De plus en plus de salariés sénégalais optent pour le virement de leur salaire dans leurs comptes. En même temps, beaucoup d’entre eux ignorent le b.a.-ba du fonctionnement d’un compte bancaire, et cela entraîne des erreurs évitables qui engendrent des frais.
Explications sur le chèque
Mon cousin avait postdaté un chèque. Il croyait que sa banque refuserait de payer le chèque tant que ladite date n’arrivera pas. A sa grande surprise, le chèque revint impayé. Je lui expliquai que le chèque est payable à vue. Supposons que j’émette un chèque le 05/01, chèque postdaté le 11/01. Si le bénéficiaire le présente le 06/01, et mon compte ne dispose pas d’une provision suffisante, le chèque se retrouvera impayé.
En résumé, une fois que le chèque est émis et remis au bénéficiaire, celui-ci peut se présenter pour l’encaisser. Postdater un chèque est donc inutile. Aussi, pour éviter de supporter des frais pour chèque impayé, assurons-nous que notre compte dispose d’une provision suffisante.
Une autre cause d’impayés est l’incompréhension sur les dates de valeur. Supposons que je remette un chèque de 100 mille francs Cfa le 03 janvier et en émette un autre du même montant à la même date. Le 03/01 représente la date de comptabilisation ou d’opération des deux chèques. Cependant, les dates de valeur diffèrent : le 02/01 pour le chèque émis et le 04/01 pour le chèque remis. Si mon compte ne dispose pas d’une provision suffisante à la date du 03/01, le chèque émis reviendra impayé. Dans ce cas, nous devons contacter notre gestionnaire de compte pour qu’il force le montant du chèque et nous éviter ainsi des frais d’impayés.
En résumé, la banque considère les dates de valeur plutôt que les dates comptables. Généralement, pour une opération de débit, la date de valeur est égale à jour j-1 et pour une opération de crédit à jour j+1. Pour les versements d’espèce, la date comptable équivaut à la date de valeur.
Le fonctionnement du crédit
J’entends souvent des plaintes de connaissances sur la différence entre les taux d’intérêt bas affichés dans les panneaux publicitaires et ceux qui figurent dans le tableau d’amortissement de leur crédit. Pour attirer le client, les banques affichent le taux qui s’applique sur l’intervalle le plus réduit. Un principe élémentaire de la gestion de risque est que, plus l’échéance du crédit est lointaine, plus le crédit est risqué, donc le taux d’intérêt appliqué plus élevé. En outre, un crédit comprend des frais et autres commissions – constituant avec le taux d’intérêt et les primes d’assurance obligatoires, le taux effectif global -, que nous pouvons négocier. Quand nous comparons les taux d’intérêt appliqués par diverses banques, ne considérons pas le taux d’intérêt nominal, mais plutôt le taux effectif global. Ce dernier donne une meilleure idée du coût du crédit que le taux nominal qui est greffé de divers frais, variant selon les banques et entraînant des taux effectifs globaux qui diffèrent.
En résumé, au moment de signer le dossier de crédit, prenons la peine de poser à notre gestionnaire de compte des questions sur ce que nous ne comprenons pas. N’hésitons pas à comparer les conditions tarifaires de plusieurs banques et surtout négocions les frais de dossier ! Si nous disposons d’autres revenus, montrons-les au banquier pour lui prouver que notre risque de défaut est faible.
Je possède un livre de finance très instructif, Corporate finance demystified, écrit par Troy Adair. En lisant ce livre, je me suis rendu compte que nous pouvons adopter certaines stratégies pour réduire nos annuités – l’annuité est la somme de l’amortissement du crédit et des intérêts du crédit payés à intervalles réguliers. Supposons que nous avions contracté un prêt à un taux de 12%. Deux ans plus tard, notre banque diminue les taux à 8%. Nous pouvons refinancer notre crédit afin de diminuer nos annuités. Nous supporterons des pénalités de remboursement, mais nous réduirons nos annuités. Notre gestionnaire de compte dispose des outils pour faire le calcul.
En résumé, n’hésitons pas à refinancer notre crédit quand les taux d’intérêt diminuent.
Bâtir notre indépendance financière
Une prospérité financière passe par l’épargne et une utilisation productive de nos crédits. Nous est-il arrivé de nous demander comment nous avons dépensé l’argent de notre crédit ou ignorons ce que nous en avons fait ? Pour éviter cela, préférons l’épargne au crédit, que nous ne devrons utiliser qu’en cas d’urgence ou pour acquérir des biens qui croissent dans le temps – actions, biens immobiliers, investissements dans des projets. Adam Smith écrit à propos des intérêts dans son livre De la richesse des Nations : «Celui qui emprunte pour dépenser sera bientôt ruiné.» Ouvrons un compte d’épargne et épargnons une partie de notre revenu. Les virements permanents du compte-chèques vers le compte d’épargne sont gratuits. Cela nous permettra de pouvoir faire face aux imprévus.
En résumé, épargnons une partie de notre revenu, cela nous permettra de pouvoir supporter les imprévus sans forcément demander un crédit ou un découvert – dont les intérêts se rapprochent du taux usurier de la Bceao.
Une stabilité financière passe par connaître la subtilité du système bancaire, éviter les erreurs basiques qui engendrent des frais évitables. Pour atteindre notre indépendance financière, nous devons épargner, budgétiser et envisager un crédit qu’en dernier recours. A défaut, nous serons pris dans un engrenage de difficultés financières qui nous éloignera de l’indépendance financière. Il est toujours possible de créer les conditions pour passer de difficultés financières à indépendance financière. Cela passe par l’organisation, la rigueur dans les dépenses, l’investissement.
Moussa SYLLA
www.moussasylla.com