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Vers La 13e Législature : Rupture Ou Continuité ? Interrogeons L’histoire Parlementaire Du Sénégal Indépendant

Le 30 juillet 2017 est la date officiellement retenue pour le renouvellement des députés de l’Assemblée nationale, correspondant à la treizième (13e) Législature de l’histoire parlementaire du Sénégal indépendant.

Quarante sept (47) listes de partis politiques légalement constitués, de coalitions de partis politiques légalement constitués et d’entités regroupant des personnes indépendantes sont autorisées à «compétir» pour les 165 sièges de cette treizième Législature.

A la date du 30 juillet 2017, l’histoire parlementaire du Sénégal indépendant aura bouclé douze (12) Législatures. Leur dénominateur commun, notamment de la deuxième (2e) à la douzième (12e), est la continuité ; un pouvoir législatif jouant le rôle d’une caisse de résonnance au service exclusif de l’Exécutif par le mécanisme dit d’une majorité présidentielle massive.

La treizième (13e) Législature en vue va-t-elle enfin opérer la rupture tant souhaitée et dont les électeurs ont, par deux fois, indiqué la voie avec les deux alternances qu’ils ont imposées à la classe politique en 2000 et 2012 ? C’est là l’enjeu principal du scrutin du 30 juillet 2017. Quelles sont les listes congénitalement porteuses de la continuité et quelles sont celles qui garantissent réellement la rupture ?

La réponse à ces questions peut être trouvée dans l’interrogation de l’histoire parlementaire du Sénégal indépendant. Où sont ceux qui ont eu à gérer les douze Législatures de cette histoire ? Ont-ils dégagé la scène de la compétition, où sont-ils dans la jungle des quarante sept (47) listes qui sont sur la ligne de départ de la compétition du 30 juillet ?

Parmi ces douze Législatures, neuf (9) se sont déroulées sous le magistère de l’Ups/Ps, deux (2) sous celui du Pds et de sa coalition la Cap21 et une (1) sous celui de l’Apr et de sa coalition Bby. L’habitude étant une seconde nature, on peut valablement ne pas s’attendre à une rupture venant de ces éléments qui sont à la fois les initiateurs et les continuateurs d’une Assemblée nationale aux ordres.

Les neufs (9) premières Législatures – de 1960 à 2000 – ont fonctionné sous la baguette rigoureuse de l’Ups/Ps. Les deux (2) suivantes – de 2000 à 2012 – sous celle du Pds/Cap21 et la dernière et douzième – de 2012 à 2017 – dans la continuité, sous la férule de l’Apr/Bby.

Les statistiques disponibles sur les onze dernières Législa­tures donnent les chiffres suivants portant sur le pourcentage des suffrages valablement exprimés et le nombre de sièges acquis sur le total mis en compétition pour chaque Législature.

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Ups : 94,2% -80/80 (2e) ; 100% – 80/80 (3e) ; 100% – 80/80 (4e)

Ps : 81,74%  – 83/100 (5e) ; 79,94% – 111/120 (6e) ; 71,34% – 103/120 (7e) ; 56,56% – 84/120 (8e) ; 50,2% – 93/140 (9e)

Pds/Cap21 : 49,6% – 89/120 (10e) ; 69,21% – 131/150 (11e)

Apr/Bby : 53,6% – 119/150 (12e).

De l’Ups à l’Apr, la présence massive dans l’Hémicycle des députés de la majorité présidentielle est la réalité également partagée par les partis majoritaires suite au caractère présidentiel du régime politique en vigueur au Sénégal depuis 1963, mais également au scrutin majoritaire départemental à un tour très prisé par les partis politiques en première position.

Ces partis qui ont longuement fait leurs preuves dans la continuité d’une gestion désastreuse du pouvoir législatif sont encore présents dans les quarante sept (47) coalitions qui briguent les suffrages des électeurs pour la prochaine législature à l’occasion du scrutin du 30 juillet 2017. Leurs preuves sont largement éloquentes pour les placer en dehors du camp de la rupture.

Leur pratique en la matière de plus de cinquante ans a contribué à bâtir une image ridicule du député, objet des railleries populaires amusantes qui courent les rues. Les dernières en date sont celles relevées dans les sermons des imans lors des cérémonies de la prière de la fin du mois de ramadan 2017. La presse a relayé certains de ces sermons inspirés par la réalité des élections législatives inscrites dans l’air du temps.

Sur l’ensemble du territoire national, les imams se sont révélés au diapason de la situation et alerté leurs coreligionnaires sur la gravité du choix de leurs représentants à l’Assemblée nationale qui leur est proposé par le scrutin du 30 juillet.

On peut en citer quelques-uns :

Imam Tafsir Babacar Ndour de la mosquée Moussanté de Thiès : «Les hommes politiques sans profession, maîtres dans l’art de trahir, de corrompre, de tromper, car il y va de leur intérêt puisqu’ils n’ont bâti leur notoriété que sur le verbiage. Malheu­reusement, ces individus sont grassement payés par le contribuable alors que le chômage des jeunes est là, pressant.»

Imam Ismaïla Aïdara, iman ratib de la grande mosquée de Ziguinchor : «Il y a trop de querelles de positionnement, d’insultes et de mensonges dans l’arène politique sénégalaise.»

Imam Cheikh Tidiane Diallo, imam ratib de Saint-Louis : «La législature en cours est la plus minable de toute l’histoire parlementaire du Sénégal. Il y a certains députés qui ne s’intéressent qu’aux avantages liés à la fonction. Les députés ne doivent pas passer leur temps à se prélasser à l’Assemblée nationale dans le but uniquement de percevoir des salaires exorbitants, de nombreuses indemnités. Ils ne doivent pas être payés à ne rien faire.»

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Iman Mouhamadou El Habib Kandji, imam ratib de la grande mosquée de Diourbel : «Nous n’avons pas besoin d’un député qui part à l’Assemblée et passe tout son temps à dormir. Cela suffit maintenant, parce que nous en avons eu dans le passé. Vous, futurs parlementaires, de grâce, ne dormez pas dans l’Hémicycle !»

Mame Libasse Laye, imam de Layène : «C’est plus grave chez les politiciens qui utilisent des deniers publics pour corrompre les électeurs. Au delà de la corruption qui est avérée, c’est du vol. Pauvreté n’est pas un vice. Elle ne doit pas conduire les gens à perdre leur dignité. Récusez l’achat des consciences ! Si un électeur cède à l’achat de conscience en primant l’argent qu’il reçoit au détriment du mérite des autres candidats, il a trahi les recommandations de Dieu, celles du Prophète Mohamed (Psl) et de l’islam.»

Ainsi, la condamnation est-elle unanime. L’image du député sortie de la pratique des douze Législatures de l’histoire parlementaire de notre pays est hideuse et ceux qui ont eu à conduire cette histoire sont toujours là et ont la prétention outrancière de vouloir briguer les suffrages de l’électorat pour la treizième (13e) Législature. Les réélire, c’est encore ouvrir toutes grandes les portes de la continuité, de la corruption, du népotisme et des détournements impunis de l’argent du contribuable.

La pratique quotidienne dans cette période de précampagne du leader de la coalition Benno bokk yaakaar (Bby) en est une parfaite illustration.

L’argent du contribuable, les billets de pèlerinage à la Mecque, les bourses familiales, la couverture maladie universelle, les menaces ouvertes en direction de ses partisans sur fond d’inaugurations programmées rapprochées sont ses armes privilégiées pour appâter les électeurs. Pourtant, tout cela provient de l’argent du contribuable. Les annexes 10 et 11 de la loi de finances initiale 2017 mentionnent bien les dotations suivantes d’un montant de : 700 millions de francs Cfa pour la Délégation à la protection sociale et à la solidarité, 1 milliard 380 millions 825 mille pour la Délégation générale au Pèlerinage aux Lieux saints de l’islam, 10 milliards 664 millions 146 mille F pour l’Agence de la Couverture maladie universelle (Cmu), 30 milliards F pour le Programme national de Bourses de sécurité familiale, dotations entièrement financées par les recettes fiscales du budget général, donc bien avec l’argent du contribuable.

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S’y ajoute la carte blanche qui lui a été donnée pour choisir les candidats de sa coalition, aussi bien au niveau national que départemental. Tous les députés qui seront élus sur ses listes lui seront redevables durant toute la treizième Législature qui sera la copie conforme de la douzième.

Démasquer à travers les quarante sept (47) listes qui briguent les suffrages des électeurs les candidats qui ne présentent aucune garantie de rupture !

Ils sont nombreux et leur passé, tel que révélé par l’histoire parlementaire de notre pays, demeure la preuve irréfutable que leur accorder la majorité à la treizième Législature équivaut à voter pour la continuité des pratiques nuisibles observées durant les douze dernières Légis­latures.

L’argent, la fraude et la corruption sont les moyens qu’ils vont massivement déployer pour atteindre leurs objectifs. Ces moyens sont leur trait commun qu’ils ont tiré de leur passage au pouvoir qui leur a permis de disposer impunément de l’argent du contribuable, des moyens de l’Etat et des richesses de la Nation.

Pour l’illustrer, on peut se reporter à l’annexe de la loi de finances initiale 2017, relatif à la progression du volume du budget et qui révèle que de 2000 à 2011, l’Assemblée nationale a mis à la disposition de la gestion Pds/Cap21 la somme de 17.079 milliards 433 millions, et à la gestion Apr/Bby sur la période 2012 à 2017 la somme de 17.122 milliards 633 millions.

La gestion calamiteuse de ces montants faramineux explique bien les comportements de certains sur la scène publique.

Faut-il rompre avec ces pratiques qui n’ont que trop duré au grand dam de notre Peuple et principalement de sa jeunesse ou accepter leur continuation ? Le scrutin du 30 juillet 2017 sera l’occasion de répondre à cette question.

Continuité ou rupture ?

La majorité des Sénégalais est pour la rupture. Qu’elle le manifeste le 30 juillet en sanctionnant sévèrement ceux qui sont clairement identifiés, et par l’histoire et par leur pratique, comme garants de la continuité.

Alla KANE

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