissant que « rancœur et amertume » à ressasser à longueur de journées. Cette deuxième Lettre d’Abdoul Mbaye en est la preuve par 10.
Ibrahima SENE
PIT/SENEGAL/CDS/BBY
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